Par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat.
Créon (33), le jeudi 8 février 2018.
C’est déjà l’avant dernier Jeudi du Jazz de la 8ème saison créonnaise. Et, malgré une très fraîche soirée de février, le centre culturel va bien se remplir. Est-ce le fumet de la soupe qui attire le public, la blanquette de veau annoncée sur le programme ou le vin du château Turcaud ? Est-ce le concert de MT4 ? C’est le tout bien sûr, la certitude de passer un moment convivial en écoutant une musique, du jazz en l’occurrence, de qualité. C’est ça la signature des Jeudis du Jazz qui les fait vivre depuis huit ans.
MT4 c’est le quartet de Marc Tambourindéguy ; c’est le vrai nom de ce pianiste angloy (le gentilé des habitants d’Anglet pour ceux qui l’ignorent) et organisateur du Anglet Jazz Festival tous les ans en fin d’été.
Avec lui Pascal Ségala aux guitares,
le Béarnais Jean-Luc Fabre à la contrebasse
et ce soir le Girondin Eric Pérez aux baguettes.
Groupe du sud-ouest donc qui le revendique mais qui rayonne bien au delà, il le peut.
MT4 avait été programmé par Action Jazz au festival Jazz à Caudéran en novembre dernier et nous ne pouvions les manquer ce soir, cette fois en toute décontraction, dégagés des « soucis » d’organisation qui vous empêchent de vraiment rentrer dans la musique.
Car la musique de MT4 est de celles, quand vous vous laissez faire, qui vous enveloppent dans une chaleur douce, ce qui en ce moment est vraiment le bienvenu. Parfaitement sonorisés et éclairés par les deux complices habituels de la console, les quatre musiciens vont nous réchauffer le cœur et l’esprit avec les élégantes compositions de Marc.
Quand on connaît un peu le jazz on pense aussitôt à l’univers de Pat Metheny. Quand on ne connaît pas trop le jazz peu importe, cette musique est d’une accessibilité immédiate. Cette influence, Marc et Pascal la revendiquent, ce dernier ayant co-écrit un très beau livre sur le guitariste américain. .
La guitare bien sûr, utilisée sans esbroufe, avec soit de douces harmonies soit des suites de notes déliées et cristallines, la chant fredonné de Marc de sa voix haute contrastant avec son gabarit king size, les mélodies simples et ciselées…
Rythmiquement c’est un pur régal que d’écouter Jean-Luc Fabre, un son de contrebasse tellement rond et boisé au service d’un tempo métronomique. Des chorus vivants, jamais aisé avec cette grosse mémère, des unissons mélodiques avec la guitare, un réel plaisir.
A ses côtés Eric Pérez qui joue de temps en temps avec le groupe, un batteur capable de tout les registres. En quelques semaines je l’aurai entendu avec Post Image, dont il est le titulaire, dans un registre fusion, avec Thomas Bercy pour du hard-bop et ce soir donc. Il va nous tisser de la dentelle avec délicatesse, ses interventions plus engagées n’étant que davantage mises en valeur ; discret sous son éternel petit chapeau il est vraiment un très grand batteur.
Quand Marc ne fredonne pas, ou en même temps, il joue du piano ; c’est bien sûr son rôle principal. Le Roland électrique a un vrai son de piano – encore bravo la sono – et avec un toucher élégant il sert avec éclat son répertoire.
Pascal Ségala alterne entre une guitare jazz acoustique et une Ibanez électrique qu’il agrémente parcimonieusement et délicatement de quelques effets electros. Un jeu plein d’émotion sans exubérance qui participe à cette douce chaleur évoquée plus haut.
Le répertoire reprend les titres de l’album « Pleine Lune » avec notamment le mélancolique « Rêverie » qui me fait tant penser – et je ne suis pas le seul – à « La Chanson d’Hélène » immortalisée par la belle Romy dans les Choses de la Vie. Un joli hasard car c’en est un. Toutefois une nouveauté jouée pour la première fois en public « Chambre d’Amour » du nom de cette grotte dans une falaise d’Anglet de laquelle une grosse mer aurait emporté dans ses flots deux amoureux…
Un concert de ceux qui vous font du bien, qui vous enveloppe de sa suavité et de son romantisme, ne manquait que le feu dans la cheminée…
Merci à Larural et Serge Moulinier pour cette programmation.
Prochain jeudi du jazz dans un tout autre style plein de swing, le 5 avril avec The Rix’Tet (concert 5€ ; Navarin d’agneau printanier 8€, assiette sur réservation 05 57 34 42 52)
