par Bernard Labat des « Cats se rebiffent » pour Action Jazz. Photos Christine Sardaine
ANGLET JAZZ FESTIVAL samedi 19 septembre 2020.
Une soirée placée sous le signe de l’hommage nous attendait au théâtre Quintaou pour cette troisième et dernière séance en salle. Deux hommages à deux des plus grands compositeurs et interprètes des trente dernières années, Michel Petrucciani et Michael Brecker pour ne pas les nommer. Tous les deux trop tôt disparus, 36 ans pour le premier, 57 ans pour le second, nous manquent depuis toutes ces années. Quel amateur ou amatrice de jazz n’a pas croisé sur sa platine vinyle ou lecteur CD leurs notes inoubliables et pour quelques uns (unes) sûrement sur scène.
Prenons les choses dans l’ordre, 20h30 le public finit de s’installer, respectant à la lettre les consignes de distanciation et port du masque très bien gérés par l’équipe qui sait rappeler mais aussi rester discrète. Une fois les remerciements d’usage, mais encore plus mérités cette année, rappelons que la mairie d’ Anglet a pris la courageuse décision de maintenir le festival et que l’association Arcad a eu elle aussi le courage de l’organiser.
Laurent Coulondre se dirige vers ses deux claviers en compagnie de Jérémy Bruyère à la contrebasse et Dédé Ceccarelli à la batterie, lui aussi d’ailleurs icône de la batterie depuis de nombreuses années. Arrêtons nous quelques instants sur Laurent citons quatre, parmi tant d’autres distinctions qu’il a reçu : 2016 révélation de l’année aux Victoires du Jazz, 2020 Musicien de l’année pour la revue Jazz Magazine et prix du disque français par l’Académie du Jazz sans oublier une nomination aux Victoires du Jazz 2020 catégorie « artiste instrumental ». Bon voilà, les choses sont posées et méritent toute notre attention, d’autant plus le bonhomme ne cesse de surprendre avec ses albums. Le concert débute et de prime abord notre jeune pianiste sait pratiquement tout faire, des attaques biens senties, un phrasé fluide et clair, Toute la rigueur de l’exposition des thèmes n’empêche pas les envolées mélodiques. Ce qui frappe (si je peux m’exprimer ainsi) encore plus, c’est sa maîtrise du rythme, sans esbroufe, tout en vigueur et en souplesse.
Nous avons pu le constater aux « balances » et Marc Tambourindéguy l’a rappelé en introduction «Laurent est très sympas » . Nous le vérifions pendant tout le concert. Certains grands classiques de Michel défilent à nos oreilles sous les doigts de Laurent avec la complicité talentueuse de Jérémy et Dédé qui se joignent à la fête avec gourmandise et talent. Dans l’après-midi Dédé lance même « que ça fait du bien de jouer avec vous les gars ». Personnellement je rajouterai que ça fait du bien de vous entendre les gars.
Revenons aux répertoire avec entre autres, Colors, Looking Up. Bite, Brazilian Like…… Une mention spéciale pour Les Grelots enregistré en 1994 par Michel et Eddy Louis. Ils étaient deux, Laurent endosse seul avec maîtrise et maestria les deux rôles. Le public est survolté. Laurent nous propose deux compos imprégnées du grand M Petrucciani, Laura (clin d’œil à sa compagne) et Choriniño.
Un hommage à Michel Petrucciani est en soi un pari osé pour un pianiste. Le rêver et le penser est une chose, le réaliser avec talent et humilité en est une autre. Cette fois les ingrédients sont là et le résultat est plus qu’à la hauteur…….bravo messieurs.
La barre est haute pour cette première partie, mais de « sacrés clients » pointent leur musique pour la suite. André Charlier à la batterie et Benoit Sourisse à l’orgue hammond deux des meilleurs représentants dans leurs domaines. Amis de longue date, chaque regard, chaque idée se partagent avec malice et fraîcheur.
Louis Winsberg, que l’on ne présente plus, guitariste de son état se joint à eux. Ils ont mûri leur hommage à Michael Brecker dans l’humilité et le respect. Ça été dit maintes fois, mais je ne vois pas pourquoi je ne le rajouterais pas, un projet d’hommage à un saxophoniste sans saxophoniste voilà qui est original . C’est original mais ça fonctionne et je dirais même plus c’est une évidence.
Nos trois compères nous proposent des arrangements et des réécritures ciselées au cordeau des compositions de Michael et de son acolyte Don Grolnick, Minsk, Take Into Myself, , Never Alone, Peep, The Cost of Living. La période Brecker Brothers s’illustre avec Straphangin. La mythique formation Steps Ahead n’est pas oubliée avec Oops.
Les regards, la complicité et les sourires de ses trois artistes attestent du plaisir qu’ils partagent sur ce répertoire. Michael Brecker a accompagné leur vie de jazzmen. De notre côté le trio entretient la flamme et nous donne envie de nous replonger dans l’œuvre de ce grand saxophoniste et là aussi ça participe au succès de l’entreprise.
Encore une belle soirée pour ce festival