par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat.
Le Rocher de Palmer, vendredi 7 mai 2021.
La lueur du bout du tunnel semble se former, et avec la sortie de long hiver musical. Theorem of Joy nous raconte à sa façon cette période dans leur dernier album « L’Hiver » justement. A l’origine cet hiver était à prendre dans le sens de la période du besoin d’introspection, de repli intérieur qui permet de créer, de continuer à grandir ; les évènements ont rajouté à cette quête… Le disque sort le 21 mai prochain et bientôt une chronique le concernant paraîtra dans la Gazette Bleue.
Aujourd’hui c’est pour un concert en « live streaming » que nous sommes là ; vivement que disparaisse le second mot de cet anglicisme !
La fosse de la salle 1200 du Rocher de Palmer fait peine à voir, personne, sinon les techniciens image et son qui s’affairent pour la captation qui sera diffusée deux heures après. Très peu de live streamings sont en effet en vrai direct sur les écrans, pour prévenir tout problème technique. Ici il n’y en aura pas.
Ils sont cinq sur scène Thomas Julienne (contrebasse, compositions), Ellinoa (voix), Héloïse Lefevre (violon), Tom Peyron (batterie) et Antonin Fresson (guitare). C’est le premier concert avec le groupe d’Héloïse que nous connaissions déjà avec Sun Dew.
L’univers de Theorem of Joy est toujours présent, sans frontières musicales, avec des compositions souvent aériennes et profondes ainsi que des textes, en Français et en Anglais, poétiques, oniriques, jamais rien de prévisible, de routinier, de la vraie création.
Harmonies et mélodie féminines sur une rythmique marquée, masculine dans « Atoll». Ellinoa chante et vocalise en liberté. Le ton est donné. Puis « Dust » et ses jeux d’échos de la voix se mêlant au violon, de la guitare installant une dimension planante.
Rythmique de tango pour débuter « De l’autre côté du silence » évoquant l’exil ; mais voilà que la musique s’orientalise, le violon se fait lyrique. Une très belle suite longuement développée. Un petit film sera bientôt réalisé pour ce titre. Voilà « Little Cloud » débuté par le chant délicat d’Ellinoa, la batterie se faisant légère, la contrebasse de Thomas Julienne, au son toujours aussi boisé, jamais métallique, ajoutant sa profondeur. Mais comme dans beaucoup des titres du groupe rien n’est jamais installé, les climats évoluent, changent. L’intensité va crescendo, le violon entraîne tout le monde derrière lui, puis la quiétude revient, apaisante, planante.
Tom Peyron débute le titre suivant « Tomorrow Riots » sur un solo de batterie, nerveux, surprenant après ce doux moment, la voix d’Ellinoa vocalise , rappelant les fugues de Bach jusqu’à l’éclatement. Antonin se lance alors dans un chorus de guitare saturée, la tension monte, le trio batterie, guitare, contrebasse part en liberté dans une énergie, voire une violence, folle. Sur ce titre je pense très vite au Mahavishnu Orchestra, à ces musiques dites progressives des débuts 70’s. C’est magnifique.
« Convergence » termine le concert avec les étonnantes vocalises d’Ellinoa. Un seul titre de l’album ne sera pas joué, curieusement celui qui donne son nom à l’album, « L’hiver »
Un travail très léché des musiciens très concentrés, qui sur l’album se retrouvent avec pas mal d’invités, pas présents aujourd’hui. Echangeant quelques mots à la fin du concert avec Thomas Julienne, je le trouve vidé, sa propre musique est exigeante, pas le genre à choisir la facilité, un artiste.
Le groupe sera en concert à Paris au Studio de l’Ermitage le 17 juin, toujours avec Cyrille Gachet au son, il sait faire et bien. Auparavant le collectif Déluge auquel appartient Theorem of Joy proposera deux concerts du Orchid Big Band, le 11 juin à la Pergola de Bordeaux-Caudéran et le 12 juin au Rocher de Palmer. Ce seront de vrais concerts avec de vrais gens, ça nous semble tellement incroyable encore !
Collectif Déluge : https://www.collectifdeluge.org/
L’album fait toujours l’objet d’un crowdfunding au lien suivant :
