Summer Jazz à l’Apollo – Roger Biwandu quartet
par Philippe Desmond, photos Géraldine Gilleron (cliquer pour agrandir)
L’Apollo bar, Bordeaux le mercredi 10 juillet 2024.
C’est l’été paraît-il, l’affiche du concert du soir à l’Apollo de Bordeaux semble le confirmer « Summer Jazz » ; trève météorologique, il ne pleut pas, il fait même presque chaud et la terrasse du bar est pleine. Dedans aussi ça s’est rempli, la légende des Bordelais tous au Bassin dès les premiers jours de juillet ne concerne finalement qu’une minorité. Des amateurs de jazz, des fidèles des Cartes Blanches à Roger Biwandu sont là, pas tous certes. L’affiche est illustrée des frères Marsalis, Wynton et Branford, la couleur est annoncée. Non ils ne sont pas là mais ont délégué à Michaël Chevalier et Jean-Christophe Jacques respectivement à la trompette et au sax ténor donc. Nolwenn Leizour à la contrebasse et bien sûr Roger à la batterie complètent le quartet, quatre cinquième du Bordeaux quintet, Hervé Saint-Guirons étant de repos. On les retrouvera au complet au festival Jazz et Vin en Double de la Roche-Chalais le 21 juillet, à Marciac pour 4 concerts dans le bis les 24 et 25 juillet et au festival d’Andernos le 26.
Plus qu’un teaser pour ces dates, c’est un vrai concert qui nous est offert ; le terme est exact, l’entrée est gratuite à l’Apollo, on se doit d’y consommer évidemment mais toujours à tarif raisonnable.
On démarre avec une compo de Wynton Marsalis, ce musicien trop vite qualifié de néo classique car ici dans un registre néo bop très engagé. Des harmonies modernes complexes, voire parfois piquantes, au service de mélodies toujours bien ficelées. Et surtout de l’énergie. Rythmique avec Roger qui aux balais arrive à donner une dynamique folle et Nolwenn au tempo mélodique magistral avec ce son boisé qui la caractérise ; tout cela est d’une efficacité remarquable. Les deux soufflants se connaissent par cœur depuis le temps qu’ils jouent ensemble, il dialoguent, se questionnent, se répondent, se complètent, alterne les chorus engagés avec verve et musicalité. Et pourtant pour Jean-Christophe Jacques, le pire est arrivé la semaine dernière. Un cambriolage éclair et adieu ses beaux saxophones, un ténor Keilwerth MKX (numéro de série 127434) et un alto Keilwerth sx90 R (numéro de série 126559) les deux sont en finition vintage (couleur marron chocolat) ; très facilement identifiables, ayez l’oeil ; photo en fin d’article . Il s’est fait prêter un exceptionnel sax ténor vintage de chez Selmer qu’il va maîtriser parfaitement.
Wynton au programme, le moins célèbre Charles Frambrough, contrebassiste des Jazz Messengers d’Art Blakey, mais aussi Tony Williams ( ces deux batteurs figurent au Panthéon du boss) un de ses titres musclés « B&W’s Blues », John Scofield pour boucler une première partie au répertoire innovant pour ces musiciens.
Deuxième set avec l’hymne de Roger Biwandu « From Palmer » hommage à son quartier d’origine et de cœur dont il nous confie qu’il aimerait en devenir le maire ! Une version bien secouée ce soir, le quartet joue fort, très fort, Nolwenn fait plus que survivre à ces trois gaillards, pourtant en acoustique, grâce à son petit ampli de contrebasse. Voilà « Wee » et je découvre que ce thème que je connais depuis longtemps est de Denzil Best. Chance pour moi avec un de mes titres favoris, le « Strasbourg Saint-Denis » de Roy Hargrove ; référence du trompettiste au quartier où il allait se fournir en dope, non loin de la rue des Lombards et de ses temples du jazz…
Pas de concert de Roger Biwandu sans un clin d’oeil à Wayne Shorter, à Miles Davis et à Herbie Hancock ce soir en rappel, « Cantaloupe Island » en l’occurrence.
Du jazz, du pur jazz, celui qui ne vous laisse pas indifférent qui parfois vous dérange et souvent vous comble. On en a de la chance à Bordeaux de vivre régulièrement des concerts de cette qualité avec une telle proximité.
Prochaine Carte Blanche avec Marie Carrié au chant le mercredi 7 août à 19h30.