Par Dom Imonk, texte et photos
En avril, ne te découvre pas d’un fil dit-on, certes, mais ne perd surtout pas le fil de la note bleue, car à Saint-Macaire, la fête bat son plein pour elle à La Belle Lurette, chez Sylvain Capelli, en ce turbulent Printemps du Jazz 2019, qui s’y tient depuis le début du mois. Savamment organisés par le Collectif Caravan, Cécile Royer aux manettes, l’œil vif, l’âme généreuse et les oreilles aux aguets, les concerts ont tous apporté leur lot de découvertes et d’agréables surprises. Voyez plutôt : Capucine le 06 avril, Le Bal Chaloupé et la jam, avec Monique Thomas en invitée, la semaine suivante, et Robin & The Woods ce samedi. C’est sous un beau soleil couchant que nous nous sommes donc tous retrouvés, et une fois de plus le public a répondu présent ! Une salle pleine à craquer, pour découvrir le récit captivant des aventures de Robin Jolivet (guitariste, compositions),
et de ses « Woods », Jérôme Mascotto (sax ténor, compositions),
Alexandre Aguilera (flûte),
Alexis Cadeillan (basse)
et Nicolas Girardi (batterie).
Quand on leur demande de présenter cette musique, ils répondent plutôt « rock jazz » que « jazz rock », et ils ajoutent même « coloriste », c’est vrai qu’avec eux de chatoyantes couleurs défilent, comme un kaléidoscope effréné, et n’ont de cesse que d’asticoter notre imagination. Dès « Dark water falls », titre du récent EP, s’ouvre le fourmillant jardin de leur imaginaire.
D’entrée intrigué par l’atmosphère d’une émouvante mélancolie qui l’accueille, le public se laissera peu à peu séduire au fil des morceaux, d’abord par la finesse de la flûte troubadour qui s’envole, savante et lumineuse, puis carrément conquérir par l’humeur rock prog qui survient, dont le parfum seventies qui s’en dégage, voit la guitare s’enflammer, en une myriade de notes lyriques, alliée de cœur et nourrie à chaque instant par la chaleur et le jeu passionnant d’un saxophone à l’âme moderne, et appuyée par la magnifique gémellité rythmique, formée d’une basse inventive et friande de sonorités actuelles et d’une batterie dont le pouls bat la chamade, en une polyrythmie irrésistible où scintillements cuivrés et battement de peaux mènent la danse. Après une belle version de « Collapse », le groupe nous a présenté l’intégrale de « Fractales ». Magistrale composition en trois mouvements : « Ouverture », « La fabrique du trouble » et « Reflets sur l’eau qui dort », les deux derniers étant des nouveautés. Un concert dans le concert, propice à de très beaux chorus, tout y passe, des tendances répétitives carrément hypnotiques, à des instant presque funk, voire free, une impression de groove chevaleresque, qui file au galop, entre rochers monumentaux et chênes centenaires, comme le récit d’une épopée aux héros bienveillants, version 21° siècle. Voici déjà la fin du 1° set, le public est baba !
Il ne fallait surtout pas croire qu’après la pause, la pression serait retombée pour le deuxième set ! Il s’est ouvert sur le magnifique « Cello Man », morceau « multi-climat », entre sérénité pastorale et fureur urbaine, suivi de l’ambitieux «Eyjafjallajökull » évoquant l’éruption du tristement célèbre volcan islandais, et précisant au passage l’attachement du groupe à l’écologie, et son engagement pour cette cause. Robin & The Woods nous offriront un final bien punchy avec d’abord l’époustouflant « Moonfall », suivi d’un très musclé «Dying Stars Suicide Club », leur tube ! Un riff répétitif au départ, puis se succèdent les chorus voltigeurs d’un peu tout le monde, sur une intrépide ligne de basse (à l’octaver dirait-on ?), avec un saxophone pas avare en étincelles nu-jazz, sans oublier quelques breaks de batterie, à décorner mille bœufs, c’est fou !
Même si l’atmosphère « festivalière », le son, l’espace, la foule, conviennent très bien au groupe, ils l’ont déjà maintes fois prouvé, il est clair que celle d’un pub leur est tout aussi favorable, peut-être même plus. Nous l’avions déjà constaté il n’y a pas si longtemps au Quartier Libre (Bordeaux). Il y a une urgence, une compression émotionnelle incroyable, à jouer aussi près de son public, sentir immédiatement ses réactions, s’adapter. Ça motive encore plus ! C’est à un concert de pub rock jazz que nous venons tous d’assister, quelle énergie ! Quel bonheur ! Canterbury et New-York réunies l’espace d’un soir à Saint-Macaire, nous y étions, et ce fut une réussite ! Si par malheur vous avez loupé ce concert, soyez consolés car vous pourrez les retrouver le 18 mai au Festival Jazz Pourpre en Périgord (Bergerac) à 18h45 à la Boîte de Jazz – Place Gambetta.
Et enfin, les photos de nos ami(e)s photographes du Collectif BlueBox sont en exposition sur les murs de La Belle Lurette, puis venez nombreux, toujours à Saint-Macaire, pour le dernier jour de ce très beau festival, le samedi 27 avril, de 15h30 à 2h du matin, avec le « Jazz Day In Saint Macaire » « Migrations ».
Par Dom Imonk, texte et photos
Robin & The Woods, membres du collectif Hello Buddy !