Texte et photos Philippe Desmond.

L’Apollo, Bordeaux mercredi 11 juillet 2018.

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C’est l’été à Bordeaux, et ailleurs aussi, le début des vacances scolaires, le bac interminable est enfin fini mais pas encore le глобальной , oui le mondial de foot. Bref tout le monde est lâché dans la nature ou fixé devant son écran, bière à la main, et pour une fois on respire à l’Apollo !

Les amateurs de jazz sont là, pour Roger Biwandu bien sûr, pour ses deux acolytes, Nolwenn Leizour et Hervé Saint-Guirons, mais aussi pour une rare fois, Frédéric Borey au sax ténor.

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Saxophoniste vedette pour un hommage à un pianiste, pas n’importe lequel, une légende Thelonious Monk. Combien de titres devenus des standards celui-ci a t-il composés ? Que dire de son apport au jazz moderne, au be bop qu’il délaissa ensuite pour explorer d’autres univers, tragiques à la fin. Je ne me souviens pas avoir connu une carte blanche de Roger dédiée à cette artiste, il ne fallait donc pas rater ça, Fred venant pimenter le tout. Petite chambrée donc mais auditoire de qualité.

C’est le révérend Saint-Guirons, comme le chambre Roger, qui endosse ce soir la robe de bure du moine et oui, Monk, le moine en Anglais (et non pas le singe, Benjamin…). Piano électrique certes, ici le seul meuble étant un billard, mais piano efficace sous les doigts d’Hervé. Il va nous faire des choses bien sympathiques et parfois insolites.

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A sa droite la discrète personne, mais bien présente contrebassiste, Nolwenn Leizour. La patronne, l’impératrice, suivant l’humeur du boss – je vous évite les surnoms moins glorieux – la preuve elle est souvent à ses côtés.

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Ce week-end ils étaient d’ailleurs ensemble à Minsk en Biélorussie pour un festival, en trio avec la tonitruante Camélia Ben Naceur. Et oui pour ce qui l’ignoreraient encore à l’Apollo c’est un privilège d’entendre ces musiciens là ! A propos si vous voyez traîner dans un aéroport les cymbales de Roger, merci de les lui rapporter, Air France les a perdues…

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Et ce soir l’affaire tourne très bien même si Roger Biwandu est venu léger, caisse claire, grosse caisse et cymbales – il lui en reste – démontrant que l’habit ne fait pas le monk car faire autant avec si peu me fascine toujours. Car il s’agit bien de musique avec les baguettes, pas seulement de la rythmique pure, des unissons avec le sax ou le piano, des contre-chants, des duels, c’est terrifique. Du plaisir pur à entendre et à voir.

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Et donc au sax ténor -un Selmer vintage de 1939 à la patine superbe – celui qui fut bordelais et prof au Conservatoire pendant quatre ans au début de cette décennie. Discographie personnelle importante, notamment avec le super projet « Lucky Dog » récemment joué à Respire Jazz en Charente, et impressionnante comme sideman… en particulier avec un certain Biwandu sur l’album « From Palmer » en 2010. Fred Borey c’est le timbre pur du ténor, naturel, il en tire tous les sons avec virtuosité et engagement corporel mais sans exhibition. Très volubile, il reste toujours dans ses chorus dans l’esprit du thème, ne déroutant pas les novices et régalant aussi les autres.

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Le quartet matche parfaitement pendant que Croates et Anglais en décousent, certains ayant préféré cette option pour la soirée. Pas de problème à l’Apollo si souvent bondé, pas de quantité ce soir mais de la qualité, d’écoute notamment. Caroline la maîtresse du lieu en profite même, une fois n’est pas coutume, pour assister au concert aux premières loges et visiblement elle apprécie ! Pas le genre à aller voir les musiciens pour leur demander de jouer moins fort, oui ça existe.

 

Les standards déroulent, on connaît tous l’oeuvre de Monk même sans le savoir tant il a été joué et repris. Le swing de « In Walked Bud », la profonde et éternelle ballade « ‘Round Midnight » bien sûr, le sautillant « Well you Needn’t » …le choix dans le si vaste répertoire est complet et ce quartet de circonstance le déroule avec verve.

Une soirée de jazz bien cool avant d’attaquer la frénésie des festivals de l’été…

Set list ;

In Walked Bud

Think Of One

Evidence

‘Round Midnight

Straight No Chaser

Bye Ya

Hackensax

Four In One

Well you Needn’t

I Mean You