Par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat (nov 2018)

« Voilà, c’est fini » chante Jean-Louis Aubert, une chanson qui pourrait conclure la programmation de FIP du vendredi 18 décembre prochain. Non que FIP s’arrête, cela aurait été le coup de grâce, mais parce que ses trois locales restantes, Bordeaux-Arcachon, Nantes et Strasbourg vont, elles, cesser de vivre.

Dans ces lignes nous avons déjà évoqué plusieurs fois cette fin (mot clé FIP dans la recherche) qui aurait même dû intervenir deux ans plus tôt. Des actions syndicales, des remaniements à Radio France, au gouvernement, les dossiers de reclassement à monter  et enfin ce foutu covid 19 auront reculé la bien triste échéance. Reculé mais pas complètement, la fermeture annoncée récemment au 31 décembre a été avancée de treize jours, dernière péripétie…

Stéphanie à l’antenne dans le studio de FIP Bordeaux-Arcachon

Certes avec la nouvelle stratégie globale de la station, l’arrivée du nouveau format RNT, Radio Numérique Terrestre ou DAB+ (Digital Audio Broadcasting) va permettre à tout le territoire français et au delà, d’être arrosé par cette merveilleuse et riche bande musicale qu’est FIP. Finie donc l’écoute brouillée puis impossible en voiture dès qu’on s’éloigne un peu trop de l’émetteur.

Certes les émissions et notamment le Club Jazzafip, les concerts en direct, continueront à régaler nos oreilles et alimenter notre curiosité.

Certes la webradio www.fip.fr avec ses huit propositions thématiques, ses articles, ses émissions en podcast, sa programmation en ligne existera toujours.

Certes FIP, et c’est tant mieux, restera à l’écoute et partenaire de nombreux événements en région, comme par exemple – au hasard – le tremplin Action Jazz Nouvelle-Aquitaine.

Certes FIP nous fera toujours découvrir ces pépites avec lesquelles beaucoup d’entre nous ont peu à peu rempli les étagères de leur discothèque. Des 33 tours puis des CD.

Mais alors me direz-vous, pourquoi être si triste ?

Parce que FIP en région était depuis 50 ans bientôt – déjà vont dire certains de ma génération – un support primordial pour la culture locale. L’annonce d’un spectacle qu’on n’avait pas vu passer, la suggestion d’une exposition ou d’une conférence qu’on avait oubliée, l’existence d’une compagnie théâtrale régionale, le rappel du festival organisé par une petite association locale – suivez mon regard – la sortie de l’album d’un artiste du coin « Ah tiens, lui je le connais ! », la programmation d’une salle voisine, les places à gagner… Utile pour l’auditeur, mais aussi fondamentale pour les artistes et organisateurs bénéficiant ainsi du label reconnu « FIP ».

Parce que nous n’entendrons plus les voix de nos copines du poste, les Fipettes que les habitués comme nous, qui collaborons avec elles, savent reconnaître et identifier. Elle ne sont que sept me direz-vous. Et oui sept fois une femme à laquelle on explique que l’on n’a plus besoin d’elle à l’antenne. Des reclassements satisfaisants sont en cours, c’est quand même à souligner, des départs à la retraite et jusqu’au bout elles auront été « réglos », ne laissant pas transparaître dans leurs douces et sensuelles voix, leur amertume de ne plus bientôt nous parler.

de g à d : les animatrices Stéphanie, Suzanne, Sophie, Isabelle, Muriel, Elodie et Françoise la coordonnatrice locale

Cette décision de fermer les locales vient de bien au dessus de la direction même de la station, qui prise entre deux feux, aura su rester très à l’écoute de sa base malgré tout. Les pétitions, articles de presse, interventions timides ou tardives – trop récemment des maires des villes concernées – des politiques, rien n’aura fait changer de cap les froids comptables de Bercy économisant les bouts de chandelles d’un côté et ouvrant les vannes de l’autre, quoi qu’il en coûte…

Nous voilà donc arrivés au moment des regrets, au moment de la séparation, rien ne sera plus pareil.

Essayez par exemple sur le net d’écouter FIP sans choisir la station locale qui vous intéresse, c’est encore possible, celle de Paris par défaut, vous allez au bout d’un moment comprendre le manque qui va bientôt se produire, à l’écoute d’informations qui ne vous concernent pas ou de loin. Il y aura toujours des infos régionales nous a t-on assuré, mais pas les 70 quotidiennes, rédigées par les animatrices elles-mêmes au passage. Je me souviens d’une discussion avec un rédacteur du journal Sud-Ouest, m’expliquant que la première chose que faisait la majorité de ses lecteurs et leur plus grande satisfaction, c’était de voir s’ils connaissaient quelqu’un dans le journal, sondage à l’appui. Il y a une bonne dizaine d’années un rédac chef descendu de Paris avait voulu tailler dans les infos locales, il a vite fallu les remettre en avant, les ventes s’effondraient… Ne souhaitons pas pour autant le même sort à l’audience de cette belle radio que restera FIP mais avec de l’âme en moins.

En 2021 FIP va donc célébrer ses 50 ans, la fête musicale devrait être belle – si covid 19 ne s’en mêle pas trop – mais elle aurait pu être tellement plus joyeuse…

Merci beaucoup les Fipettes, bravo pour votre travail, votre présence, à se revoir avec ces beaux sourires !

Dans le studio de FIP Bordeaux-Arcachon, rue Serr.