par Philippe Desmond, photos Alain Pelletier

Festival Sons d’été – Rocher de Palmer le mercredi 14 juillet 2021

Soir de Fête Nationale mais ici pas de flonflons, ni de feu d’artifice bruyant, de la musique et des lumières léchées.

Marco Mezquida trio

Le Minorquin Marco Mezquida pianiste brillant et compositeur polyvalent est sur la scène du Rocher en trio avec Aleix Tobias aux percussions et le violoncelliste cubain Martin Mélendez. Presque un trio jazz « classique » à la taille de l’instrument à cordes près. Classique par contre dans un autre sens, celui de la musique, la grande parait-il, dont Marco est un adepte, n’a t-il pas rendu hommage à Ravel dans son avant dernier album ? Du jazz certes mais finalement quelle importance, surtout une musique sans frontière et d’une éclatante beauté. Un premier thème lumineux rythmé par le violoncelle joué en pizzicato, tel une contrebasse de jazz, une batterie légère et un piano généreux. Une originalité qui surgit instantanément et qui va se confirmer. Epoustouflant de voir chacun jouer presque de façon minimaliste, légère, pour un tout flamboyant et même bourré de groove. Richesse du piano d’où parvient une « Javanaise », plus tard un bout de « Pavane » de Ravel, transformation du piano en harpe, les doigts légers dans les cordes, le tout en parfaite osmose avec violoncelle et percussions. Une musique d’un très grand raffinement, ciselée, délicate et qui quand elle s’emballe garde cette élégance racée. Et en plus Marco est d’une sympathie réjouissante avec le public osant s’exprimer dans notre langue de façon tout à fait correcte et si agréable à entendre. Ce pianiste a tout pour lui et ses deux compères n’ont rien à lui envier. Pas un concert, un enchantement.

 

Eric Séva trio – Triple Roots

Eric Séva est lui aussi en trio, un trio original également, lui aux saxophones, ténor et soprano, Kévin Reveyrand à la basse électrique et Jean-Luc Di Fraya au percussions et au chant. « Triple Roots » se nomme leur projet, les racines de chacun, musicales et au delà. Action Jazz a déjà chroniqué leur album « Résonances » ainsi qu’un concert en ligne depuis le Studio de l’Ermitage mais c’est la première fois que nous les voyons réellement sur scène. Sur ce plateau immense ils ont choisi de se blottir les uns contre les autres, leur musique le nécessite, très intimiste, sensible et délicate. Le saxophone y domine, quasi permanent, impossible d’en applaudir les chorus, il ne s’arrête presque jamais. Les mélodies écrites  par Eric Séva mais aussi par Kévin Reveyrand sont souvent susurrées, murmurées presque, la batterie est légère et, assez surprenant, la voix aérienne de Jean-Luc Di Fraya vient parfois dialoguer ou prendre des unissons avec le soprano ou le ténor joué presque en sourdine. La basse s’invite en relançant le tempo, toujours avec délicatesse, elle se fait guitare tout en retenue. Cette soirée est décidément placée sous le signe de l’élégance, si loin des flonflons de bals évoqués plus haut. C’est là pourtant que tout jeune Eric Séva a fait ses classes dans le dancing parisien de son père justement présent ce soir. Affaire de famille que la musique, voilà qu’au rappel Eric invite sur scène son frère Stéphane, bien connu de la scène bordelaise et bien au delà. Le voilà avec son washboard, ses woodbox, cloches et cymbalettes qui rejoint le trio pour un vrai moment de joie partagée concluant – encore -une belle soirée.

Ces premiers « Sons d’été » sont musicalement une vraie réussite, dommage qu’ils n’aient pu se tenir en plein air comme initialement prévu.

 

 

Eric Séva Trio – Triple Roots

Eric Séva trio « Triple Roots » au Studio de l’Ermitage