Jazz Vibes Quintet : de Bach à Bernstein
Par Philippe Desmond
Théâtre du Pont Tournant, Bordeaux le vendredi 29 novembre 2024.
Jacques Ballue : piano / Patrice Guillon : vibraphone / Fabien Chouraki : sax ténor et soprano / Jean-Patrick Allant : batterie / Aurélien Gody : contrebasse.
Action Jazz s’est rendu aux balances du Jazz Vibes Quintet au théâtre du Pont Tournant. Le groupe y préparait le concert du soir annoncé complet.
Voilà deux ans nous avions eu un aperçu de ce spectacle – alors en quartet, sans saxophone – en première partie du big band de Jean Courtioux au Rocher de Palmer. Mais il nous a semblé intéressant d’en reparler tant ce projet est intéressant et capable de rassembler des publics différents, des amateurs de jazz à ceux du classique, des enfants aux adultes les plus mûrs. Un véritable crossover pour employer l’anglicisme à la mode.
Trop longtemps ces mondes musicaux se sont ignorés alors que tant de passerelles les relient. Bach improvisait, Mozart aussi, plus tard Stravinsky, Ravel, d’autres ont flirté avec le jazz. Des jazzmen comme Duke Ellington, Phil Woods, Miles Davis, le Modern Jazz quartet ou encore en France Jacques Loussier et maintenant Dimitri Naïditch, les frères Enhco et d’autres, ont interprété à leur manière des standards classiques si on peut utiliser ce terme.
Le Jazz Vibes Quartet (pas encore quintet) s’y est donc lancé lui aussi. Il faut dire que presque tous ses membres ont des carrières musicales sans frontières. Jacques Ballue enseigne au Conservatoire National de Region, certes aussi pour les musiques dites actuelles et que Fabien Chouraki lui aussi y professe du classique au contemporain le plus innovant. Patrice Guillon a tenu le poste du vibraphone pendant des années à l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine mais a été formé entre autres par Gary Burton à la technique à quatre mailloches. Jean-Patrick Allant a lui aussi joué régulièrement avec l’ONBA mais auparavant dans des orchestres renommés accompagnant des vedettes de la chanson, tout en faisant du jazz régulièrement. Aurélien Gody présente une carrière plutôt jazz mais la contrebasse est un des instruments communs aux deux mondes musicaux.
Ce projet est né il y a déjà pas mal de temps, c’est Patrice Guillon qui avait d’abord transposé les œuvres pour le vibraphone, une tâche immense. Il avait une idée derrière la tête car de ce travail est née la mise en jazz, Jacques Ballue s’étant alors attelé à la mise en place des harmonies pour en arriver avec la rythmique au projet en quartet, piano, vibraphone, contrebasse, batterie. Le saxophone – soprano et ténor – est arrivé il y a peu.
La métamorphose des titres est une réussite. Le thème initial une fois exposé, laisse la place à des improvisations toujours dans l’esprit, tournant autour des notes initiales la rythmique nous rappelant que tout cela est devenu du jazz. Du swing, du be bop, du cool jazz, on se laisse prendre. Je parie même que les puristes de la musique dite savante prennent plaisir à s’encanailler, qu’ils l’avouent ou non. Cet exercice a aussi une vertue pédagogique et devrait être présenté pour des spectacles aux enfants, aux jeunes des écoles de musique ou des conservatoires, ils pouraient y découvrir tout simplement ce qu’est la musique et la richesse qu’elle propose, que les barrières entre les styles peuvent tomber.
Nous n’avons pu assister au concert le soir qui a été un grand succès. Avec ce projet le J.V.Q. étoffe son offre déjà riche de ses propres compositions, du répertoire de Sting et Police (et oui !) en attendant une autre création autour de Billie Holiday avec une chanteuse évidemment.
Merci aux musiciens de m’avoir permis de suivre la répétition/balance, mêlant mises au point musicales – rien n’est jamais acquis ou figé – et réglages techniques. C’est toujours un moment animé – surtout avec de telles personnalités – mais bon enfant, passionnant à observer de l’extérieur.
Setlist :
- « Reviens encore » d’après une cantate de JS Bach
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« A la Turquerie » d’après Lully
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« Baroque sinfonia » d’après Haendel -
« Piazzo » d’après JS Bach à la manière d’Astor
- « Surprise symphonie swing » d’après Tchaïkovski
- « Petite Ouverture »
- « Une Pavane improvisée » d’après Fauré
- « Prélude à Ravel » d’après Ravel
- « Spring 96 » d’après Cool (West Side Story) de Bernstein