par Philippe Desmond.

Caillou du Jardin Botanique, Bordeaux le 16 février 2018.

On le sait, le jazz est multiple, il l’est devenu évoluant au gré des années, des artistes, de leur créativité, de leurs influences. Mais le jazz originel vit toujours et trouve encore son public. La Gazette Bleue de mai 2017 avait souligné ce fait. Garants du old jazz certains groupes ne restent pas pour autant dans la nostalgie surannée et continue à le faire vivre et même évoluer. C’est le cas du Jazz River Trio qui ce soir, dans un Caillou du Jardin Botanique complet, célèbre la sortie de son deuxième album. Seize titres très éclectiques. Le nom du groupe vient des orchestres « Riverboat » qui jouaient sur le Mississippi au début du siècle dernier.

Fred Dupin est au sousaphone*,

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Bertrand Tessier au sax ténor

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et Stéphane Borde au banjo.

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On est loin du trio « moderne » piano, contrebasse, batterie. Ainsi on pourrait se croire cantonné à un répertoire ancien mais le groupe affiche le slogan « old and all jazz » , pas si simple.

Certes le concert débute sur un titre de Larry Shields, un clarinettiste de Dixieland, « Tenor Sax Marmelade » et on comprend de suite la structure du groupe, du moins on le croit. Rythmique banjo sousaphone et sax en soliste. Le son est vintage marqué par le son si unique du banjo qui paraît minuscule dans les bras du géant Borde, la contrebasse buccale de Fred est sautillante, étonnant pour un enchevêtrement de tuyauteries de quinze kilos.

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Les compos de la même époque défilent, Sigmund Romberg, Hoagy Carmichael. Un voyage dans le passé mais petit à petit un passé qui se rapproche. Avec « Indiana » ce standard NO traditionnel enchaîné sur sa version plus moderne remaniée par Miles Davis en 1947 (créditée par erreur à Charlie Parker) « Donna Lee ». Et déjà la structure initiale est bousculée, le sousaphone devenant soliste, le banjo aussi, les deux autres à tour de rôle assurant la rythmique. Une utilisation dynamique du trio.

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Petit à petit on s’écarte de NO avec d’abord « Parfum des Iles » une biguine, et oui ça marche, puis une valse, la légendaire « Indifférence » de Tony Murena où Fred au sousaphone joue la mélodie avec presque légèreté. Surgit alors Chick Corea grâce à Spain et de surprenants unissons sousa-sax sur les doubles croches du gimmick ciselé du thème. On ne s’attend pas à un tel usage de ce gros cuivre, cet instrument de fanfare,  mais enroulé autour du corps de Fred Dupin il prend ici une autre dimension. Du Chick Corea sans piano il faut oser mais du ragtime ! C’est chose faite avec « Temptation Rag » version tuba. Du piano buccal dira un ami.

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Mais ce n’est pas trop dur de souffler dans ce gros machin ? Mais non, répond Fred, il est déjà plein d’air, il suffit de le faire vibrer. Ah oui, facile…

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Encore une surprise avec une reprise de… Liszt, soyons fous, « Liebestraum ». Un petit Django au passage pour swinguer « Swing Gitan » sans guitare bien sûr mais avec un banjo volubile ; oui c’est un vrai instrument de musique pas un machin folklo qui se joue seulement en canotier.

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Retour dans les années 30 avec « J’ai deux amours » couplet au sousaphone et refrain au sax, ce sax qui se soir a un ton très doux, velouté.

Rappel à 2000 à l’heure au banjo avec un Stéphane Borde qui mitraille et mettrait la honte en vitesse pure au gamin consanguin de Délivrance. Caillou en surchauffe toute la soirée.

Une alliance de tradition et de modernité comme l’illustrent aussi la cohabitation entre des instruments anciens et des e-tablettes de partitions ou encore ce bec de sax alto en résine obtenu par impression 3D.

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Osez le Jazz river Trio en live quand vous en avez l’occasion c’est du plaisir musical assuré.

*Sousaphone en hommage au chef de fanfare américain John-Philip Sousa ou aussi soubassophone

https://www.jazzrivertrio.com/

https://blog.lagazettebleuedactionjazz.fr/gazette-bleue-n22-mai-2017/

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