POURQUOI LE « LIVE » NOUS MANQUE T’IL ????
Par Martine OMIECINSKI, Photos Philippe MARZAT
Samedi 18 avril 2020
En ces temps de confinement, essayons de décoder cette « frustration » due au manque de « Live », notre drogue préférée….
Diagnostic
Enfermés entre nos murs, on réécoute les disques de nos artistes préférés et que se passe -t’il ? Des sons, des visions, des sensations du concert « Live » au cours duquel on a « vécu » avec eux ce morceau viennent se superposer à l’écoute du disque.
Le diagnostic est simple, le mot a été dit : on a vécu quelque chose avec l’artiste ou les artistes et ce vécu dépasse en intensité la simple écoute.
Que disent nos sens ?
- L’odorat et le goût
Difficile de parler de l’odeur et du goût dans une salle de spectacle sur scène et dans le public, on peut bien sûr évoquer la sueur, le tabac, les parfums divers et la saveur de la boisson ou de l’en cas consommé juste avant…mais ce n’est pas concluant.
Par contre, les sonorités du « Live » t’embarquent tellement que ton (semi) inconscient te renvoie des réminiscences d’odeurs et saveurs stockés dans ta mémoire si tu as déjà vu le groupe ou l’artiste dans un « Live » précédent. Parfois agréables (goût du foie gras et du floc sur la place du village), parfois moins (odeur de poussière sous le chapiteau) à Marciac par exemple, ces évocations revoient au contexte antérieur.
Bien sûr l’écoute d’un disque peut activer cette mémoire mais l’intensité n’est pas si vive.
- Le toucher
Parfois tu as la sensation de toucher toi-même les cordes de la contrebasse ou les « touches » du piano.
Tu peux aussi avoir l’impression de (presque) pouvoir toucher les musiciens si proches.
En fait, ce n’est pas toi qui touches la musique, mais c’est elle qui te touche.
Au cours d’un concert plus qu’à l’écoute d’un CD, tu touches presque du doigt ce qui te touche.
- L’ouïe
Si le son est bien réglé***, tu perçois les souffles, les soupirs, les roucoulements, les cris parfois, les grincements, les battements, les frottements, les sifflements……Tout cela participe à ton intimité avec les musiciens, bien plus nettement que sur un disque.
De leur côté les artistes prennent le pouls de la salle en écoutant les manifestations diverses : paroles, cris, huées, applaudissements ou silence.
Nous les entendons et ils nous entendent…
On se demande parfois s’ils ont des doutes sur la signification d’un silence : est-il le fait d’une écoute religieuse, d’une indifférence ou d’une marque de politesse à la place de sifflements ?
Nous entendons aussi les réactions de nos congénères et avons tendance à y participer de la même façon (battre la mesure par exemple).
- La vue
Alors là, dans le match CD contre Musique Live, la suprématie de l’œil est incontestable. La présence physique des artistes se savoure d’abord avec la vue
Nous observons les manifestations non verbales entre les musiciens, leurs jeux, leurs échanges de regards, de mimiques, de sourires, et nous y répondons avec enthousiasme.
De même les musiciens, nous scrutent, l’œil est parfois inquiet au début, leurs regards se rassurent au fur et à mesure que l’assistance devient démonstrative.
Egalement nous regardons puis souvent imitons nos voisins dans leurs gestes et mouvements, nous levant, dansant, applaudissant.
Ils sont là, on les voit, ils nous voient, nous nous voyons, nous échangeons.
Ici et maintenant
Les cinq sens en alerte maximum, les vibrations ouvrent les chakras favorisant la compréhension mutuelle, la fusion, en un mot le PARTAGE !!!!
Des « olas » de plaisir parcourent le public du premier au dernier rang
Et oui, amis confinés c’est le PARTAGE qui nous manque : partage entre artistes et public, entre membres du public, avec les amis.
Le « LIVE» nous donne le sentiment d’avoir vécu ensemble un moment unique qui dans la très grande majorité des cas nous remplit de bonheur et de joie.
***Petit aparté sur le réglage du son – Bien sûr nous avons tous nos instruments de prédilection, mais je m’insurge ici contre « le gros son » accordé à la batterie au détriment des autres instruments. Par exemple lors du dernier concert « Live » de Daniel Zimmermann vécu le 20/02/2020 au Rocher de Palmer, il y avait 7 micros sur la batterie, un batteur costaud ne ménageant pas ses mouvements, résultat on entendait mal le piano ainsi que parfois le leader au trombone. Les subtilités, nuances et autres moments de partage sont gâchés. Heureusement qu’il y avait les solos !!!