par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat.

South Town Jazz Festival, Soustons (40) mars 2022

Deuxième et dernière partie de l’édition 2022 du STJF ! Quel plaisir de revivre ces moments après deux années de frustration !

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Jeudi 24 mars

Séance traditionnelle de cinéma du festival à l’Atlantic avec la projection du légendaire « The Blues Brothers » et le soir troisième concert avec 3 for Swing, c’est à dire Christophe Davot à la guitare – si belle – et au chant, Jacques Schneck au piano et Laurent Vanhée à la contrebasse, qui invite Nicolas Montier au sax ténor et la chanteuse et violoniste australienne Heather Stewart.

Le trio joue depuis quelques années un répertoire inspiré de celui du Nat King Cole Trio et a eu envie d’évoluer en invitant ces deux musiciens. Quand on évoque NKC on pense aussitôt au chanteur mais c’est oublier que c’était un très grand pianiste. Formation sans batterie où la pompe rythmique de la guitare vient soutenir la contrebasse, le piano jouant ainsi les mélodies et les harmonies. Ambiance détendue sur scène, échanges avec le public dès le départ avec un Jacques Schneck en verve, le concert s’annonce des plus agréables. Une fois le trio lancé l’arrivée du saxophone de Nicolas Montier va ajouter de l’épaisseur mélodique avec ce son velouté et chaleureux, rien d’étonnant il est un des meilleurs saxophonistes de ce genre de jazz nécessitant précision et élégance. Visiblement sous le charme, Jacques Schneck invite alors la sémillante Heather Stewart qui aux balances n’a pas arrêté de rire et plaisanter. Chanteuse talentueuse mais aussi violoniste – comme Aurore Voilqué qui sera là le lendemain mais dans un tout autre style – elle va apporter sa touche de délicatesse et aussi de fantaisie, proposant aussi un duo chanté superbe avec Christophe Davot excellent crooner à ses heures. Un concert délicieux que le public a savouré avec délectation.

Vendredi 25 mars

La journée de la musique pour tous. Le matin le New Orleans Big Four nous propose un concert conférence sur le tuba jazz . En compagnie de Jérôme Gatius (cl), Gérard Siffert (tr), Jérôme Arlet (banjo), le passionné Bernard Thore (sousaphone) va expliquer aux jeunes du collèges invités à cet événement aussi ouvert au public, l’origine, l’emploi, les types de tubas. Il invitera même une jeune tubiste du collège à le rejoindre pour un blues improvisé. Quelques graines de jazz ainsi plantées, espérons que certaines poussent un jour.

L’après-midi le NOBF ira proposer de petits concerts à l’école maternelle puis à l’Ehpad locales, les restrictions sanitaires nous empêchant de les suivre. Qu’à cela ne tienne nous irons voir les balances du concert du soir, celui du trio d’Aurore Voilqué avec Angelo Debarre. Elles promettent un beau concert , il sera bien au delà !

En ouverture de la soirée, les classes 6ème et 5ème CHAM (Classes à Horaire Aménagé Musique) du collège de Soustons vont nous montrer le fruit de leur travail qui est déjà prometteur, enregistré par des dizaines de portables parentaux !

C’est vendredi, la salle va être bien remplie, tant mieux, les organisateurs le méritent. Les musiciens qui vont nous donner tant aussi : Aurore Voilqué (violon, voix), Mathieu Chatelain (guitare rythmique), Claudius Dupont (contrebasse) et le prestigieux Angelo Debarre (guitare lead). « Daphné » de Django embarque de suite la salle, la pompe manouche est bien là, soutenue par la contrebasse, Aurore virevolte déjà de son archet et Angelo entre de suite dans le vif du sujet. Le swing manouche, toujours séduisant, quand il atteint ce niveau-là devient magique. Le guitariste vedette et son allure de pur gitan andalou est inégalable quand il joue ainsi, finesse, précision, virtuosité sans oublier musicalité ; la vitesse en elle-même (300 à la noire m’a précisé un ami musicien) n’est rien si la musique n’est pas là. Et la pétulante Aurore Voilqué est tout à fait à la hauteur du maître, elle joue du violon depuis l’âge de trois ans et a eu le temps d’atteindre le sommet où elle est. Django Reinhardt donc au programme mais aussi le «Whisper Not» de Benny Golson mis joliment en paroles en Français, des standards comme « Honeysuckle Rose » et des compositions d’Angelo Debarre vont ainsi se succéder brillamment dans une ambiance bon enfant entretenue par Aurore, Angelo, si réservé d’habitude, charriant lui aussi de temps en temps. N’oublions pas le très sensuel «Why don’t you do right» où Aurore joue sa Peggy Lee et quelques passages où les cordes se sont faites toutes douces, le public retenant son souffle dans une écoute parfaite. Un concert de très haut vol, réjouissant et un plaisir partagé avec les artistes. Guillaume Nouaux avait envie d’une touche manouche pour son festival il a tapé dans le mille !

