Par Anne Maurellet

Festival Uzeste – 42e Hestejada de las artes – 24/08/19

Sylvain Luc, guitare

Comme une entrée à pas feutrés dans cette Collégiale, Sylvain Luc crée d’abord une ambiance : accords qui montent vers la nerf ou alors radeau perdu sur le fleuve intranquille qui ne cherche pourtant pas à rejoindre la vie. Il tournoie, Aguirre ou la colère de Dieu, musical, c’est un chemin difficile où le brouillard pénètre nos oreilles. Beauté étrange des sons d’une guitare que le musicien s’occupe à déranger, à tapoter en lui extraire ces sons d’un air alourdi par une chaleur humide. Nous montrons les mangroves soulevées par la flottaison faussement arbitraire.

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Viennent les doux accords d’une danse basque et ce tempo qui aime à ralentir, Sylvain les enregistre. Le chorus ainsi « planté » il l’enlumine et nous entraîne vers une charmante bossa dans l’air toujours chaud d’une contrée accueillante ; variations délicieuses, de plus en plus délicates et dentelles dans cette lumière de fin de journée. On se roulerait bien dans le sable -tant pis pour les images d’Epinal…- l’eau discrète serait forcément transparente pour nous laisser entrevoir quelques coquillages. Une danse basque ? Couché-(es) la face vers les cieux alors.

Suit un hommage à la musique classique espagnole, lui reconnaissant son lien à la terre, célébration du jour jazzéifiée. Trouver une nouvelle voie dans cette rythmique de caractère, on taperait bien du pied et des castagnettes. Les talons s’enfoncent dans le sol et une curieuse danse aux accents plus sauvages, gitans se dessine. Sylvain écoute parfois sa guitare et veut la surprendre en traquant l’inattendu dans l’entendu. Et ça scrute, et ça sculpte !

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Aux nouveaux accords, une femme se berce doucement, le musicien raconte peut-être des histoires au creux de notre oreille, donnant à chaque note la forme la plus ronde, la plus sensible qui soit. Faire vibrer les cordes de sa guitare et de nos âmes châtiées ou pas dans ce lieu, qu’importe. Le son monte comme un élixir sucré, on en boirait encore pour s’endormir tranquillement apaisé(es).

On termine par une toccata revisitée qui se libère de son algèbre et se déploie patiemment. Elle résiste encore, mais Sylvain Luc lui apporte la liberté du plaisir avec des accords détachés de la gangue. Si l’on regarde bien, ou en tous cas à travers le filtre de sa musique, les vitraux ont pris des couleurs chaudes. Sylvain glisse quelques mesures de chansons populaires, clin d’oeil rapide à Brassens, pour les embarquer dans ses compositions. Les « gens honnêtes » n’ont qu’à bien se tenir. C’est un irrévérencieux taquin !

Anne Maurellet