Chronique d’EYMET

par  Sylvie Delanne, photos Jean-Michel Meyre

Concerts des 16 et 17 juillet 2022 offerts généreusement par l’Association Maquiz’Art et la Commune d’Eymet à l’occasion du vernissage du parcours photographique autour de l’œuvre de Guy Le Querrec « L’Oeil de l’Eléphant »

Pour un chaud week-end d’été, ce fut un chaud week-end de musique !!

JOUR 1 – Samedi – 20h30

La bastide d’Eymet résonnait encore de sa grande fête occitane, la Félibrée célébrée début juillet au son des musiques et chants gascons, que déjà , sous un ciel aux milliers de fleurs multicolores, Suzanne et Laurent Pasquon et l’association Maquiz’Art mettaient en œuvre le programme estival Hors les Murs.

Dans une ambiance chaleureuse et décontractée , la municipalité d’Eymet accompagnée des représentants des collectivités publiques soutiens du projet, nous avaient donné rendez-vous samedi 16 juillet , en fin d’après-midi pour inaugurer le parcours photographique des photos du maître Guy Le Querrec, «  L’Oeil de l’éléphant ».

L’immense et emblématique portrait de Miles Davis projetant sa trompette vers le ciel pavoisait la tour de garde du château d’Eymet et accueillait un public venu nombreux pour suivre cette déambulation guidée par Laurent Pasquon à la découverte des célèbres clichés du photographe accrochés aux murs de la petite cité médiévale.

S’en suivit un apéritif servi par les amis du Jazz de l’association Maquiz’Art où nous pûmes discuter avec l’immense pianiste Pierre de Bethmann qui, aussitôt après, donnait sur la place de la bastide un concert inoubliable accompagné de son trio Sylvain Romano à la contrebasse et Karl Jannuska à la batterie.

Pierre de Bethmann, souriant et heureux, habillé de son immense talent, toujours simple et généreux, proposa au public de redécouvrir quelques standards du jazz arrangés pour le trio, et là, miracle, un feu d’artifice de rythme et de couleurs atteignant dans sa diversité le ciel de Ludwig Van Beethoven , cette sublime 7e symphonie écrite pendant la terrible campagne de Russie, qui, tout comme le jazz propose une fusion totale du corps et de l’esprit en une danse au rythme lancinant .

Pierre de Bethmann, c’est une musique habitée et complexe qui nous emporte crescendo dans une rythmique dont lui seul à le secret .

Avec ses musiciens ce n’est pas une complicité, non, c’est un bonheur intense d’être ensemble, un champ libre où chacun exprime son meilleur, sa couleur dans le continuo bethmannien…accord, réponse… accord, réponse… d’ailleurs , Karl Jannuska que je félicitais, me disait après le concert, « j’adore jouer avec Pierre, avec lui je m’autorise toujours plus loin ».

Soirée terminée dans la joie autour de la délicieuse table Andine, un des nombreux restaurants de la Bastide d’Eymet, en proximité des musiciens et de la jeunesse du village.

JOUR 2 « Deux souffleurs sur un fil »

En fin d’après midi, à l’heure où nous commencions à espérer une trêve des températures, les promeneurs du dimanche et le public venu pour, étions interpellés par les premières notes d’un improbable duo cuivré, Eric Séva au sax baryton et Daniel Zimmermann au trombone, cachés des rayons encore cuisant du soleil sous une arche de la bastide.

Tel le joueur de flûte de Hamelin, le duo de troubadours nous invitait alors à le suivre jusque dans la cour du château puis au delà dans un voyage musical à travers les lieux les plus secrets de leur histoire qui avaient inspiré les deux musiciens.

Sous l’ombre généreuse d’un arbre séculaire, Eric Séva et Daniel Zimmermann nous donnaient alors un exemplaire moment de jazz , un jeu d’écoute, sans filet, dans lequel aucun doute ne s’insinuait, la basse du baryton scandant les envolées et les phrases du trombone.

Le voyage commence en Argentine, par le célèbre Oblivion d’Astor Piazzola ;

les notes intimistes du sax relancées par le souffle lointain du trombone nous ont donné une extraordinaire sensation d’infini.

Puis un saut par dessus l’Atlantique ,  « Luz d’Eus » composition d’Eric Séva, nous transporte dans le village d’Eus, soleil accroché à la montagne, sur un pas à pas de sardane, une aide joyeuse qui nous aide à gravir les chaudes ruelles pierreuses . Eric donne la note pour la poésie du lieu et les rayons ensoleillés du trombone illuminent l’ocre des façades.

Une vraie ballade calme et musicale nous amène alors…

…Jusqu’à Essaouira et ses Gnawas pour une méditation profane, composition de Daniel Zimmermann.
Notes graves percussives,

Appel à la prière,

Reprise de fête

Lancinance,,, et final, troublant et envoûtant.

Puis « Les Valseuses » une composition de Stéphane Grappelli bien connue , les deux instruments se répondent, mélodie, rythme, se passent la main, un alto trombone s’élève quand le sax pompe le jazz !

Un 2ème Piazzolla, « Libertango » un tango libre, un tango libertaire et rageur écrit en 1974, adapté par Eric Seva lors du 2è confinement à l’occasion du 100ème anniversaire de la naissance du musicien . La musique syncopée , danse, volte et virevolte ; quand le bourdon vole au son du Tango

Daniel tient une longue note continue avant la brusque échappée finale.

Et le concert ne pouvait se terminer sans un clin d’œil d’Eric Séva aux amies parisiennes présentes, « A pied dans Paris », une valse déambulatoire et poétique…des petites surprises, le Marché des Enfants Rouges et les rues du Marais… un pas de danse en bord de Seine sous la magique lumière du ciel parisien, le petit bal popu de la place de la Contrescarpe… une douceur alanguie dans le square du Vert Galant avant de finir sur un vrai tempo jazz à St Germain des Prés.

Douceur de vivre un soir d’été, quand tout s’enflamme autour de nous, deux funambules du souffle nous ont offert un répit de paix et d’amour.

Merci Eric, merci Daniel d’avoir osé cette union libre et surprenante !