par Philippe Desmond

Saint Jean d’Illac (33), jeudi 17 juin 2021

Cette reprise « tant attendue » des concerts est finalement assez poussive côté public. En plus du syndrome de la cabane qui incite au repli sur soi et son chez-soi après cette longue période de restrictions, avec le syndrome Netflix, avec toujours une certaine crainte du virus, avec pour certains l’Euro de foot, voilà que la météo s’en mêle, venant contrarier aussi les organisateurs qui en cette période avaient imaginé leurs manifestations à l’extérieur. C’est ainsi que ce soir à l’occasion du 40ème anniversaire de Jazzillac nous voilà une cinquantaine seulement de personnes réfugiées à l’abri des immenses bâtiments d’une ancienne usine, nommée désormais l’Uzzine.

Pas n’importe laquelle, celle où se fabriquaient les bateaux Zodiac. Un énorme orage, un déluge de pluie, claquant bruyamment sur le toit en tôle, de véritables rivières dans les abords faisant regretter un moment que quelques zodiacs n’aient été oubliés dans un coin pour pouvoir rentrer chez nous…

Au programme Hurricane Turtle – tiens un ouragan et des tortues, aquatiques certainement – venu jouer son album « Umbrellas » – tiens des parapluies – un hasard ? Un clin d’œil aux pluies tropicales et malheureusement parfois catastrophiques de New Orleans dont le groupe vient jouer la musique, pas le jazz traditionnel mais le funk coloré et festif.

Le groupe est un quintet : Pierre Cherbero (chant, claviers), Sylvain Tejerizo (sax ténor), Julien Dubois (basse), Yann Vicaire (batterie) et ce soir Olivier Miqueu (trombone) qui remplace Sébastien « Iep » Arruti. Action Jazz avait parlé de leur premier album sorti en mars dernier : https://blog.lagazettebleuedactionjazz.fr/hurricane-turtle-umbrellas/

Pierre Cherbero est souvent allé à New Orleans et il avait envie avec ses compères de faire revivre ces moments musicaux festifs bien loin du vieux jazz, plus proches du Rhythm and Blues, mais toujours imprégnés de cette multi-culture locale. Le répertoire mêle les compositions originales du groupe à celles du grand pianiste Allen Toussaint, d’Harry Connick Jr , de Professor Longhair…

 

Le format des titres est le plus souvent celui de chansons, ce qui peut dérouter les amateurs de jazz, certains morceaux étant ainsi relativement courts, sans développements improvisés. Mais la fin du concert laissera la place à la liberté et les chorus arriveront pour notre plus grande joie. Musique qui donne envie de danser ce qui est encore interdit, fesses sur chaise obligatoire. Mais ça danse en douce dans un coin, à quatre ou cinq en ligne en mode country ; mélange musical jusque là donc. Il faut dire que cette musique donne envie de bouger et la frustration est insupportable pour certains.

Pas facile non plus pour les musiciens de jouer dans un tel volume, sous les immenses ponts roulants devant si peu de gens, tiers de jauge alors que le concert est gratuit. Mais ceux qui sont là apprécient car un musicien ne joue pas en fonction du nombre de gens devant lui, il ne joue pas moins bien, il joue comme il sait et aime le faire.

On va en avoir vite la preuve et le concert va même durer près de deux heures, avec deux titres au rappel très généreusement développés. Devant une solide rythmique Pierre Cherbero au clavier et au chant se pose en leader, dialoguant avec la trombone et le saxophone. Ah ces soufflants, indispensables dans cette musique, trait d’union avec les groupes de rue, les second-line que certains titres évoqueront. Une musique qui contribue à donner envie d’aller découvrir New Orleans, ses traditions, ses musiques, ses habitants.

Allez les suivre sur le web et ne les ratez pas si vous les voyez à l’affiche : https://www.larouteproductions.com/nos-artistes/hurricane-turtle/