Par Dom Imonk

Parue le 01 septembre 2014 dans la Gazette Bleue N° 6

THE KHU HAPPY

Découvrir un groupe en concert, sans connaître son disque, ou tout au plus une vidéo, c’est bien. C’est ce qui m’est arrivé tout récemment avec THE KHU, en concert il y a peu au Festival Jazz [at] Botanic (Bordeaux). Nous en sommes ressortis subjugués ! Certes, tous les morceaux de leur album « happy ? » ne furent pas joués, mais ceux que nous avons écoutés nous ont convaincus qu’on assistait là à quelque chose qui allait faire date…
Sur la page du groupe, on apprend, je les cite, que «…le khu était une sorte de bouclier et d’ancre spirituelle ». C’est un peu ce qu’on retrouvera dans leur musique. Un rythme assez puissant et presque intimidant, qui les protège en fait, mais duquel émane aussi une certaine spiritualité.
Le groupe est formé de quatre musiciens qui s’étaient retrouvés en 2011 à BREST, au sein du Nimbus Orchestra, dirigé alors par Steve Coleman, invité par Penn-Ar-Jazz, l’organisateur.
The KHU c’est Nicolas Péoc’h (sax alto, compositions), dit « Le Brestois », Johan Blanc (trombone, cloches, compositions) et les deux frères jumeaux rythmiques que sont Benoît Lugué à la basse et Vincent Sauve à la batterie. Ces deux derniers sont aussi membres du groupe FADA.
L’influence de Steve Coleman se retrouve certes dans leur musique, et ils la revendiquent. Le saxophoniste américain (et ses cinq éléments) avait d’ailleurs lui-même écrit «The Khu (Divine Will) » sur Def Trance Beat (Modalities Of Rhythm) – 1995.
Pourtant, on sent que THE KHU a tracé ses propres sentiers de recherches, dont on retrouve les senteurs tout au long des douze morceaux qui composent ce bien bel album. Nicolas Péoc’h et Johan Blanc s’en partagent les compositions fort bien écrites. Il y a une âme dans ces morceaux, elle émerge en créant par moment une transe rythmique. Ainsi, par une sorte d’allant arith-métrique obsédant, on est souvent aspiré dans un tourbillon de groove logique et inéluctable, pas de répit pour nous ! On ne résiste pas à la puissance de morceaux tels que « happy ? », « Le Brestois », « Khutchatchakhun » ou « Blues en Pi », mais il y en a d’autres. Et les morceaux plus « calmes » ne sont pas les moins addictifs, « Phosphorus », « Retour », « Chanda » etc…
Nous sommes captivés par la complicité des bois et cuivre, frères de souffle et d’envolées en vrilles lumineuses. Une aspersion atlantique anime les belles vagues du saxophone, qui tourbillonnent et s’établissent quelquefois en répétition insistante de flux et de reflux. Elles s’associent avec bonheur aux phrases alpines, profondes et généreuses du trombone, qui sont le trait d’union avec la rythmique qui gronde derrière. Même délicieuse connivence, quand un avisé « tic toc » de cloches lui fait de l’œil, nous rappelant Coleman…
Le pacte basse/batterie achève notre capture. Les jeux sont imbriqués l’un dans l’autre, et scellent une entente parfaite. C’est époustouflant. En toutes circonstances, ils réagissent instinctivement, au doigt et à l’œil, aux propositions des hommes du souffle, cette alchimie est fascinante. Nous voilà définitivement pris au piège de ce « Khu transe beat » ! Vivement une suite !

Dom Imonk

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