Par Philippe Desmond, photos Philippe Marzat.
South Town Jazz festival, jeudi 29 mars 2019.
En ce gros troisième jour du festival on célèbre le trombone. Rencontre le matin avec les scolaires pour présenter l’instrument avec Baptiste Techer, en excellent conférencier, accompagné par le Swingin’ Bayonne, masterclass avec les cuivres du Swing Bones l’après-midi.
Entre autres choses j’aurais ainsi appris que l’ancêtre du trombone est le « sacqueboute » (tire et pousse) au XVe siècle.
Dans l’après-midi, avec le Swingin’ Bayonne d’Arnaud Labastie, Patrick Quillart et Jean Duverdier visites aux enfants de l’école maternelle puis aux anciens de l’EHPAD.
Le soir grand concert du Swing Bones cette formation crée en 2016, pas loin d’ici lors de « Trombone en Chalosse », en hommage au Four Bones de François « Frick » Guin la référence du trombone en France pendant des décennies. Il a joué avec les plus grands du jazz et de la variété, Ray Charles, Lionel Hampton, Duke, Dizzy, Michel Legrand… et aussi Brel, Bécaud, Cab Calloway, même Johnny ! François, maintenant retiré des affaires, est là, il a même guidé avec précision la répétition de l’après-midi, le répertoire choisi laissant une place majeure à ses compositions et ses arrangements. Très en forme et déterminé avec ses 80 ans.
Swing Bones c’est d’abord des bones, pas des os, mais des trombones, quatre exactement : Le créateur Olivier Lachurie, le talent qui monte Baptiste Techer, l’expérimenté et polyvalent Jérôme Capdepont et le presque new-orléanais tant il va – et joue – souvent là-bas, Jérôme Laborde.
C’est aussi du swing avec une section rythmique solide, l’éclectique Julien Duthu à la contrebasse, l’indispensable Guillaume Nouaux à la batterie et ce soir exceptionnellement le remplaçant de luxe Arnaud Labastie au piano, Thierry Gonzalez étant empêché.
On pourrait largement s’en contenter mais ici à Soustons on gâte le public alors un saxophoniste a été invité, tant qu’à faire un très bon, Paul Chéron. Un octet donc.
Première partie sans ce dernier, sauf sur l’ultime titre, et hommage à la musique de François Guin, caché au milieu du public mais qui veille au grain.
Il viendra quand même dire deux mots, oui enfin beaucoup plus ! Hommage surtout au trombone, cet instrument plus souvent d’accompagnement que de soliste, sa collègue plus sophistiquée la trompette lui volant la vedette. Pourtant que c’est beau le trombone, cette couleur chaude, ces glissandos montants ou descendants de la coulisse, ce velouté qui vous enrobe ou cette puissance sonore qui vous traverse. Multiplié par 4 c’est un timbre inimitable et de plus un vrai plaisir visuel. Quand le répertoire est taillé sur mesure (bravo Frick) pour lui il devient même élégant et donc peut tenir le devant de la scène avec classe.
Quelle bonne idée d’avoir ressuscité une telle formation. Le résultat est splendide, flamboyant ; portés par une rythmique dynamique de haute volée, les quatre cuivres s’en donnent à cœur joie, des unissons, des harmonies sublimes et des arrangements surprenants de finesse et d’originalité, du swing ! Avant ce concert j’avais tendance à dire que le trombone était le seul instrument qui supportait l’imperfection – légère entendons-nous bien – la coulisse n’ayant pas de frette ou de repère, mais il supporte aussi la perfection comme ce soir. Mille excuses à mes amis trombonistes pour ce commentaire de béotien !
Baptiste Techer invitera même le jeune Antonin Puyo un de ses élèves, et membre du Little Jazz Combo, à venir jouer un titre en duo avec lui. C’est ça aussi South Town, la famille, celle des musiciens, ici elle existe vraiment.
La seconde partie avec Paul Chéron va être un hommage à un autre grand mais lui disparu depuis déjà plus de 20 ans, le saxophoniste Guy Lafitte qui fut son professeur. Paul avec son ténor – à la patine superbe – nous fait naviguer entre le velouté onctueux de Lester Young et l’énergie de Coleman Hawkins, capable de vous envelopper suavement d’harmonies ou de dynamiter le swing. Voilà entre autres « Timo » de Guy Lafitte arrangé par François Guin.
Le mariage, poly-gammes, avec les trombones est des plus réussis, quand on ferme les yeux on entend souvent un big band ; voyez les stars trompettes que vous n’êtes pas si indispensables que ça ! De plus Paul Chéron est venu chargé de cadeaux avec des titres et des arrangements. Que c’est beau le « middle jazz », le « mainstream » tous ces noms inventés par quelques intellectuels qui regardent ça de loin. En attendant nous on s’éclate ! Si en plus Arnaud se met à swinguer comme Count et Guillaume à frapper comme Buddy c’est le bonheur.
Et comme tous les soirs les élèves des classes CHAM, des 4ème, sont venus animer le pré-concert et apporter leur belle fraîcheur.
Trois soirées et déjà trois réussites, vivement demain !
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