MAGNETIQUE YOUN SUN NAH
Rocher de Palmer, Cenon – jeudi 25 mai 2023
par Sylvie Delanne , photos Jean- Michel Meyre
21h, c’est presque discrètement que la magnétique chanteuse coréenne YOUN SUN NAH entourée de trois pointures investit la scène de la salle 650 du Rocher de Palmer, le talentueux TONY PAELEMAN prend place au piano et aux claviers, le stupéfiant new-yorkais, BRAD CHRISTOPHER JONES, à la contrebasse et à la basse électrique et le grand THOMAS NAÏM aux guitares acoustique et électrique.
Ils offrent ce soir un onirique «WAKING WORD », une ballade intime de titres, tous écrits par Youn Sun Nah, pendant le confinement et sortis à l’occasion de ses 20 années de carrière.
Pendant deux heures Youn Sun Nah par la magie infinie de sa voix tour à tour profonde, ronde, fluette ou rauque, va caresser notre enveloppe émotionnelle et faire frissonner les plus endurcis.
Tout de suite je remarque derrière moi la présence d’une longue rangée d’enfants. Dans le cadre d’un partenariat initié par le Rocher de Palmer, des élèves de l’école primaire verte du Grand Tressan à Lormont ont pu pendant les balances rencontrer et échanger avec les artistes, grande surprise pour Youn Sun Nah, les enfants ont appris « Lost Vegas » et lui ont fait ce cadeau – ils nous en donneront la preuve dans quelques minutes. Cette rencontre entrait dans le cadre du parcours scolaire « A la découverte des musiques actuelles » , un projet très louable.
Les morceaux vont s’enchaîner Youn joue avec sa voix intense, son corps se place, enlace la musique, les mains expressives, légères s’envolent et caressent la palme, Youn accompagne ses musiciens, peut monter dans un ultime octave et redescendre en glissando jusqu’au rauque .
Voix profonde et envoûtante pour une ballade nostalgique , « Bird on The Ground », puis surprenante, haute et cristalline dans « « Heart of a Woman », « Lost Vegas », Youn donne la main aux élèves et, de la salle, un chant rythmé a capella, monte, timide d’abord puis affirmé et la tendre Youn Sun Nah émue jusqu’aux larmes, remercie les jeunes étudiants de sa voix délicate. Belle reconnaissance partagée, salve d’applaudissements…
– Un long prologue au piano introduit la mélodie « My Mother », les notes coulent et accueillent la belle tessiture profonde en ce chant offert à la mère sur de très beaux effets de guitare électrique.
– « I’am Yours » commence sur un sublime solo de guitare… « Oh my sun, oh my blue sky »… la voix fragile comme la porcelaine la plus rare et la plus fine, la salle, comme fascinée, le rythme instrumental en retenue, le cri d’une mouette, très très aigu plane sur la scène …
– Isaac Albeniz est aussi invité à la fête, un scat d’Asturias, j’adore comme elle joue avec sa voix, avec ses mains, frotte et tapote… merveilles de Thomas Naïm, le piano entre en percussions intérieures, Tony plonge dans le coffre et retire de subtils sons cubains, il joue aussi avec son corps, tape et vibre, quelle virtuosité – applaudissements – revient la voix – monte, puissante, sauvage jusqu’à l’apocalypse, elle danse en hauteur, Youn devient rebelle, claque des talons, halète, prolonge une note jusqu’à l’extrême avant de revenir au thème et d’achever cette extraordinaire transe de feu.
Folie dans la salle – les musiciens sortent …
Youn , avec son petit piano de papier , commence doucement le grand classique de la soul « Killing me Softy with this Song » composé par Charles Fox en 1971, bientôt repris en sourdine par la salle .
– Suit un magnifique et intime « Lament » (album Lento);
– Puis un morceau du grand Prince, « Sometime Snows in April » le bassiste vient ajouter la profondeur de sa voix , il reprend son archet sur de beaux accords de piano…envoûtant…
– Brad Christopher Jones prend ensuite la main en solo sur un rythm & blues, Please don’t be sad…C’est excellent et Youn devient la force et l’énergie de Tina…
Enfin le clou « Don’t Get Me Wrong », brillamment accompagné au piano pendant que Youn, concentrée, marque le rythme de ses mains ailées.
Dernier morceau , « Jockey Full of Bourbon » de Tom Waits, un chant nasal comme sorti d’un saloon au rythme échevelé de la guitare électrique et du whisky.
La salle exulte, standing ovation de plusieurs minutes…
Le concert pourrait s’arrêter là mais les écoliers réclament en hurlant « Avec le Temps » – quelle émotion !
2e standing ovation
Puis dernier rappel, une rigolote recette des pancakes par une diva délirante et une contrebasse à l’unisson
…et 3è standing ovation !!
Dans mon récit, je ne sais pas si j’ai assez parlé de la gentillesse de Youn Sun Nah, de sa proximité avec le public, de sa douceur et de la lumière d’aurore qu’elle dégage, ni de sa voix de porcelaine à feu, fine et résistante, ni de son humour et son énergie à toute épreuve. 5mn plus tard, Youn était dans le hall, signait ses disques et prenait chaleureusement dans ses bras des admirateurs rayonnant.
Une Diva vous dis-je ! Une DIVA !!!
Retour avec 2 pépites de CD dont étaient tirés les morceaux joués, « Waking Word » et Immersion »