Fred Pallem et Le Sacre du Tympan présentent François de Roubaix

par Sylvie Delanne, photos Jean-Michel Meyre

Le Rocher de Palmer – 21 mars 2023

Enfin ! Devant un public impatient, le concert tant attendu depuis 3 années déjà, reporté 2 fois en raison de la crise sanitaire en France, arrive ce soir au Rocher de Palmer !

La grande scène est prête et les musiciens du Sacre du Tympan se mettent en place dans un nuage de fumée :

en fond côté jardin les 4 pupitres des cuivres et vents, Rémi SCIUTO, à la flûte traversière, l’ocarina, le piccolo, la clarinette, les saxophones / Christine ROCH, aux sax et percussions légères / Sylvain BARDIAU, à la trompette /Daniel ZIMMERMANN,au trombone

en fond côté cour, protégées du gros son de la batterie par un paravent transparent, les violonistes, Aurélie BRANGER, Anne LE PAPE, l’altiste Severine MORFIN, la violoncelliste Solène CHEVALIER,

au lointain milieu, le Tiger Tigre, infatigable batteur,Vincent TAEGER

devant à gauche, le multi claviériste, Sébastien PALIS

devant à droite, le guitariste, Guillaume MAGNE

et…au beau milieu , tel Zeus sur l’Olympe, le boss créateur en 1998 du brillant et évolutif big-band  du SACRE DU TYMPAN, l’immense Fred PALLEM.

Tout est prêt pour l’hommage de cette formation mythique au regretté François de Roubaix (1939-1975), ce prolifique et excentrique compositeur des musiques de films qui ont enchanté la jeunesse des sexygénaires nombreux dans la salle (mais pas que !) .

Pour rappel, François de Roubaix dans sa trop courte vie, a, par ses sons novateurs, immortalisé les films de Jose Giovanni, Robert Enrico, Jean-Pierre Melville, Yves Boisset, Jean-Pierre Mocky, Serge Korber et autres séries télévisées qui résonnent encore dans nos têtes et que nous sifflons à l’occasion.

Fred Pallem, passionné des compositeurs de musiques de cinéma (retrouver sa riche interview de Vladimir Cosma dans le Jazz Magazine de février 2023) ne pouvait dérouler son intense carrière de musicien arrangeur sans s’arrêter sur celui qui enchanta sa jeunesse et l’envoya en musique.

En 2015, 40 ans après la mort accidentelle dans les eaux bleues des Canaries du pionnier français de l’électro, un hommage soutenu ce soir permettra à beaucoup , parmi le public présent, de découvrir ou redécouvrir ces thèmes foisonnant d’intelligence et d’innovations musicales.

Se succéderont les musiques des films, « Les Aventuriers », « Dernier Domicile Connu », ambiance noire reprise par tout l’orchestre, parfois planante, parfois ultra-rapide.

« l’Homme-Orchestre » avec un démarrage de feu du Tiger-Tigre, ponctué par l’ocarina et un trombone à son paroxysme.

« La Frite Équatoriale » qui nous transporte dans des ambiances amazoniennes avec un beau démarrage au piccolo et à l’ocarina, le clavier de Sébastien Palis nous envoie à l’extase, c’est l’éclate !!

« Le Samouraï » d’un minimalisme très en avance sur son temps avec un organiste remarquable .

Tiré du film « Les Aventuriers », un aquatique et prémonitoire «Enterrement Sous-Marin ».

« La Mer est Grande » un bijou d’électro, écrit pour une série du Commandant Cousteau avec au passage une petite égratignure de Fred Pallem au national Commandant.

Sons électroniques, sons acoustiques, sons énergiques, « Comment ça va? je m’en fous ! » thème de l’Atelier, rythme tutti de folie, fabuleux Sébastien Palis, du très beau son à la guitare, une ambiance aquatique… le synthé nous envoie dans des profondeurs abyssales…

Une compo de Fred Pallem vient compléter cet hommage aux marins et à la mer, « Les Scélérates » nous parle des fameuses vagues meurtrières, au début les cordes donnent un rythme ondulant, la guitare sonne, les claviers entrent puis la tempête, sur un gros son de basse électrique et un déchaînement des cuivres – calme la flûte mélodie – puis reprise d’un rythme binaire entraîné par la batterie, le sax, les cuivres – de nouveau la flûte soutenu par le trombone et quand on croit enfin que la mer se calme, les cordes, sirènes enchanteresses dans un chant délicat viennent chercher les pauvres marins égarés dans les flots. Mais la colère de Neptune revient pour annoncer la fin de la vague assassine, sax tenor sur une rythmique assourdie, lancinante jusqu’au paroxysme, puis encore le tonnerre de dieu, sauvage solo de batterie d’où enfin, se détache le chant d’une baleine (guitare et clavier).

Une composition longue et paroxystique, tous les instruments en feu au service de la vague, un batteur qui n’a pas lâché la pression pendant presque 20’. J’étais proche de la transe !

« Le Statagème 34 » autre composition de Fred Pallem, dans la droite ligne des mélodies de son mentor, envoûtantes, cordes lentes et tempo de feu, parfois une ambiance western et un batteur personnage à part entière.

J’évite, autant que faire se peut, les superlatifs en cascade mais… face à la brillance de tous ces musiciens, de leur capacité collective à nous faire voyager des rythmes pop-rock à ceux du jazz ou la variété mélo, face au rayonnement éclectique de leur génial chef compositeur, arrangeur, habité par le son, la musique, les mélodies endiablées et les tempo de feu… je cherche les bons mots pour traduire et toucher.

Ce concert nous a transmis énergie et joie de vivre, comme quand, dans les seventies, des sons nouveaux, électriques et pop, venaient réveiller les corps et bousculer les vieux poncifs musicaux. Une nouvelle ère s’ouvrait, merci Fred Pallem d’avoir la passion de nous le rappeler.

Je ne peux refermer ce chapitre sans rendre un hommage appuyé à la régie technique, les excellents Philippe Gauci et Philippe Iratcabal au son et Etienne Maisonrouge assisté de Virginie Violleau qui ont habillé la scène de couleurs aussi énergiques qu’électriques.

Du bonheur ! Merci à ces créateurs de dimensions stratosphériques qui d’un concert font un spectacle.

 

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