Visite et interview au Studio du Bassin
Par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat
Avec Alain Piarou et Erick Moreau.
Nous avons eu l’occasion de visiter le Studio du Bassin situé au Teich, une des villes ceinturant le Bassin d’Arcachon. Ce studio a été créé pour sa propre utilisation de compositeur de musiques de films, de dessins animés, de documentaires par Stéphane Peyrot. Stéphane est compositeur et pianiste ainsi l’endroit est-il envahi de claviers, notamment un Yamaha C6 de concert et un orgue Hammond B3.
Le lieu est chaleureux, haut de plafond avec une mezzanine. Le bois y est très présent, un poêle en fonte à pelets délivrant sa douce chaleur. Des canapés, de la déco, un coin cuisine, une terrasse donnant sur un jardin reposant niché au pied des pins ou parfois les biches, les lapins les oiseaux viennent faire un tour . Un endroit qui donne envie de s’y installer.
Nous avons été reçus par Stéphane Peyrot le créateur du lieu et Clément Belio.
Stéphane Peyrot : après une formation de pianiste, j’ai suivi des cours d’arrangements, d’harmonie, d’orchestration et je fais ce métier de compositeur depuis plus de 15 ans. Pour cela on s’enferme beaucoup, on souffre vite de la solitude. Je suis assez solitaire mais c’est devenu assez pesant. J’étais arrivé ici en 2015 pour faire construire cette maison et en revoyant Clément, devenu entre-temps musicien professionnel, je me suis dit que ce n’était pas possible de garder ce lieu rien que pour moi. Alors on a investi, monté une SARL, acheté plus de matériel pour professionnaliser l’activité studio. C’est comme ça que l’aventure est née il y a 3 ou 4 ans.
L’idée du studio c’est « n’y rentre pas qui veut » parce qu’on veut vous vendre ce lieu autrement, on vous fournit les espadrilles, vous êtes ici comme à la maison. On ne veut pas que ce soit un studio lambda. J’en ai fait beaucoup en France et j’ai souvent trouvé ça hyper austère, pas accueillant, où il faut aller vite parce que ça coûte cher. Ce sont des lieux ou en ressortant je n’ai pas eu l’impression d’y avoir passé du bon temps. Quand on est musicien, au-delà du projet artistique, on a aussi besoin de ce côté mémorial, il faut que le projet quand on lui donne naissance soit attribué à un lieu, à une couleur, à une émotion. Du coup j’ai voulu ouvrir ce lieu pour que les musiciens aient cette impression de bien-être, les pieds sur la table, on est bien, tout va bien se passer !
Ce n’est pas sans exigences techniques ; ça a été travaillé avec Philippe Lahaye le directeur technique d’Audio Pro qui m’a aidé sur l’acoustique, la technicité. Il y a eu un énorme travail . Le cablage a pris deux mois et demi avec trois de ses employés ; on a tout en analogique et en numérique. Le gros dilemme de ce studio c’était à la fois de réunir ce côté cool comme à la maison à l’exigence en termes techniques. Le pari est gagné. Valérie Chane-Tef est venue (avec Akoda) pour le piano car Bordeaux souffre pour les pianistes du manque d’un vrai lieu avec la hauteur. Un piano à queue il lui faut de l’air, l’instrument ne fait pas tout, s’il n’en a pas c’est comme si vous mettiez un moteur de Ferrari dans une deux deuches ! Le son c’est une vibration, s’il n’a pas d’espace pour résonner ça ne marche pas.
Au départ tous ceux qui sont venus ce sont les copains jazzeux de la région, j’ai un bon réseau je connais tout le monde.
Action Jazz : oui j’ai vu Latin Spirit entre autres
VP : ce sont les premiers qui soient venus, après il y a eu Akoda qui est resté un bon mois et demi, puis Jérôme Masco et son groupe.
AJ : deux anciens lauréats du tremplin Action Jazz ! Vous pratiquez toutes les esthétiques musicales ?
VP : oui, mais comme on est une entreprise un peu familiale, on a du mal à se faire connaître. Je fais un peu de variété, on vient d’enregistrer la musique d’un jeu vidéo pour une sortie mondiale par un gros éditeur américain. Prochainement j’ai un rappeur qui vient enregistrer, il a de très beaux textes. Mais pour le moment, ceux qui sont venus c’est pour le lieu avec le piano et le jazz est ainsi très vite arrivé, ce qui n’est pas pour me déplaire.
AJ : et Clément là-dedans ?
VP : il est ingénieur du son en plus d’être musicien (guitariste, batteur) avec déjà 2 albums à son actif.
Clément Belio : 5 ! (rires)
VP : je compte ceux que je préfère ! Un jazz avec beaucoup beaucoup d’influences (il écarte les bras au maximum). Il est aussi vidéaste, tant de talent dans ce corps c’est énervant ! Ce studio c’est aussi une aventure humaine. L’idée générale c’est « un lieu créé par des musiciens pour des musiciens ». On n’est pas des techniciens purs, on connaît toutes leurs exigences et on ne rogne pas sur les qualités techniques. Ils le sentent de suite
AJ : oui l’endroit est chaleureux, on le sent de suite en entrant.
CB : en plus nous ne sommes pas limités à un rôle technique, on peut faire des arrangements, des orchestrations, on peut jouer nous-même.
VP : on parlait de Valérie avec Akoda qui mène son projet avec une grande précision et en parfaite autonomie mais ce qui est hyper agréable ici c’est quand les musiciens viennent et sachant qu’ils ont affaire à des musiciens viennent, comme elle, demander notre avis, des conseils, parfois manquant trop de recul, pris par leur projet. On parle le même langage qu’eux.
CB : on reçoit bientôt le quartet d’Eddie Dhaini
AJ : un autre lauréat du Tremplin Action Jazz, en 2023.
VP : on a un super projet pour 2024 celui de créer un label. On ne connait pas le nom mais on voudrait faire ça dans les six mois. Je travaille déjà avec Crystal Records
AJ : quels sont les films dont tu as composé la musique ?
VP : le dernier en 2022 c’est le dessin animé « Les secrets de mon père », sur la Shoah, un très joli film, lourd mais plein d’humour aussi. J’ai fait deux autres films mais je travaille surtout pour les documentaires, notamment pour France TV et Arte.
La visite se poursuit et une collaboration avec Action Jazz commence à prendre forme. On vous en dira plus bientôt.
https://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_liste_generique/C_71083_F