BAPTISTE TROTIGNON – BODY AND SOUL
5 étoiles
Label Paradis Improvisé – Paru le 09 Décembre 2022
Chronique de Martine Omiécinski le 24 janvier 2023
Baptiste TROTIGNON : piano solo
On ne présente plus Baptiste TROTIGNON, un de nos meilleurs pianiste de jazz, le plus jeune qu’il m’ait été donné d’écouter en concert (ce quarantenaire a débuté la scène très tôt : premiers concerts à 16 ans !).
Le label « Paradis Improvisé » a proposé à Baptiste (comme à quelques autres pianistes triés sur le volet) de jouer en totale liberté, seul au Steinway, dans un appartement de la rue Paradis à Marseille.
Il a choisi de revisiter 10 standards
coups de cœur faisant partie de son socle jazzistique. Leurs échos résonnent en nous pour la plupart mais surtout son interprétation débridée et sensible nous transporte dans son univers : un équilibre subtil entre fidélité et improvisation. C’est la touche « Trotignon » qui réchauffe le corps et l’âme !
« Body and Soul » : de Johny GREEN reprise notamment par Louis ARMSTRONG. Cette ballade jouée par Baptiste nous enveloppe de douceur grâce à la légèreté qu’il apporte en étirant les notes jusqu’à un final totalement aérien.
« All the Things You Are » : j’aime les digressions habiles de la main droite avec des accents « Bouleziens » et « Debussiens » mêlés avec harmonie aux touches plus jazzy
« My little Suede Shoes » et « Passport » : Ces deux compositions de Charlie PARKER, clin d’œil à Bird et à l’époque foisonnante du Bebop jaillissent sous les doigts de Baptiste avec maestria, les notes sont tantôt frappées, tantôt fluides dans une interprétation très libre : un régal !
« You Go To My Head » : Cette belle mélodie chantée par de nombreux artistes de Billie HOLIDAY à Vanessa PARADIS et IGGY POP est jouée ici avec beaucoup d’émotion tendre.
« Moanin » un incontournable d’Art BLAKEY et des Jazz Messengers composé par le pianiste du groupe nous surprend ici par la modernité du jeu et l’ampleur des « graves ».
« There Never Be Another You » : reprise à la trompette par Chet BAKER , amenée ailleurs par Baptiste : main gauche à l’ancrage frappant les notes et main droite alerte jusqu’à un final volubile
« Emily » : joué et chanté par Bill EVANS et « So in Love » composé par Cole PORTER nous inondent d’émotion grâce au so beautiful « toucher » de Baptiste (lyrisme et sensibilité dignes de Bill EVANS).
« Chega de Saudade » d’Antonio Carlos JOBIM : quelle bonne idée de finir l’album par ce morceau brésilien où éclate le groove de Baptiste. Cette proposition sans cuivre ni guitare ni chant comme nous la connaissons est un bijou à l’état pur ciselé de mains de maître.
Bref, vous l’aurez compris, Baptiste TROTIGNON a brillamment réussi le pari d’exhaler de nouveaux parfums et de nouvelles nuances de ces « standards » grâce à sa sensibilité et à sa liberté de ton spécifiques.
A écouter sans modération !
