Andrea Glockner Quartet feat. Joseph Bowie
« Across the Lines »
par Philippe Desmond
Andrea Glockner : trompette basse, trombone, tambourin / Santiago Fernandez : piano, claviers / Silvia Bolognesi : contrebasse, basse électrique / Alessandro Alarcon : batterie
Invité Joseph Bowie : trombone, voix, tambourin.
Sorti chez Dodicilune (Italie) Dodicilune – Andrea Glockner
Voilà un an lors d’un concert en prélude à la projection du film « 7/8 » (Lien ) relatant une histoire de jazz dramatique en Italie lors de la seconde guerre mondiale, Andrea Glockner nous avait proposé en avant première des compositions de cet album, pas encore enregistré à l’époque. Nous étions impatients de connaître la suite, la voilà !
Et elle comporte une belle surprise, la présence avec ce jeune groupe du vétéran Joseph Bowie membre de l’Ethnic Heritage Ensemble (vu à Floirac en 2004) et leader de Defunkt. Un invité de marque pour Andrea tromboniste lui aussi – plutôt à pistons – et surtout comme il le dit son grand père musical. Ils s’étaient rencontrés deux ans auparavant à Sienne où Andrea étudiait et le feeling était passé.
Andrea franco-italien a fait ses armes au Conservatoire de Bordeaux avant d’aller pousser ses pistons à l’Accademia Nazionale del Jazz de Sienne, au passage plus internationale que nationale. C’est là en effet qu’il a rencontré les membres de son quartet, l’italienne Silvia Bolognesi, l’italo-dominicain Santiago Fernandez et l’italo-suisse Alessandro Alarcon. Il a eu du nez, ou plutôt de l’oreille, ils sont excellents !
Pour son tout premier album, Andrea Glockner a composé tous les titres, certains avec le quartet et Joseph, à l’exception d’un seul d’Alessandro. Il ne cache pas ses influences auprès de John Coltrane, Pharoah Sanders et Joseph Bowie bien-sûr. Et ça s’entend, même si il y ajoute des notes funk, rock et hip hop. Tradition et modernité chez lui sont liées et ça aussi on le perçoit.
Le premier titre, « Tiatilae », une longue suite de plus de douze minutes, nous embarque dans un groove enivrant porté par la basse électrique et la batterie, le clavier délivrant un son vintage des 70’s ; Andrea s’appuie sur cette base pour de sa trompette basse (pas courante) chanter la mélodie puis la tordre en improvisation. Un titre très accrocheur qui rassure de suite sur la qualité des musiciens qui dans le morceau suivant « Improvisation I » sont rejoints par Joseph Bowie. La patte Ethnic très free nous saute de suite dans les oreilles, le texte parlé par David nous élevant dans la galaxie ; pour amateurs du genre !
Voilà « Swiss Interval » lui aussi déroulant son propos pendant plus de douze minutes, Pharoah n’est pas bien loin, ça groove au son cuivré si particulier de la trompette basse qui est la signature d’Andrea. « Choice » nous ramène vers un be bop plus léger, plus swing parfois oserais-je dire ; le piano y trouve sa place dialoguant gaiement avec la trompette.
Quatre autres titres que je vous laisse découvrir, Joseph Bowie amenant son univers dans certains ou encore sa folie comme pour « Recovery » . Courageux les jeunes de se frotter ainsi à ce maître et d’être plus qu’à la hauteur.
L’album se conclut avec « Playground » un titre très soul à la touche hip hop donnée par la voix de Bowie. C’est chaud et ça balance terrible comme nous les boomers disions, ça déchire diront d’autres.
Bravo à Andrea et sa bande qui dès ce premier album proposent une œuvre pleine de personnalité, n’hésitant pas à prendre des risques. Ils ont toute la vie devant eux pour aller encore plus loin dans leurs envies.