Angélique Kidjo à Marciac

par Annie Robert, photos Laurent Sabathé

Chapiteau de Marciac, 25 juillet 2024.
Angélique Kidjo est plus qu’un phénomène, c’est un modèle. Pas seulement pour les femmes africaines, mais pour les femmes en général.

Née au Bénin, à une époque où aller à l’école pour une fille est déjà un acte de résistance, elle a connu une enfance active et rempli de culture, les heures sombres de la Révolution, la fuite, l’exil à Paris, les petits boulots et la galère avant de se faire une place dans la world music, les scènes gigantesques, les récompenses à gogo, les collaborations avec des Orchestres Symphoniques prestigieux, Philipp Glass ou Alicia Keys.
Si elle est à l’heure actuelle une des figures majeures de la musique africaine, elle la transcende habilement depuis longtemps.
Elle navigue ainsi avec bonheur entre trois continents, plusieurs langues et des aventures musicales qui élargissent la musique africaine jusqu’à la pop, le jazz ou l’opéra contemporain. Son tempérament de feu et son sens de l’engagement ont fait d’elle un des symboles d’une culture mutante, aussi mouvante qu’enracinée. Elle a côtoyé les Obama, Desmond Tutu, Aretha Franklin, Bono, Clooney, Bill Gates, Santana.ou même Donald Trump ( qui en a perdu sa mèche) et j’en passe.
Et pourtant son franc-parler brise toujours les conventions guindées. Elle aime raconter, se raconter, conter, son pays d’origine, ses soubresauts, ses doutes. Et on ne la lui fait pas à l’envers….attention, elle a vécu les injustices dans un monde d’hommes et se bat avec ferveur, sa voix comme porte drapeau, son chant comme étendard.
Une personnalité rare, attachante et incontournable. Un voix d’une ampleur et d’un force exceptionnelles,entre imprécation, rire et mélodie.
Elle fête cette année ces 40 ans de carrière, et partage avec Marciac ce soir le bonheur d’être au monde au sens large du terme.
Petite boule d’énergie, vêtue de jaune soleil et de fleurs éclatantes, elle prend la grande scène à bras le corps et ne la lâchera plus. Autour d’elle un combo de musiciens hyper talentueux :Thierry Vaton (piano) Rody Cereyon (basse) Gregory Louis (batterie) David Donatien (percussions) aussi à l’aise dans un rythme endiablé, que dans des impros soutenues avec, lesquels elle plaisante, se «dispute» vocalement, interagit sans arrêt. Ils seront les chœurs, les relances, les clins d’oeil…
Ils s’amusent autant qu’elle.

Elle égrenne tous ses succès : Agolo, We We, Adouma, Wombo Lombo, Afrika ,Batonga. Elle reprend également deux chansons tendres de Célia Cruz, une chanteuse cubaine de salsa qui fut son inspiratrice, interpelle la salle, fait reprendre en chœur des morceaux et des appels.

Au bout de deux chansons, le chapiteau frappe dans ses mains « We are Africa » et des danseurs s’installent déjà dans les allées. Au bout de vingt minutes, tout le monde est debout.
On est dans du plaisir heureux, efficace et direct. La danse a fait sa place dans les têtes de chacun et que l’on soit jeune ou vieux, on se sent bondissant , tout neuf et remplis de l’énergie qu’elle transmet à tout le monde.

Plus on avance dans la performance, plus Angélique Kidjo se donne, entière, joyeuse et confiante. Elle bouge avec nous et nous entraîne .

Elle finira par le grand succès de Myriam Makéba Patapata « si vous ne connaissez pas c’est que vous n’habitez pas sur cette terre.. »
Et après l’envahissement par les spectateurs enthousiastes du par terre, elle donnera en rappel un medley de ses chansons les plus connues.
On finit épuisés et heureux, regonflés et plein d’espoir en l’avenir.
« Je suis optimiste dit-elle. » Du coup on se prend à rêver avec elle d’un monde  » où on peut discuter sans se haïr, la haine crée de la laideur, la paix est notre humanité commune si nous voulons le bonheur… »
Sa musique , sa voix, son énergie nous y porte…