Texte et photos Philippe Desmond
L’Atrium, Dax le jeudi 24 octobre 2019.
Il y a un peu plus d’un an, en plein été, un grand musicien quittait la scène, sans rappel possible et à seulement 60 ans. Un pianiste, un compositeur, un professeur, un vrai jazzman et aussi une personne unanimement appréciée pour ses qualités humaines, Didier Datcharry. Grand pianiste, excellent compositeur et professeur passionné, capable de transmettre cette passion aux autres comme à ces jeunes qui après ses cours du samedi matin et s’étant porté leur casse croûte jouaient ensemble tout l’après-midi au conservatoire de Dax où il dirigeait la classe de jazz.
La ville de Dax, le conservatoire local, ses amis musiciens ou pas, lui devaient bien cet hommage public à l’Atrium, ce magnifique ensemble art déco au décor classé. Organisée en ouverture du festival « Festi Claviers » la soirée affichait complet depuis longtemps.
Et c’est sous son magnifique portrait – que vous allez voir souvent et dont personne n’a su me dire l’auteur – que Didier a été célébré de magnifique et émouvante façon, Vincent Caup le directeur du conservatoire animant la soirée.
Les élèves et professeur du conservatoire de Dax et leur big band avec à sa tête Pascal Ségala qui a la lourde tâche de lui succéder, mais aussi ses deux filles Sarah et Marie, pianistes professionnelles elles-aussi, et même son beau frère, chanteur et pianiste – quelle famille ! – ont ainsi lancé la soirée.
Le jazz est vite arrivé avec les vieux compères dacquois de Acqs Swing pour « Tangerine » puis avec le fidèle ami Jacky Berecoechea et un des joyaux dont Didier a été le formateur, le magnifique pianiste Paul Lay (prononcer l’ail, on est dans le sud ouest !) internationalement reconnu et pour cause. Découvert et initié au jazz vers l’âge de 9 ou 10 ans par Didier à Orthez où il enseignait, il tenait à être présent pour honorer celui qui lui avait donné la vocation.
Le duo nous alors proposé une composition de Jacky et Didier qui la jouaient ensemble dès 1994 « Balade aux Remparts », ceux de Bayonne je suppose, une jolie ballade avec deux « l ». Puis Paul Lay, seul au piano nous a trituré dans tous les sens mais mélodieusement et comme il sait si bien le faire, des standards, osant des accords surprenants et des fulgurances imprévues.
Rejoint ensuite par Marie Hélène Gastinel et Jean-Xavier Herman, les fidèles du trio de Didier, c’est un très beau « On a Green Dolphin Street » qui lui a été dédié, sous son regard tellement bienveillant.
C’est ensuite un autre cher ami qui a pris la place au piano, Arnaud Labastie, le trio nous proposant trois compositions de Didier nommées « Sarah », « Marie » et « Lydie », ses deux filles et son épouse. Finesse, swing, trois perles offertes aux femmes de sa vie. « The Battle Hymn of the Republic » pour finir, vous savez le fameux glory glory alleluia si cher aux Américains. Magnifique.
Didier avait joué avec le Tuxedo Big band rencontrant un immense succès avec l’album « Here Comes The Band » un de ses représentants est là, immense batteur, Guillaume Nouaux,
rejoint par le mur de trombones du « Swing Bones » : Charles Caup (en remplacement de Jérome Capdepont), Baptiste Techer, Jérome laborde et Olivier Lachurie, de g à d. Un ensemble superbe de swing et de sonorités puissantes et rondes. Un régal.
Et oui nous vivons, sous le portrait de celui à qui on rend hommage, un véritable festival. Et ce n’est pas fini. Voilà les héritiers d’une formation créée il y a une quarantaine d’années par Michel « Belisse » Bonnefond, « les Alligators » un big band dans lequel Didier, bien sûr, a joué. C’est la formation désormais dirigée par Pascal Drapeau, le Big Band Côte Sud dont certains étaient de la fête voilà 40 ans, ils en avaient 20…
Parmi eux quelques jeunes et anciens élèves de Didier, la boucle est bouclée. Du swing bien sûr mais aussi du latino avec l’arrivée sur scène du chanteur Alfredo Garcia. L’hommage se transforme en fête ce qui n’aurait pas déplu à celui qu’on célèbre. La fête redouble quand tous les musiciens se rejoignent sur scène pour le final avec un « Every Day I Have The Blues » tonitruant ! La tête de Paul Lay quand les deux big bands réunis ont envoyé la sauce !
A la fin du concert une bonne partie de l’assistance s’est retrouvée à la brasserie de l’Atrium où les nombreux élèves du conservatoire, dans la salle et sur la galerie ont continué l’hommage avant le bœuf final, tous les autres musiciens étant eux attablés.
J’aimerais croire ce que certains nous disent depuis des millénaires, que depuis « là-haut » on voit tout ; que Didier ait ainsi pu apprécier de voir ses amis rassemblés pour lui offrir cet hommage exceptionnel et mérité…
lien vers l’album photos : https://photos.app.goo.gl/Yn9HC8VAFc6Pd2iv9