Richard Bona Group
Jazz à Pau, le 15 Novembre 2024
par Vincent Lajus, texte et photos
De Richard Bona, on connaît ses origines camerounaises, sa virtuosité bassistique, son chant envoûtant, ses compositions et chansons multi-influencées. On connaît aussi ses collaborations avec des musiciens majeurs de notre temps, comme Pat Metheny, Joe Zawinul, Stevie Wonder, le regretté Quincy Jones bien sûr, Chucho Valdés, Chick Corea, Sting, Herbie Hancock, etc… Vous situez le bonhomme ? « Ben quoi ? J’ai joué avec tout le monde ! » ajoute-t-il avec un grand sourire.
Richard Bona est aussi un enfant surdoué musicalement, digne héritier des griots africains, détenteurs d’un savoir et pères de la transmission orale, par la musique, le chant, le conte. Il apprend d’ailleurs le balafon traditionnel dès ses quatre ans, puis après avoir entendu Jaco Pastorius, la basse électrique devient son instrument privilégié.
Le chant et la composition sont également à mettre en exergue chez Richard Bona, tant par la souplesse timbrale et la tessiture étonnante concernant le premier, que par l’héritage musical assumé et recherché depuis des années par le maître du jour ; un peu comme si semble-t-il le musicien retraçait les chemins qui du continent originel, le conduisirent après des séjours en Allemagne et en France (deux des anciens colonisateurs de son pays natal) jusqu’aux USA où il réside maintenant, ayant obtenu la nationalité américaine, en s’arrêtant un moment au passage dans son dernier album solo (Heritage 2016) sur les rythmes de Cuba adaptés et chantés en langue africaine (Duala, « ancien » précise-t-il). Un parcours géographique qui n’est pas sans rappeler l’historique tragique du peuple noir enchaîné, sauf qu’il est ici transcendé et tourné vers la lumière.
Une autre particularité du griot est d’avoir les pieds dans les deux mondes, celui des hommes et celui des esprits. il l’explique lui-même : « Lorsque je chante en réalité, ce n’est pas moi qui chante. J’exécute juste un ordre chamanique de transmission des sagesses ancestrales. »
Ce que l’on sait peut-être moins au sujet de Richard Bona, c’est qu’il est vraiment très drôle ! Tout au long du concert, le truculent musicien nous a conté des anecdotes de tournées, gratifiés de petits chambrages régionaux qui n’ont pas épargné non plus ses propres musiciens – « Nico (Viccaro) il est monégasque et il est musicien ! Moi si j’étais monégasque, je serais banquier ! », d’improvisations verbales de bon aloi, non pour charmer le public, mais simplement parce qu’il est comme cela, positif et spirituel.
C’est donc dans le cadre de la saison Jazz à Pau 2024/25 que Stéphane Kochoyan, le directeur artistique et talentueux pianiste, « Steph, moi je l’appelle Steph » (R.Bona) nous a gâtés avant les Fêtes en nous offrant ce concert du Richard Bona Group. Ce double concert devrais-je dire, car les dates à Pau sont systématiquement doublées tant la demande est forte pour assister aux concerts de la saison. Et la salle est comble à chaque fois ! 580 places x 2 : faites le calcul. Qu’on se le dise pour les organisateurs du coin ou d’ailleurs qui craignent encore que le jazz ne fasse pas recette !
Le concert ? Une prestation majeure et de très haut niveau, couronnée par une standing ovation dans les dernières minutes, le public adhérant sans retenue aux dernières notes du Band avant les deux rappels accordés toujours avec un large sourire par le maître du soir. On en redemande !
Richard Bona Group :
Richard Bona : Chant, Basse électrique, Boîte loop, Claviers, blagues, etc…
Michael Lecoq : Claviers
Ciro Manna : Guitare
Nicolas Viccaro : Batterie
Alexandre Hérichon : Trompette
Stéphane Kochoyan, directeur artistique de Jazz à Pau.
Cohésion, énergie et partage pour un spectacle abouti. Un grand moment musical.
Virtuose de la basse électrique et chanteur hors pair, Richard Bona nous a envoûté tout au long d’un concert exceptionnel. On a pu deviner les références au génial Jaco Pastorius, à travers des mélodies comme « A Remark You Made » et « Teen Town ».
Un mouvement créatif et positif. La joie musicale incarnée.
L’impressionnant Nicolas Viccaro qui a un peu surpris son monde en démarrant « TeenTown » à une vitesse folle !
Ciro Manna, un guitariste inspiré, fin, technique et toujours à l’écoute de ses camarades.
Accompagner, c’est s’intéresser avec empathie.
Michael Lecoq était aux claviers ce soir. Son long chorus remarqué n’a fait que souligner une prestation sans faille dans le soutien au Band.
Alexandre Hérichon nous a gratifié de chorus virtuoses, distillant les suraigus comme d’autres enfilent des perles. Richard Bona, toujours attentif à soutenir et développer les prestations de ses camarades. Accompagner, c’est transmettre. Il a donc accepté d’être l’invité d’une Master Class au conservatoire de Pau entre les deux concerts béarnais.
Standing ovation pendant et après le dernier titre, une reprise de « Trains » de Steps Ahead.
Premier rappel avec un merveilleux duo piano-chant sur l’émouvant boléro « Alfonsina y el Mar ».
« Allez Pau, il faut aller faire dodo »