Texte et photos Philippe Desmond

Monségur, dimanche 14 juin 2020

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Déjà la mi-juin. Enfin la mi-juin, après 3 mois hors du temps, hors du monde. Le soleil a réussi à se frayer un chemin dans cette fin de printemps. Une petite ville au bout de l’Entre deux Mers s’apprête à vivre un événement qui il y a encore pas si longtemps et pourtant une éternité, aurait été finalement assez banal, se produisant chaque second dimanche du mois : la jam du Monseg’ ce bar sous les arcades de la place de Monségur, face à la superbe halle XIXe.

Le soir, un discours réputé important va révéler un assouplissement des mesures sanitaires mais on ne le sais pas encore, les circonstances vont faire qu’une anticipation de la limitation de ces restrictions va se produire.

François Mary (basse) et Loïc Demeersseman (sax tenor) ont pris l’initiative, ou le risque, d’organiser l’événement. Ils se sont entourés de Denis Bielsa (batterie) et Xavier Fernandez-Castro (guitare) pour former le quartet de départ que Jérôme Dubois au bugle va instantanément transformer en quintet.

Déjà quel plaisir en arrivant de les revoir, en vrai et non pas par écran interposé. Bien que sortant d’une période où leur activité a été sinistrée et sans grande perspective à court terme ils gardent cette sympathie et cette force qu’on leur connaît. Près de 20 dates perdues pour l’un et peut-être deux engagements en juillet, les classes de jazz du collège local Eléonore de Provence qui n’ont pas repris un l’autre, la lassitude des cours en visio, les incertitudes quant à l’année blanche accordée aux intermittents et son efficacité selon la date anniversaire, autant de choses qui pourraient les décourager mais l’appel de la musique vivante et des instruments est le plus fort.

Une jam on le sait n’est en général pas l’occasion d’une grande innovation musicale d’autant qu’ici son lancement n’a pas été répété comme ça peut être le cas parfois. Alors ils vont jouer classique, des standards « Softly as in a Morning Sunrise » pour commencer et ce qui en d’autres temps auraient pu provoquer un encore ce truc devient tout à coup une friandise faisant remonter des moments de plaisir. Le son des instruments, le vrai, pas compressé, dénaturé, filtré. Il est là qui vous pénètre, vous traverse les tympans et la carcasse, c’en est presque émouvant, 3 mois et tout à coup les sensations qui reviennent. Que vous nous avez manqués ! « Cherokee », encore un immense standard, « All Blues » de la bossa-samba, « Night in Tunisia », le bar se remplit la distanciation se fait moins stricte , les solutions hydroalcooliques sont servies au verre avec une couleur plus ambrée (il y a de la vraie solution à disposition à l’entrée du bar) la vie normale reviendrait presque.

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La jam commence voilà Olivier au sax ténor. Excellent saxophoniste amateur et oui et c’est rassurant pour nous, il est médecin infectiologue à Libourne, on ne craint donc rien. Merci à lui et à tous ses collègues de partout, vous méritez notre admiration.

Voilà Rémi Dugué à la guitare, Claire Jamet au piano elle l’instit qui n’a pas chômé pendant cette période et qui assure sa classe en semaine. D’autres vont se mêler au groupe avec les « Cantaloupe Island » et « Watermelon Man » d’Herbie, inusables.

Mais c’est Stevie qui va finir par enflammer les arcades, les danseuses et danseurs évacuant trois mois de frustration ; Mathieu Grenier lance « Superstition » avec une section de cuivre de feu et une rythmique de malade.

Franck Marissal va lui prendre les habits de Carlos pour continuer la danse avec « Oye Como Va », mais voilà que Rix arrive pour prendre le morceau en route et enchaîner sur « Stand by Me » . Du jazz, de la soul, du latino, du rock on ne sait plus et on s’en moque, de la musique en live, des amis retrouvés enfin.

Merci les amis d’avoir ainsi relancé la machine, en espérant qu’elle tourne bientôt à plein régime

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Je pars sur les premières notes de « Kiss » me semple t-il lancé par Rix, la route du retour vers Bordeaux à moto sera gaie, pleine de soleil, dans les yeux.

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Pendant ce temps un discours se déroule à la télé où rien concernant le spectacle vivant ne sera évoqué, douche froide.

Carte AJ