Créon ( 33) / salle culturelle / 17 octobre 2019

Texte : Annie Robert
Photos : Philippe Marzat

Redémarrage tout en charme et en souplesse harmonieuse pour les jeudis du jazz de l’association Larural
Après le long temps des vacances, voici venu celui des retrouvailles pour les amoureux de musique dans l’écrin de la bastide de Créon. Quatre ou cinq fois par an, les fans ou les curieux viennent passer un moment convivial, chaleureux autour d’un plat ou d’un verre et surtout découvrir des artistes. La programmation y est toujours intéressante, surprenante et variée, les prix légers et les sourires des bénévoles gratuits et sans arrière pensée. Et ce soir, ils sont nombreux, les amoureux, à se rejoindre dans ce jeudi pluvieux….

Sur la scène colorée de violine et de noir, voici de quoi oublier le temps automnal et reprendre de l’énergie: une jeune femme ( que pour ma part je découvre..) à la fois jeune et déjà chevronnée ( enseignante au Ciam), enfant du pays, tombée petite dans la marmite du jazz … Rassurons nous, c’est vraiment son seul point commun avec Obélix.
Célia Marissal est en effet toute en délicatesse et en légèreté dansante. La voix déplie une large tessiture, fort belle, caressante, ample, très libre comme la gestuelle qui l’accompagne. Le scat en est son ossature, elle s’y plonge non pas par obligation mais par envie gourmande. Et c’est vraiment une friandise qu’elle nous offre à travers ces reprises de standards mainstream certains très connus, d’autres plus rares. Un plaisir intemporel qui réchauffe bien et qui éloigne les frissons.
Autour d’elle, on retrouve avec un bonheur certain le piano si élégant, si délié, si dense de Serge Moulinier avec ses moments d’intro qui « fleurtent » avec le classique, ses accords complexes et surprenants, sa capacité à accompagner de façon enveloppante l’interprète qu’il met en valeur. Une belle section rythmique aussi, complice et assurée, avec la contrebasse d’Elodie Hey charnue mais pas trop appuyée et la batterie discrète et joyeuse d’Antoine Fillon.


Le quartet tourne rond et bon, s’élance comme une dentelle de fleurs, une écharpe de soie. Ces quatre là se trouvent facilement, se comprennent sans heurts; c’est comme un voile tendre sur des yeux fatigués, une caresse légère sur une main lasse, un fil tonifiant relié à la vie. A travers ces chansons d’amour, de séparation, de découverte ou d’affirmation, ils nous offrent de la belle ouvrage, des points cousus mains, des sequins multicolores vibrants qui font soupirer d’aise. Chaque instrumentiste a le temps de développer son chorus de belle manière mais sans empiéter sur les autres et le groupe dans un véritable respect mutuel.

Le set est parfaitement équilibré, allant de ballades tendres à du swing revisité et endiablé avec toujours un scat subtil, des arrangements au cordeau, des finales ciselées, des départs toniques et variés et une belle aisance technique.

On est en terrain connu et rassurant mais pas seulement car au milieu se glissent des petites fêlures vocales ou instrumentales, des cassures, des retenues bleutées qui intensifient le propos et le hissent plus haut ( oh le si joli Afro blue).
Paradoxalement, c’est peut être, le duo voix piano qui m’a le plus saisi : un vrai dialogue émouvant, entrelacé de doutes, de jubilations, de regrets amoureux, de renaissance solaire. Pas de scat, juste la voix intense et vibrante, la partition sublimée et la douceur feutrée des touches d’ivoire. Quelque chose à la fois de très pur et de très prenant qui laisse une impression forte.

Le quartet enchaîne sur un ragtime swinguant et une samba joyeuse où la section rythmique reprend tous ses droits. Célia Marissal rendra ensuite un bel hommage à Maurane avec le morceau de Starmania qui l’a rendue célèbre « la serveuse automate », revisité en mode jazz, très habité mais sans effets appuyés.
Le concert se termine sur deux morceaux de swing bien dodu, où le scat fait à nouveau merveille.
Et on finit séduit, heureux, enveloppé de rubans multicolores et porteurs de belles énergies, ravi par une belle soirée.

C’est bon comme tout le jazz de proximité, surtout quand il a cette qualité… et cette sincérité émouvante       !!

Prochaine soirée le 19 décembre avec Soul Jazz Rebels

 

Et n’oubliez pas, bientôt le festival Jazz à Caudéran organisé par Action Jazz !

Affiche PROG-2019-compresse

PM carte Action-Jazz copie