Golino / Pénichou / Saint-Guirons / Biwandu
Du gratin pour finir un dimanche
par Philippe Desmond.
Molly Malone’s, Bordeaux le 21 mai 2023
Le dimanche soir, depuis des années, pour terminer le week-end en musique, le Molly Malone’s propose du jazz. Ce pub irlandais du quai des Chartrons, avec ses nombreuses bières, ses fish and chips et bien d’autres gourmandises délicieusement caloriques, accueille ainsi des formations de jazz, jamais pléthoriques vu le peu d’espcace dont elles bénéficient dans un coin de la première salle.
C’est Rachael Magidson , musicienne elle même, qui s’occupe de la programmation et qui, quand elle ne joue pas ailleurs, vient soutenir ses collègues. Ce soir elle n’est pas présente pour accueillir quatre figures incontournables de la scène régionale. Le saxophoniste ténor Alex Golino a réuni ses amis Yann Pénichou à la guitare, Hervé Saint-Guirons à l’orgue et Roger Biwandu à la batterie. Un quartet de costauds, ils vont encore nous le démontrer en retricotant quelques standards savamment choisis et pas forcément parmi les plus joués.
C’est Alex Golino le leader ce soir, alors une belle place est faite à ses collègues saxophonistes. On va ainsi retrouver Wayne Shorter et son tonique « United » créé du temps des Jazz Messengers. Un autre ancien de ce groupe sera joué plusieurs fois ce soir aussi, pas le plus célèbre ayant pourtant collaboré avec les plus grands, il s’agit de Hank Mobley qu’Alex adore. Le son de son saxophone est d’ailleurs proche du sien mélodieux et jamais agressif. Un des titres est « Recado Bossa Nova » une musique enjouée où le velouté du sax ténor trouve sa belle place. Alex, un peu notre Stan Getz local justement avec ce velours qui le caractérise, est particulièrement en verve ce soir et il n’est pas avare de ses improvisations, un régal. Sam Rivers aussi sera là avec la douce « Beatrice »
Loin de prendre toute la place Alex alternera ses chorus avec un très inspiré Yann Pénichou qui sortira souvent de son rôle rythmique ou harmonique ; il sera notamment à l’honneur – et à la hauteur – avec un brillant « West Coast Blues » de son illustre prédécesseur Wes Montgomery ; très belle version. Autre titre de Wes, le bouillant « SOS ».
A l’orgue Hervé Saint-Guirons habille les mélodies de ce son si caractéristique de l’instrument, ici numérique mais très fidèle à l’Hammond, à la fois chaud mais un peu sale, sulfureux ou feutré ; une touche vintage tellement agréable. Mains agiles, pieds aussi pour les basses, bel engagement d’Hervé visiblement heureux dans ce répertoire.
Calé au fond de la mini scène, Roger Biwandu et sa jazette. A-t-il besoin d’autre chose pour irradier de son drumming ? Visiblement non, une caisse claire, une grosse caisse, une drive et un charley, le compte est bon pour une nouvelle démonstration de son talent. Finesse, puissance, fantaisie, douceur, ponctuations terribles, tout est là avec si peu ; il sortira même les mailloches dix secondes pour un final tout en délicatesse. Et tellement à l’aise dans les habits de Jimmy Cobb dans un « SOS » de feu !
Mesurons-nous la chance que nous avons de vivre en toute simplicité des moments de jazz de grande qualité si près de nous ?
1 set
Sunday in NY (P. Nero)
On Green Dolphin Street
Tenderly
United (W. Shorter)
O Grande Amor (A.C. Jobim)
Fee Fi Fo Fum (W. Shorter)
2 set
Uh-Huh (H. Mobley)
Beatrice (S. Rivers)
West Coast Blues (W. Montgomery)
S.O.S (W. Montgomery)
Recado Bossa Nova (H. Mobley)
This I Dig Of You (H. Mobley)
A signaler que le Molly Malone’s utilise le dispositif GIP Café Cultures chargé de faciliter l’offre artistique dans les lieux de proximité comme les bars, les restaurants. Malheureusement ce fonds d’aide n’est justement pas sans fond et cette année il est déjà en partie épuisé… https://gipcafescultures.fr/