Virginie Daïdé Quartet
« When We’re Strolling »
Par Martine Omiécinski
5 étoiles
Label : Du Savon dans les Yeux (DSY) sortie le 07 Février 2024
Virginie Daïdé : Saxophone ténor, compositions 8 morceaux sur 11 / Nicolas Dri : Piano, composition (10) / Thomas Posner : Contrebasse, composition (6) / Tony Rabeson : Batterie, percussions, composition (4)
Agréables retrouvailles avec Virginie Daïdé, l’une de nos saxophonistes hexagonales éminentes (avec Sophie Alour et Jeanne Michard) dont j’avais beaucoup aimé l’album précédent « Moods » (voir chronique du 21/04/23 sur Action Jazz.fr sur lequel j’abordais aussi son parcours musical). De plus Virginie Daïdé a de nouveau rassemblé son même quartet pour notre plus grand plaisir.
La particularité de ce projet est que Virginie a choisi de favoriser « l’ici et maintenant » dans son processus créatif…..lors de ses promenades à vélo dans Paris (d’où le titre « When We’re Strolling ») en transcrivant en direct sur un dictaphone des éléments de composition inspirés par des sons, mouvements, couleurs glanés dans la rue … De plus, elle a demandé 1 morceau à chacun de ses 3 compagnons de jeu créé dans des conditions similaires aux siennes pour partager les ressentis. Le tout donne un album vivant, en mouvement, plein de sonorités colorées.
Comme sur l’album précédent, l’importance de chacun de ses 3 acolytes est bien audible, l’excellente prise de son équilibrée du Studio Recall That’s Sound contribuant notamment à cela.
Mes morceaux préférés :
« Last Minute » : Thomas Posner entame à la contrebasse de son toucher sensible en étirant les notes, Tony Rabeson les reprend plus appuyées puis Virginie au ténor chaleureusement les espace avec silences, les harmonies étant reprises par Nicolas Dri au piano de façon plus enchainées. Saxo et contrebasse rivalisent de liberté de ton.
« Ginger Blues » : Blues swingant ou rythmique (remarquablement en place) et saxo se lancent dans un dialogue plein d’énergie et de groove que ne renie pas le piano…épatant !
« Cerise, pêche, prune, abricot » de Tony Rabeson. Il a certainement croisé dans son périple à vélo un étal avec tous ces fruits les restituant en notes tout aussi vives, colorées et hardies sur une contrebasse éloquente, Virginie voltige sur cette mélodie diablement dansante que Nicolas tempère vers un final étonnant en égrenant les notes une à une !
« Forgetting » : Magnifique chorus de ténor de Virginie et dialogue charnel entre la contrebasse de Thomas toute en rondeur et le saxo suave et grave à la fois ; il n’y a pas de notes en trop, c’est intelligemment épuré.
« The Milkman on the Steps » intéressante composition de Thomas Posner : Le morceau est vif, énergique, le tempo haché, Tony nous fait un festival de baguettes et peaux comme il en a le secret, le piano sautille allègrement, le saxo s’enroule en volutes habiles.
« Gone » : Cette lente ballade commencée par une tendre et lyrique ouverture au ténor se poursuit par un dialogue très poétique entre piano et saxo, notons le toucher velours et aérien de Nicolas qui par ailleurs compose des musiques de relaxation (pas étonnant !).
« El Descarillador » de Nicolas Dri : Traduction : Le dérailleur…Encore une histoire de vélo sur lequel on s’élance en valsant, le saxo et le piano joutent tantôt dans la tradition du jazz, tantôt avec un jeu plus actuel, plus décomposé : brillant !
« Let’s Go To The Gig » : Gig vient de l’argot du jazz, on peut le traduire par job ou boulot concernant une prestation musicale en direct. Là, ils y vont sur des rythmes tropicaux/jazzy fort joyeux, la rythmique est vive avec un Tony jonglant avec ses mailloches et ses baguettes, Thomas fulgurant de précision et de groove en même temps, Nicolas fin et volubile, Virginie partant en joutes ondulantes très dansantes et tous très complices comme sur tous les autres morceaux, ce dernier étant particulièrement jubilatoire !
Bref, comme sur « Moods », l’album précédent, il m’a été difficile de faire des choix tant la palette est riche : les racines du jazz sont bien là, les sonorités très contemporaines, le métissage permanent, le jeu de Virginie et de ses musiciens est vibrant, donc on en redemande et si possible en Live !