par Philippe Desmond, photos Christine Sardaine « Kiswing 33 ».

Sortie 13, Pessac samedi 14 novembre 2019.

S’il y a bien un groupe que je ne voulais pas rater c’est les Headbangers. J’avais besoin de recharger ma dose d’énergie brute et électrique surtout après l’annulation l’avant veille du concert de Jean-Luc Ponty et son groupe en mode jazz rock des 70’s, scotchés à Paris sans train pour Bordeaux.

Headbangers c’est d’abord pour moi la grosse claque du premier album « The Dark Side of a Love Affair » sorti en 2016, la deuxième joue étant servie l’année suivante sur la scène du Parc Guadet au Saint-Emilion Jazz Festival. Une musique flamboyante proposée par Nicolas Gardel, terrible trompettiste, et sa bande de furieux.

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Dans le caisson noir de Sortie 13, ce parallélépipède brut dédié aux musiques amplifiées, ils sont six pour nous en mettre plein les oreilles et faire vibrer nos carcasses. Nicolas Gardel (Trompette, synthé), Dorian Dutech (guitare), Jérôme Martineau-Ricotti (batterie), Thibaud Dufoy (claviers), Philippe « Waterballs » Burneau (basse et synthé) et David Pautric (sax ténor, remplaçant de luxe de Ferdinand Doumerc).

Définir cette musique, la classer dans une catégorie, c’est comme essayer de rentrer un canot pneumatique gonflé dans le coffre d’une voiture, ça dépasse de partout, vers le jazz, c’en est de par la liberté des impros, la construction, mais aussi vers le rock et même le hard rock ou pire (!) le heavy métal par la folle énergie qui se dégage, vers le funk avec un speed groove de dingue souvent, l’électro avec des boucles et des infra-basses.

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Quand on lit sur le site du groupe les influences de Nicolas Gardel et qu’on regarde son parcours on comprend de suite l’éclectisme du bonhomme. On comprend ainsi comment cette musique est moderne et peut être attractive pour de nouvelles générations sans renier les références plus anciennes. Ceux qui comme moi ont été biberonnés au rock de Led Zep (un des titres m’a fait penser à eux, « Last Day on Earth » un blues slow de derrière les fagots, chanté sur le premier album mais pas ici) tout en écoutant Miles et ses disciples comme Freddy Hubbard (un titre ce soir , le pêchu « Mr Clean ») retrouvent leurs marques. Les plus jeunes se nourrissent des boucles électros comme dans ce long chorus de Nicolas Gardel sur un tapis de machines faisant monter la fièvre jusqu’à la transe.

D’ailleurs lui même ne sais pas définir sa musique, il nous le dit, « aidez-moi ! ».  Il en a fait un titre « What is this thing called jazz » une compo endiablée mêlant l’écriture jazz au beat du rock.

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Et quel trompettiste nous avons là, pas avare de ses notes, même si comme Miles il a à côté de lui un synthé dont lui n’abuse pas. Créatif, virtuose sans emphase, cliché ou pas Nicolas étant toulousain, j’entends souvent dans son jeu l’Espagne pousser un peu sa corne, comme aurait dit l’ami Claude. J’entends les clarines, j’entends le sud. Quant aux unissons de la trompette avec le sax ténor impeccable de David Pautric il vous font croire à l’arrivée d’un big band. D’autant que derrière ou à côté ça fait plus que tricoter, ça barde. La rythmique marquée par le beat incessant de la grosse caisse,  l’omniprésence de la basse (ah qu’elle est belle cette Rickenbacker !), les riffs de guitare, les envolées au synthé en mode Rhodes (un chorus invraisemblable en cadeau) ou orgue vous traversent le corps déclenchant des migrations de fourmis dans les jambes.  Mon dieu que ça fait du bien ce type de massage corporel !

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Même les ballades ne survivent pas longtemps à la puissance maîtrisée du groupe, le ton montant petit à petit, implacable. Six musiciens à fond dans leur musique. Vous avez compris, je kiffe le truc, je trouve ça épatant, très bath (moi aussi je mixe les influences) et visiblement je ne suis pas le seul, ça vibrait pas mal hier soir à Sortie 13.

Un concert des Headbangers sans « Bacchus » est inenvisageable, leur tube, leur hymne ! Il faudra attendre le second rappel et même mendier ce titre que le groupe joue maintenant en mode gag, avec faux début, fausse fin mais bien juste au milieu. A ce sujet il me revient cette anecdote lors du festival de Saint-Emilion 2017 évoqué plus haut où un groupe de fans, dont je faisais partie, réclamait à tue tête « Bacchus, Bacchus, Bacchus » et cette personne s’approchant de moi me demandant « mais qui est ce Baptiste que vous réclamez ? »

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Photo PhD

Nicolas Gardel & The Headbangers « The Irøn Age »

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