Par Philippe Desmond.

Cinéma Jean Eustache, Pessac, le jeudi 8 février 2018

lubat-pere-et-fils-un-film-et-une-histoire-de-transmission

On connaît tous Bernard Lubat, mais en vérité seulement le musicien, l’homme public, engagé, dégagé des convenances.

On connaît sa lutte continue, sa quête perpétuelle des réponses aux mille questions qu’il se pose. Le personnage peut parfois dérouter, intimider, agacer, il est adulé par les uns détesté par d’autres, il ne laisse jamais indifférent. Tout cela on le sait.

Dans le film documentaire réalisé par Laure Duthilleul sa compagne, il s’agit d’autre chose. On y parle du père qu’il est, celui de Louis Lubat. Père indissociable du musicien, du militant mais tellement père. Le sujet c’est la transmission, de la vie, du savoir, du non savoir. Laure avec ses yeux de compagne et de mère a filmé au long des années, des dix ans de Louis à ses vingt ans, des tranches de vie où l’amour et l’émotion sont tellement présents mais par petites touches, par suggestion, sans pathos.

On y voit ce travail, car c’en est un, de passage de témoin avec le fils et ses potes d’Uzeste. « Au Conversatoire d’Uzeste on joue pour apprendre » et non le contraire. On est tellement loin de « Whiplash » qu’on ne peut qu’y penser, tant ici il y a de l’humanité dans ces échanges, ces engueulades !

Pour nous les amateurs de musique on y découvre aussi les coulisses – à Uzeste il n’y a pas de backstage – on y retrouve les chaudes journées d’été du festival, les bals endiablés où selon Bernard des Africains pourraient dire « t’as vu ces blancs on dirait des noirs ». On reconnaît ceux qui font (sur)vivre cet événement. On voit grandir los Gojats, ces enfants qu’on a la chance de pouvoir écouter souvent, on retrouve des têtes connues, Michel Portal, Archie Shepp, Louis Sclavis.

Mais surtout on découvre un autre Bernard Lubat, le papa, exigeant mais plein de tendresse ce que ses yeux trahissent souvent dans le film. On mesure la relation fusionnelle entre un père et un fils alimentée par une passion commune. C’est très beau.

Merci Laure Duthilleul de nous avoir dévoilé un peu de cette intimité familiale qui devrait donner des idées ou parfois même des regrets aux pères que nous sommes.

Si vous avez l’occasion de voir ce film – rare – allez-y vous serez forcément touchés mais aussi amusés.

 

durée : 90 minutes