Concert de Christian Scott Atunde Adjuah + Le Youpi Quartet au Rocher de Palmer

Dimanche 10 mars, salle 650 du Rocher de Palmer

Par Carlos Olivera, Photos : Olivier Barau

youpi4tet

Je suis persuadé que si on avait été capable de capter toute l’énergie dégagée lors de cette soirée on aurait pu éclairer Bordeaux pendant une semaine !

Que les musiciens nous ont régalés avec ce concert dans la salle 650 du Rocher de Palmer !

Nous avons commencé par le Youpi Quartet, cet ovni de la scène française dont, je n’ai pas peur de le dire, je suis fan ! Un groupe d’une puissance exceptionnelle, avec une rythmique solide et créative impulsée par Curtis Efoua et Ouriel Ellert. La basse électrique d’Ouriel est branchée à une armée de pédales d’effets qui lui permettent de changer de couleurs en permanence et de dégager une énergie constante. Son partenaire à la batterie est aussi énergique et guide le groupe à travers tous les changements rythmiques dont le Youpi Quartet est capable.  Et de l’autre côté, l’harmonica chromatique et la flûte traversière font un drôle de couple. L’harmonica, transformé par moment en instrument électronique (grâce à l’utilisation d’un harmonica midi !!!), est d’une sonorité et d’une versatilité énormes entre les mains de Laurent Maur. De l’autre côté, Emilie Calmé, avec sa flûte, nous transporte avec plusieurs textures sonores. Il faut dire que nous avions écouté et aimé la musique du Youpi Quartet il y a plus ou moins d’un an, lors de la sortie de leur album. Mais aujourd’hui le groupe semble encore plus solide et leurs nouveaux morceaux encore plus aboutis ! Le public a applaudi avec enthousiasme ses 35 minutes sur scène. On l’attend avec impatience la suite de ses aventures et notamment un nouvel album à l’automne !

Christian Scott

Et après quelques minutes de changement de plateau : voici les musiciens de Christian Scott qui montent sur scène. Le dernier à entrer est le trompettiste qui tient entre les mains ses célèbres trompettes aux formes capricieuses, des Adams néerlandaises qu’il a dessinées lui-même. Les musiciens se positionnent avec Scott au centre de la scène, en gros manteau gris, un énorme collier doré autour du cou et des anneaux dorés dans les mains.

Le concert commence avec une force presque brutale. Les percussions et la batterie avec un son électronique se lancent suivis du clavier (magnifique Fender Rhodes de Lawrence Fields), de la contrebasse et des horns. Ensuite Scott se lance dans un solo avec un son de trompette sauvage qui déchire. Il est presque en transe (et ce, pendant presque tout le concert). On voit qu’il se donne entièrement au solo, on voit les veines de son visage se gonfler, pour après laisser la place au sax, qui va lui aussi faire un solo d’exception.

Christian Scott au Rocher Au deuxième morceau, vont s’ajouter au fond électronique, les pads de la batterie. Même si l’électricité est partout, à elle répond cette fois le clavier acoustique. Christian Scott prend le tambourin de sa Nouvelle-Orleans natale au milieu d’une orgie sonore. On n’est qu’au deuxième morceau du concert mais ce qui m’étonne c’est que la complexité sonore est déjà éclatante !

À la fin du deuxième titre, Christian Scott prend le micro pour nous parler : « beaucoup des gens pensaient que le jazz is serious and cool! You know what ? Fuck that!  …On va réévaluer notre relation avec le jazz et l’improvisation… ».

Ensuite, et après les applaudissements du public, il nous dit : « Je déteste Los Angeles, et donc je lui ai écrit ce morceau ! ». Et là commence « West of the West ». Le clavier Fender Rhodes débute avec un riff bluesy suivi d’un solo de clavier incroyable. Pendant ce temps Christian Scott enlève son manteau. Il s’est clairement réchauffé, et se lance dans un solo de trompette très cool, très swinguant. Ça swingue et je me dis que c’est l’esprit de NOLA qui tout d’un coup remplit la salle. Super solo de Christian Scott suivi d’un non moins impressionnant solo de sax de Logan Richardson. Pendant tout ce temps, la communication entre les percussions de Weedie Braimah et la batterie de Corey Fonville est simplement géniale. Ça y est, on est transporté, loin, dans une autre dimension.

On enchaîne avec «Eye of the Hurricane » d’Herbie Hancock à une vitesse impressionnante et on assiste à un duel de horns avec des questions/réponses entre ces deux, hors-norme. La salle est déjà sur un nuage. Et même si le temps a passé, nous avons du mal à admettre que ce sera bientôt la fin !

Avant de donner suite à la dernière composition, Christian Scott prend le micro et nous parle de ce morceau inspiré d’un chant tribal de la Nouvelle-Orleans. Il nous parle du danger de rester trop renfermés sur nous-mêmes. Cela nous fait oublier, parfois, que nous sommes tous identiques. Et après un long speech sur l’égalité, sur l’amour et la capacité qu’on a d’aimer, on entame le dernier morceau du concert. C’est un titre qui nous perce comme un couteau. Les musiciens sont en transe, on voit le visage de Christian Scott se transformer. Et c’est la fin de ce concert. Pas de rappel, et en vérité, je pense que ce n’était pas nécessaire. Le concert était rond, parfait, rien à dire, rien à ajouter.

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