Par Philippe Desmond.

27 janvier 2020

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« Bechet au féminin » ? Pourquoi ? C’est Mary Estrade qui tient son rôle à la clarinette et au soprano. Elle chante aussi et a réalisé les arrangements de l’album. Avec elle pour former cette Cie du Souffle aux Cordes par contre trois messieurs, Jérôme Gast (contrebasse), Marc Estrade (guitare, banjo), Philippe Pouchard (guitare). Féminin, masculin, au fond quelle importance, sinon peut-être dans cette sensibilité ressentie comme dans « Si tu vois ma mère » ou évidemment « Petite fleur ».

Mais au fait pourquoi jouer encore Sidney Bechet en 2020 ? Ne joue t-on pas toujours Mozart ou Bach ! Et oui, Bechet fait partie des grands classiques du jazz et plaît encore à un nombreux public éloigné du jazz dit moderne et qui un jour cessera de l’être lui aussi. Chez moi enfant si quelqu’un prononçait le mot jazz, le nom de Sidney Bechet arrivait de suite. C’était le seul disque de jazz de mes parents. Bechet était une énorme vedette en France, même au cinéma, dans les années 50 après une déjà riche et tumultueuse carrière américaine, Sidney était devenu l’archétype, à tort ou à raison, du jazzman néo-orléanais. Un succès immense. Mais avant tout c’était un remarquable musicien et compositeur.

Mary Estrade a aussi son histoire personnelle avec Bechet, son premier morceau de jazz joué « Petite fleur », devenu son surnom enfant. Avec ce CD de 11 titres, elle balaye avec brio sa carrière, « Georgia Cabin » des 30’s,  le très délicat et ondulant « Egyptian Fantasy » (repris même par les très à la mode Peirani/Parisien) et bien sûr tous les tubes « Le marchand de poissons », « Promenade aux Champs-Elysées », « Roses de Picardie »… Epoque bénie des tubes – on n’employait pas encore le terme – en jazz !

Tout cela est magnifiquement interprété par une Mary Estrade très lyrique ou sensible, servie sur un plateau par une rythmique plus qu’efficace, qui parfois nous embarque dans une pompe manouche énergique. Les bois laissent la place aussi à la guitare pour quelques chorus et cette revisite des standards est vraiment très réussie.

Petit clin d’œil en marge de Sidney, l’amusant « Y’a des Zazous «  datant de 1944 et chanté par Mary.

Mary et avec elle ses comparses se sont visiblement fait plaisir, celui-ci est partagé. Le disque est une chose mais pensez aussi à cette formation légère, acoustique, très facile à mobiliser, pour des soirées forcément réussies.

Production et contact : https://www.bluemary-swing.com/