Samedi 26 mars

Déjà le dernier jour ! La semaine est passée à un tempo très relevé. Le matin à la médiathèque Guillaume Nouaux nous propose sa Conférence Démo sur « Le langage de la batterie jazz » ; il en a fait une spécialité, organisateurs d’évènements pensez-y c’est remarquable. Naissance de l’instrument, évolution, adaptation des rythmes au fil du temps démonstrations époustouflantes à l’appui, technique des solos toujours très attendu des spectateurs, on sort de là intelligent mais toujours aussi nul aux baguettes ! Et surprise à la fin pour le batteur conférencier, son portrait par Sonia Michel réalisé en direct pendant l’exposé de sa technique si particulière : un enchevêtrement d’un seul et même trait, incroyable !

Cours de danses swing l’après-midi pour les amateurs par Pierre Maury en attendant le dernier concert de la semaine. Ouverture avec les 4ème et 3éme des classes CHAM où on peut mesurer les progrès par rapport à leurs petits camardes de la veille. Un très joli « Equinox » de Coltrane à relever.

Guillaume Nouaux avait envie de faire venir au festival le nouveau prodige français du Boogie-Woogie le toujours teenager Nirek Mokar accompagné de ses Boogie Messengers. Découvrant le piano et en jouant en autodidacte en accompagnant son père dans le club « Paris Boogie Speakeasy » où celui-ci assurait l’entretien, il tourne depuis l’âge de 13 ans, pris sous sa coupe par le saxophoniste Claude Braud présent sur scène bien sûr ce soir. 54 ans d’écart avec son protecteur nous dira-t-il. Norek est en effet impressionnant derrière (ou au-dessus parfois ! ) son clavier mais aussi déjà très showman.

Claude Braud est donc au sax ténor, déchaîné comme d’habitude, un vrai sax hero, Stan Noubard Pacha un très grand du blues est à la guitare, Nicolas Dubouchet délaissant Sanseverino et ses potes bordelais fait claquer et slapper sa contrebasse, quant à la batterie Guillaume Nouaux n’a laissé le soin à personne de l’occuper et tant mieux pour nous ! Boogie-Woogie, Swing, Blues, R&B et même Rock n’Roll et, surprise, le « Blues my naughty sweetie gives to me » de Sidney Bechet en reggae ! Tout va exploser sous les doigts de Nirek soutenu par un sax porté au rouge, des solos de guitare en surtension, des slaps rebondissants de contrebasse et un drumming de malade avec en cadeau un solo intersidéral dans « Jumping at the Woodside » ! Et quelle version incroyable de dynamisme de « Rock House » de Ray Charles ! Bon courage à l’accordeur du piano !

Un final de folie bourré de gaité pour de South Town 2022 devant un public comblé. Félicitations à toute l’équipe Céline et Corinne du service culturel de la dynamique ville de Soustons dirigée par Frédérique Charpenel – présente tous les soirs – avec Isabelle Mainpin son adjointe à la culture, les techniciens son et lumière Peyo et Fred et leur stagiaire, et bien entendu à la baguette quand il n’est pas aux baguettes, le directeur artistique qui travaille déjà à la programmation 2023, Guillaume Nouaux.

Vive la musique vivante !

South Town Jazz Festival 2022 – #1/2 : https://wp.me/pdxYN8-73P

Galerie photos © de Philippe Marzat :