Laura Prince à l’Astrada

« Piece of Mine »

par Annie Robert, photos Thierry Dubuc de Live Performance

Astrada de Marciac. Mardi 25 Juillet

Mais que le mélange a du bon !!
Quels sont les pisse- froid, les retrécis du bulbe, les étroits de la perspective qui peuvent penser que le métissage appauvrit les cultures, qu’il ébranle la pureté et l’ héritage? Franchement !!
Laura Prince est un exemple magnifique de ce que deux cultures (et plus encore!) peuvent apporter à la création pour que naissent de nouvelles couleurs, de nouvelles saveurs et de nouveaux sons.
Auteure, compositrice et chanteuse Laura Prince est la révélation jazz vocal de l’année 2021 et on comprend pourquoi.
Franco- togolaise, elle revendique cette appartenance multiple, ces influences chatoyantes ou sérieuses, tous ces morceaux d’elle-même, tous ces morceaux des siens qui finalement créent plus qu’un patchwork, créent une véritable artiste, solide, remplie de toutes leurs histoires. Les fragments se sont retrouvés, soudés, ont fait pierre et bois, ils ont fabriqué du neuf, une pièce unique et rayonnante.
Le cheminement n’a peut être pas été simple, peut être pas pavé de roses et des lauriers, mais elle en a fait une force que nous prenons infiniment de bonheur à partager avec elle.
C’est le piano inspiré de Grégory Privat, libre, dansant, jamais attendu (il est tellement merveilleux ce garçon qu’il faudrait lui consacrer une chronique à lui tout seul…!! ) qui débute le concert pour un voyage d’enfance entre images, souvenirs et perceptions, pour un mix de jazz et afro-beat, de salsa, de gospel léger et de chansons d’amours contrariées ou heureuses.
La voix grave profonde et sensuelle, est diablement agile. Elle allie la sophistication et la simplicité. Elle chante en anglais sans doute pour la souplesse que cela procure et c’est d’une beauté éclairante.
Ce concert se déroule comme une suite de chansons, des petits tableaux éclairés de joie ou de tristesse. Le tout est porté par une section rythmique qui pulse, qui groove, qui danse mais qui n ‘envahit pas trop ( et pourtant ils sont deux…batterie et percussions et la prouesse est leur fond de commerce ) et une contrebasse sacrément expressive.
Rien n’est jamais trop évident, ni trop facile mais tout est sensible et perceptible par chacun.
Laura Prince présente ses musiciens en musique, avant d’enchaîner sur un morceau plus revendicatif, plus scandé ou le chant se fait plus âpre, plus implorant avant de passer sur un duo piano / voix, délicat. L ‘émotion gagne alors les yeux, les poumons et la peau.
Un duo contrebasse /voix autour de « They can’t take that away from me » en hommage à Tony Benett, dévoile un joli sens du swing et relâche l’émotion…
Puis un petit jeu avec la salle autour de «Save me» joyeux, tourné vers l’avenir et un solo de percu très inspiré nous remet le groove avant un morceau de choix un « AmaZonia » bluffant, très émouvant, avec des vocaux harmonisés et un solo de batterie d’un folie trépidante, osée, joyeuse comme une pépite
Et c’est seule au piano qu’elle clôturera ce concert avec le titre éponyme de son album « Piece of mine » moment de prière et de mémoire où la voix est porteuse d’une émotion à son maximum. Avant un rappel bien sûr…

Laura Prince qui mêle une certaine gravité avec des rythmes plus entraînants, chante avec une réussite totale le métissage réussi, la pluralité volontaire, la joie de la culture élargie et du parcours atypique, qui forge et inspire. Entourée d’un quartet merveilleux ( mais vraiment merveilleux!!) , elle nous entraîne dans son univers très personnel, émouvant, envoûtant par la seule magie de sa voix caressante et veloutée, balancée entre vents d’Afrique et collines verdoyantes.

Mais que le mélange a du bon!!
Laura Prince vocal • Grégory Privat piano • Tilo Bertholo batterie • Zacharie Abraham contrebasse • Inor Sotolongo percussions