par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat.

Le Cuvier, Artigues-près-Bordeaux le jeudi 1er avril 2021

Pascal Faidy : flûte, sax alto, soprano, ténor et voix

Benoît Chéritel : machines, synthétiseur

Pascal Faidy n’arrête pas de monter des projets, quand la reprise sera là il sera plus que prêt. Il peut aller du old jazz au be bop, en passant par la magie et donc maintenant il s’attelle au trip hop électro jazz, puisqu’il faut bien coller une étiquette à cette musique.

Pour cela il travaille depuis deux ans avec l’initiateur du projet, le musicien ingénieur du son Benoît Chéritel, poitevin comme lui, même s’ils se sont connus au festival d’Avignon.

Avec cette musique, ils nous emmènent dans les profondeurs abyssales de l’océan, recrées musicalement par les machines, avec les nappes harmoniques, les vibrations d’infra basses, les gouttelettes électros, les réverbs organiques… Là dedans évolue Pascal Faidy, ajoutant la note et les notes d’humanité dans cet univers électronique, les mélodies, les chorus improvisés. Un peu de looper, un peu d’octaver et le plus souvent un son naturel. Benoît Chéritel joue lui avec les machines mais aussi joue des machines ; il utilise bien sûr des samples programmés, mais il les joue aussi en direct, les module sur son clavier ou avec une forêt de boutons. Les samples ne sont pas tous artificiels, certains viennent ainsi d’instruments réels à la base, comme ce gros son de basse qui vous enveloppe.

Certains vont pincer le nez dire que ce n’est pas du jazz, que c’est facile de faire jouer les machines à la place. Détrompez-vous. Quand on voit le travail que représente la programmation, la synchronisation des loops, les réglages de réverb… On se demande si ce n’est finalement pas plus compliqué que de jouer avec des instruments traditionnels.

Il est vrai que cette musique est plus souvent sensation qu’émotion, les vibrations des infra basses traversent le corps, les boîtes à rythmes créent une sorte d’obsession, c’est le sax qui nous ramène au réel, à la chaleur musicale, à la création en direct, à l’improvisation. La flûte aussi apporte du contraste, comme sur « Deep Seas » où surgit musicalement un sous-marin, monstre de technique glissant dans des nappes de bulles, planant dans l’eau des abysses comme une raie manta. L’effet est garanti.

Réminiscences de French Touch dans « Block Fish » titre évoquant ce poisson des profondeurs au visage humain et toujours ce sax qui module ses notes. Sax délaissé parfois pour vocaliser créant une ambiance quasi religieuse insolite, les machines continuant leurs pulsations obsédantes.

Musique différente, mais musique quand-même, peut-être un vecteur pour amener vers le jazz un autre public, plus jeune, par un chemin détourné. D’autres travaillent depuis longtemps dans cet esprit, comme Eric Truffaz, Julien Loureau et un certain Miles Davis avait ouvert des sentiers il y a déjà bien longtemps.

Merci au Cuvier d’Artigues-près-Bordeaux de cette mise à disposition du studio qui permet à des musiciens de travailler et de préparer cette reprise qui n’arrive jamais…

Concert en live streaming jeudi 8 avril à 21 heures : https://shotgun.live/events/292424/stream?fbclid=IwAR0HiT6bjhbCq5wdQDLT87IogtcTfbdI354jbCyZsB3FjW3G8yHIDwj3sPA