Nathan Mollet trio à la Source du Bouscat
Par Philippe Desmond
Médiathèque de la Source, le Bouscat (33), vendredi 16 mai 2025.
Quand fin 2024 le service culturel du Bouscat a informé Action Jazz de ce concert pour que nous en organisions l’avant-scène de présentation, j’avoue que j’ai découvert l’existence de ce trio et de son jeune leader le pianiste Nathan Mollet. Dès que je suis allé me renseigner sur ce musicien, j’ai réalisé que je le connaissais un peu, je l’avais vu participer – et même photographié – à la fameuse jam du Baiser Salé, animée depuis plus de trente ans par François Constantin, un lundi de mai 2023. Nathan avait époustouflé tout le monde sur deux titres et je me souvenais de son passage et de sa tignasse caractéristique. Depuis il fréquente régulièrement ce club mythique de Paris.
En janvier dernier, au tremplin Action Jazz, le groupe Wowski remportait le Grand Prix du jury et le prix FIP et c’est justement Nathan qui était au clavier, confirmant son talent.
Nathan, né en 2003, est pianiste mais aussi compositeur ce qui est moins courant, il a sorti son premier album de compositions en 2021. Il joue souvent en solo mais il a donc son trio, son père Dominique Mollet tenant la contrebasse et Elvire Jouve la batterie. Dominique est un musicien reconnu, jouant avec Géraldine Laurent, Julien Alour, Daniel John Martin et même Calvin Russel. Elvire, formée notamment par Franck Agulhon et André Charlier, est une batteuse éclectique ; rock, chanson, jazz, théâtre, danse. Elle a accompagné Géraldine Laurent, Raphaël Imbert et fait partie du dernier projet en quartet d’Eric Séva. Lien : Eric Séva quartet
Ce soir la médiathèque la Source du Bouscat nous accueille. La grande et belle salle est aménagée en format concert, avec un coin réservé a l’avant scène et une partie pour recevoir le cocktail dînatoire qui lui succède. Et oui ici on fait les choses bien, trois prestations pour la même soirée !
On fait même très bien les choses, preuve en est le Steinway de concert qui trône sur la scène. Nathan apprécie.
Avant-scène express en une vingtaine de minutes pour parler du trio piano-contrebasse-batterie en jazz, d’Art Tatum à Bojan Z en passant par Bill Evans, Brad Mehldau, Monty Alexander, the Bad Plus. Présentation du trio du soir devant un public très attentif. Moment convivial autour d’un verre, de quelques gourmandises et place au concert.
Ce type de trio, dans sa forme la plus classique, met souvent en valeur le piano, les deux autres instruments assurant le soutien rythmique, mais de plus en plus de telles formations sortent de ce modèle. C’est le cas ce soir, dès le premier titre on comprend qu’on est ici dans la modernité. Certes, si c’est bien le piano qui mène, contrebasse et batterie ne se contentent pas de l’accompagner, elles jouent avec lui, elles mènent leur propre vie au service de l’ensemble. La connexion entre les musiciens est évidente, l’attention est permanente, la musique se créant autour des thèmes au gré de chacun. Interactions vigoureuses dès le premier titre, fraîcheur lyrique de Nathan, assise dynamique de Dominique, créativité et sens du détail pour Elvire, nous voilà partis pour un concert remarquable d’inventivité.
Émouvant de voir sur scène partager ce moment un fils et son père, le second s’effaçant devant le premier. Le trio nous joue une partie de son seul album paru mais nous dévoile aussi de nouvelles créations pour un futur CD prévu en 2026. On retiendra notamment la douce « Ernestine » et surtout le dramatique « City phobia » décrivant avec violence les impressions de Nathan, professionnellement installé à Paris, loin de sa campagne de l’Allier. On y frise le free pour décrire musicalement la folle agitation de la capitale, du grand art. Le retour au calme illustré par les gouttes de piano en véritable concerto et les clochettes de percussions est d’une réelle beauté.
Très beau succès auprès du public bouscatais disons bien mûr et éternel débat pour certains sur le fait que ce soit ou non du jazz ! Et oui c’en était, des mélodies, des impros – et encore Nathan nous avouera s’être retenu, impressionné par les chevaux sous le capot (sic) de son beau piano – de la liberté, de la créativité, un peu de swing parfois, pour une musique vivante ; si ça ce n’est pas du jazz !