La formidable affiche de Jean Duverdier aussi batteur du Swingin’ Bayonne ! Le « dessibatteur ».

Jazz en Mars 2024 à Tarnos – 1/2

par Philippe Desmond, texte et photos (cliquer pour agrandir)

Dix-neuvième édition de Jazz en Mars, le festival de Tarnos la ville portuaire à l’ultime sud des Landes. Créé par André Lassus qui a ensuite passé le relais à Arnaud Labastie, pianiste et actuel directeur de l’école de musique municipale, le festival est porté par la Ville de Tarnos à la politique culturelle très dynamique. Le succès est d’ailleurs au rendez-vous cette année le festival affichait complet un mois avant son démarrage !

Mardi 5 mars : « Bird » au cinéma CGR

Avant d’accueillir jeudi Kyle, c’est ce soir Clint Eastwood qui est à l’honneur avec « Bird » son film fleuve de 1988 qui retrace la vie tumultueuse de Charlie Parker. Un chef d’œuvre bouleversant dont on sait qu’il ne se terminera pas par une happy end, le Yardbird disparaissant à seulement 34 ans. Et bien sûr tout au long du film une BO fascinante. En ouverture un quartet de jazz composé de l’indispensable Arnaud Labastie (piano), Serge Sarrat (contrebasse), Stéphane Abadie (guitare) et Baptiste Annette (sax alto), a proposé quelques grands standards.

Mercredi 6 mars ; concert solidaire

Prix libre ce soir, les recettes allant à l’association humanitaire basque Etorkinekin BAB qui vient en aide aux réfugiés, exilés et migrants. https://etorkizuna-pb.eus/associations/etorkinekin/

Première partie : autour de l’école de musique municipale

Les musiciens sont pour la grande majorité issus ou toujours à l’école de musique. Au passage merci à l’association des parents d’élèves de l’école de musique d’assurer le bar et les gourmandises ! Remarquable duo violon piano avec à l’archet Théo Aroztegui et au clavier Mathieu Cochard avec un « Night and Day » superbe. Puis un quartet formé autour de l’excellent flutiste Manuel Casel : Txomi Duhalde (bat), Arnaud Labastie (piano), Julien Tastets (basse) pour notamment la lumineuse composition « How Intensitive » de Jobim ; la flûte va si bien à la Bossa Nova. On enchaîne avec le même trio rythmique mais avec deux soufflants, Jon Caliot à la trompette et Vincent Andrieux au sax ténor ; des harmonies, des unissons, des joutes de très haut niveau sur le blues final composé pour l’occasion par le saxophoniste. Place maintenant au big band de l’école de musique dirigé par Txomi Duhalde. Élèves, professeurs mêlés dans cette formation de 17 musiciens de très bon niveau ; répertoire varié même dans cet échantillon, 4 titres seulement et un final superbe avec «On Green Dolphin Street». Bravo à cette école qui visiblement propose un enseignement de haute qualité, ça s’entend !

Deuxième partie : voyage à New Orleans avec Crawfish Wallet

Très vite on va se rendre compte que ce n’est plus l’Adour qui se jette dans l’océan à Tarnos mais le Mississippi, nous voilà en effet partis pour un voyage à New Orleans avec le quartet bordelais Crawfish Wallet. Amandine Cabald-Roche (voix, washboard ; et oui la femme à la lessive et aux dés à coudre !) Gaëtan Martin (trombone qui en a fait ses premiers apprentissages ici à l’école de musique de Tarnos ! ) Jean-Michel Plassan (banjo, chant) et Fred Lasnier (contrebasse, chant) ont le don de nous embarquer de suite avec leur musique bariolée à l’image de ce qui se joue en Louisiane. Le charme mutin d’Amandine, le bal des sourdines magnifiant le trombone de Gaëtan, la verve au banjo de Jean-Michel et les slaps telluriques de Fred ne peuvent laisser indifférents. Ils nous ont offert des titres des albums passés et du dernier, « A good man is hard to find » sorti deux jours avant avec des hommages à Lizzie Miles la légendaire chanteuse de blues afro-créole. Avec eux c’est toujours un concert joyeux qu’on a du mal à quitter.

Jeudi 7 mars : le jazz des 30’s et les films des 70’s

Première partie : la découverte du David Hermlin trio

David Hermlin : chant, batterie, claquettes / Sascha Kommer : piano, chant / Lorenzo Baldasso : clarinette, chant.

Ils sont jeunes, magnifiques dans la présentation, costards croisés à large revers, chemises à grand col, cravates annoncent la période les 30’s ; leur musique va le confirmer. Trois véritables showmen avec à leur tête l’exhubérant batteur David Hermlin au drumming extravagant sur sa Slingerland vintage à la grosse caisse démesurée. Ça swingue de partout, ça s’amuse, ça bouge, ça chante ! Ah que le jazz pouvait être gai dans ces années folles, c’est tellement bien de nous le rappeler en le faisant revivre ! Tchaïkovski et son « Lac des cygnes » , JS Bach, vont être passés à la moulinette swing avec un brio extraordinaire par ce trio germano-italien. Bach sonne en boogie-woogie au rythme d’un train qui démarre pour ensuite débouler à toute vapeur. David batteur sur les traces de Krupa, David crooner, David danseur de claquettes, Sascha prolifique au piano (il est pourtant arrivé une demi-heure avant le concert pour un problème d’avion et en ayant raté les balances où il a été suppléé au pied levé par Arnaud Labastie décidément homme orchestre du festival), Lorenzo puissant et fin à la fois à la clarinette, trois talents à découvrir ! Ils inviteront Arnaud Labastie pour un final étourdissant. Quel show, du vrai music-hall !

Deuxième partie : Eastwood by Eastwood

Kyle Eastwood : contrebasse, basse / Andrew McCormack : piano / Chris Higginbottom : batterie / Quentin Collins : trompette et bugle / Brandon Allen : saxophones.

Kyle Eastwood a fini, grâce à son talent, par se faire un prénom. Ce nom l’a tantôt desservi (le fils de qui veut faire du jazz…) mais aussi souvent attiré la curiosité. Son talent a fait le reste et maintenant il assume, la preuve, le titre de sa tournée où il joue les musiques des films de Clint, celles des autres, John Williams, Ennio Morricone, Lalo Schifrin et les siennes, celles qu’il a composées pour son père. Le concert commence avec un extrait de la BO de Bird (projeté deux jours avant au festival) . Avec les fidèles et excellents musiciens avec qui il tourne depuis une bonne dizaine d’années, Kyle très investi dans son jeu que ce soit à la contrebasse ou à la basse, va bous plonger dans les lourdes ambiances de « La Sanction » ou de « Impitoyable », nous faire enquêter avec « Inspecteur Harry » , groover avec « Magnum Force » où les cuivres se tirent dessus, rêver avec « Iwo Jima » et « Gran Torino ». Rappel exceptionnel avec un arrangement du thème de « le Bon, la Brute et le Truand » particulièrement habile et réussi. Une version très speed limite rock ! Et malgré son nom de star – il en est une aussi désormais – Kyle est d’une grande gentillesse passant en toute simplicité de longs moments avec tous après le concert.

A suivre les deux autres soirées.