JAZZ(S) à TROIS PALIS

Par : Alain Fleche

Photos : Michèle Mériaud

Vendredi 20 septembre

François Corneloup : sax baryton / Bernard Santacruz : contrebasse

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1er concert de ce bel événement : un Duo pour une entrée (en matière) qui a goùt de dessert. Miam ! Pas besoin de présenter ces magnifiques artistes, musiciens accomplis, compositeurs, improvisateurs et êtres humains hors classe, chaleureux et toujours innovants (comme tous ceux, bien entendu, que nous présentera Bruno Tocanne tout au long de ces 3 journées de découvertes, de rencontres et d’échanges). François, qui est de tous les bons coups du sud-ouest depuis qu’il a choisi de vivre dans le grand Bordeaux, toujours accroché à son sax éléphantesque qu’il fait chanter comme une Diva, et à son éternel sourire d’innocence et de joie. Bernard, trop discret, trop rare (c’est loin Avignon) trop fort (pour oser manquer son passage) . Voici donc de la musique vivante et bondissante ! Bernard installe un doux tapis mélodique sur lequel François vient broder des points de poésie en demi-teintes. Le son est beau et s’insinue dans les oreilles grandes ouvertes. Ca joue pour de bon des champs de fleurs, des chants d’amour. Souvenir d’une rêverie ininterrompue. 2ème morceau, le seul de Bernard ce soir : plus appuyé, plus rock. 2 accords qui vont se promener sur le manche de la ‘grand’mère ‘, le gros sax va y promener sa touche lyrique, y imprimer une « mélodie en sous-sol » dont on reviendra en « ascenseur », plein d’images donc, en noir et blanc, qui vont s’effilocher au gré de l’archet qui s’applique à déconstruire le rythme original qui tend maintenant vers une mélopée orientalisante. Les sons des 2 gros instruments se mêlent, jusqu’à se demander qui fait quoi… on en retiendra un ensemble envoûtant. On continue. Un leitmotiv de boite musicale où François fait office de danseuse. Un vol d’oiseaux avec des échappées ‘out’ et libres, retour de ritournelle cher à Ayler (ou bien Moondog). Un ostinato où le baryton s’immisce sur la pointe des clés, entre les notes, et hop, on inverse les rôles. Dentelle à 4 mains. Enfin « La nuit est à nous » ! Champs d’étoiles, début de fête… grosse présence des 2 instruments. Ca chante ! Mélodie nouvelle qu’il nous semble reconnaître déjà. Des arpèges qui se construisent et se désagrègent, se transforment, difformes, se reforment, autrement, ailleurs. Et puis s’en vont, nous laissant presque orphelins… Mais la nuit, et la musique continuent !

2ème chapitre, 2ème duo :

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Nicolas Bianco : contre basse, compo / Federico Casagrande : guitare électrique

Une discussion à notes repus sur des compos douces, élégantes, touchantes. Une contrebasse vive, joyeuse, savante aussi, dont Nicolas fait chanter la profondeur du bois, sorte d’hommage à Charlie Haden, avec clin d’œil au maître du jeune Bianco : Ricardo Del Fra. Federico, concentré sur le manche, les pédales d’effet, les partoches. Attentif aux signaux de la ‘Mémère’ qui font chavirer les élans trop sûr d’eux. Attentif, à trouver les sons, puisés dans la grande besace de Metheny, passés au tamis de cet original guitariste. Récital de leur dernier album commun : « Sketch of Mountain ». Musique appliquée, sage et mystérieuse, rieuse et fine. Jazz en douceur, musique contemporaine alanguie. Des mots, des voix, des phrases, on se sentirait presque inopportuns d’écouter aux portes ce discours intime si nous n’étions chaleureusement conviés à partager ces secrets d’âme retrouvés. 2 amis invités à la maison qui nous racontent leur rencontre, leurs humeurs, leurs amours. C’est à nous d’aller piocher les sentiments qui affleurent chaque note, chaque mot. Ca parle de « Oslo », de Michel Petrucciani, , en accords, en arpèges, suites savantes, frémissements rock et chansonnettes. Discours à 20 doigts pour quelques dizaines d’oreilles recueillies sur ce lit de nuages colorés. Musique écrite où l’on s’approprie les mots, avec des silences pour les distinguer et les relier. Des idées surgissent, s’enchaînent dans une logique péremptoire sans être catégorique, liberté en suspend qu’attrape qui peut, qui veut. Tout ça à cause de ce drôle de p’tit Nicolas qui décidément n’arrive pas à se prendre au sérieux, c’est heureux, en accrochant à chaque notes qui pourraient sembler laconiques , un extrait palpable de son sourire de lutin farceur et leur communique ainsi présence et bonheur d’exister ! Et chante les cordes !

En route pour une nuit d’étoiles et de sourires, de notes accrochées au cœur et à l’âme. Rêves de musique fleurie, de bouquet d’artifice et d’étincelles.

 

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