Festival Jallobourde 2024
par Philippe Desmond ; photos PhD (Cestas), Philippe Marzat (St-Jean d’Illac) – cliquer sur les photos pour agrandir.
Festival Jallobourde ? Mais que signifie ce nom curieux ? Un mélange de Jalle et d’Eau Bourde, deux petite rivières désormais en partie canalisées qui se jètent dans la Garonne à Bordeaux après avoir traversé plusieurs communes dont les quatre qui se sont associées pour créer un festival. Tout cela a vu le jour il y a une douzaine d’années grâce à Louis Gilly qui organisait déjà Jazzillac à Saint-Jean d’Illac ; l’idée d’associer l’eau le jazz, une hydrographie du jazz comme il le dit. La programmation des quatre villes reste par contre à leur propre initiative.
Près de l’Eau Bourde à Cestas
Samedi 13 janvier 2024
La pluie fine et le froid n’ont pas découragé une centaine de personne pour rejoindre la salle du Bouzet. Pas de chance le chauffage a été en panne une bonne partie de la journée et ce n’est pas l’atmosphère qui va nous réchauffer, comptons sur le jazz pour le faire.
Whisper Not
Un festival se doit d’avoir une emprise sur son territoire, c’est le groupe d’amateurs -dont quatre cestadais – Whisper Not qui va ainsi ouvrir la soirée et justement avec le titre dont ils se sont baptisés, la douce composition de Benny Golson. Une demi-heure de standards qui font toujours plaisir à entendre, du « Hallelujah I love her so » de Ray Charles à « It don’t mean a thing » en passant par « All of me », « Beautiful Love », « Allright you win », « Sweet Georgia Brown », « Bei Mir Bist Du Shein ». Pas facile pour eux, très espacés sur cette grande scène, un peu loin du public et avec cette fraîcheur ambiante. Mais ils l’ont fait et obtenu le succès.
Musiciens : Jocelyne Fournié (chant), Guy Cosimi (contrebasse), Alain Kern (guitare), Thierry Boulat (sax et clarinette) Patrick Gueydan (batterie).
Charlène Martin et Song for Six « Jardins »
Cette formation vient de Poitiers autour d’un projet atypique mené par la chanteuse compositrice Charlène Martin. Le répertoire est tiré de l’album « Jardins » sorti en 2020. De la chanson réaliste aux reprises de la pop de David Bowie, le jazz, parfois free (compo de Claude Barthélémy actuel chef de l’ONJ), se mêlant à l’ensemble, voilà une prestation très originale, surprenante souvent, complexe parfois et légère de temps en temps. Autour d’arrangements particulièrement ciselés, les musiciens tous excellent se retrouvent pour épauler le chant pur de Charlène Martin. Au trombone Christiane Bopp récemment classée avec justesse dans les meilleurs tromboniste de l’année par Jazz Magazine, au clavier Rhodes Jocelyn Arhiman, au violoncelle Pascale Berthomier, à la batterie Romain Bercé et aux sax Olivier Dupeyron suppléant ce soir Matthieu Metzger. Jardins d’enfance, jardins intimes, vivent dans de très jolis textes d’auteurs, parfois piquants comme « Le désespoir des singes », souvent poétiques. Belle performance vocale de Charlène, de la douceur au cri, du scat aux vocalises, et des choix audacieux. Une partie du public se retrouvera dans les trois titres de David Bowie repris avec personnalité, le « Let’s dance » final n’arrivant pas pour autant à le faire danser, il aurait fallu quelques degrés de plus. Merci au service culturel de Cestas de nous avoir fait découvrir cet univers.
Sur la Jalle à Saint Jean d’Illac
Vendredi 19 janvier 2024
On change de rivière, on passe de l’Eau Bourde à la Jalle et de Cestas à Saint Jean d’Illac. Cette dernière ville est un peu le berceau du jeune (15 ans) festival Jallobourde qui est une extension du festival Jazzillac créé près de trente ans avant, sous l’impulsion de Louis Gilly.
Très beau lieu que cet Espace Quérandeau dans le hall duquel trois photographes d’Action Jazz exposent leurs clichés ; portraits sensibles pour Solange Lemoine, photos contrastées noir et blanc pour Philippe Marzat et couleur pour Alain Pelletier ; même thème, le jazz, mais des sensibilités différentes pour ces trois artistes.
Eric Séva invite Michael Robinson pour « Frères de Songs » et au nom du père
Eric Séva nous glisse que ce soir il va baptiser son projet « Père de Songs », le sien vivant certainement ses dernières heures comme il vient de le confier à certains d’entre nous avant le concert… Nous serons ainsi plusieurs à écouter cette musique en ressentant chez lui un surplus d’émotion transcendée par sa musique. C’est auprès de son papa qu’Eric a appris la musique, jouant tout jeune dans le dancing parisien familial.
Près de deux ans après sa création lors d’une résidence au Rocher de Palmer, le projet « Frères de Songs » vient juste d’être édité en CD, Vinyle (superbe) et sur les plateformes et ce soir c’est en quelque sorte le concert de sortie d’album. Le quintet d’origine est au complet avec Eric Séva (compositions, sax soprano et baryton), Michael Robinson (textes, voix), Julie Saury (batterie, percussions), Daniel Zimmermann (trombone, lui aussi classé parmi les trois meilleurs trombonistes de 2023 par Jazz Magazine, bien joué Jallobourde ! ) et Christophe Cravero (Rhodes, claviers).
Le titre « A Gogo » va lancer le groove de la soirée, la rythmique assurée par l’excellent Christophe Cravero et une Julie Saury particulièrement inspirée et heureuse de jouer y étant pour beaucoup. Quand à l’accord pas forcément naturel des sax soprano et baryton radicalement opposés avec le trombone avec parfois pour l’un et pour l’autre des effets en wah-wah, c’est une vraie trouvaille d’Eric Séva, donnant une couleur originale au son global du groupe. La voix haute au grain légèrement voilé de Michael Robinson (Golden Gate Quartet) elle ajoute cette note aérienne notamment dans les ballades comme la sublime « Canopée sous les Etoiles ». Une heure trente de pur bonheur musical par cinq musiciens exceptionnels capables de faire groover un bloc de marbre assurément.
Album « frères de Songs » : https://wp.me/pdxYN8-9Hk
Les deux concerts suivants du festival : https://wp.me/pdxYN8-9K7
Galerie photos de Philippe Marzat :
Concert :
Balances :