Aurora Quartet

Par Dom Imonk, photos Jean-Michel Meyre.

L’Entrepôt Le Haillan – Mercredi 26 janvier 2022

Aurora 4tet fut constitué fin 2019, autour des compositions de Nicolas Girardi, son batteur et leader,  alors entouré d’Émeline Marcon (voix), de Flavien You (basse) et d’Antoine Elias Kebbe (claviers). Dans la foulée, cette formation fut sélectionnée pour participer au Tremplin Action Jazz en janvier 2020, à l’issue duquel elle reçut le prix de la Note Bleue. Comme pour beaucoup de groupes, la pandémie est une cruelle période, fort difficile à vivre. Mais en avril 2021, Aurora 4tet se vit proposer une providentielle résidence par Jazz 360 à Cénac, ce qui réactiva sa motivation et ses forces créatives, pour se remettre au travail, dans d’idéales conditions de scène et de son. C’est donc  un quartet visiblement ravi de jouer, avec désormais Margherita Gruden au piano, que nous avons eu le plaisir de retrouver ce soir, dans le cadre des mercredis du jazz de l’Entrepôt, soirée chaleureusement présentée par Manuel Corneau, l’hôte de ces lieux, partenaires d’Action Jazz.

Ces longs mois d’absence ont donc été propices à un travail de peaufinage des compositions « at home », quelques fois par vidéos interposées, ce qui, la résidence de Cénac aidant, a enrichi la musique, les thèmes proposés ce soir, pour la plupart déjà connus,  offrant plus de densité, plus de tanins, avec une maturation qui sied aux vins bien nés. Toutes de la plume de Nicolas Girardi, les compositions sont généreuses et réfléchies, et voient d’un œil attendri certains passages de son histoire et de celles de ses proches et amis. Mais elles gardent aussi ce côté hirsute et bohème des années d’insouciance, enfance, études, comme par exemple cette « Rue Carpenteyre », située dans le quartier Saint Michel, qui  fleure bon la coloc avec les camarades du Conservatoire de Bordeaux tout proche, et la vie jusqu’à pas d’heure ou l’on refait le monde, en particulier celui de la musique ! Voilée d’un brin de nostalgie, la voix d’Émeline Marcon nous entraine dans un monde de rêves vifs, celui des souvenirs proches, délicatement portée par une basse en pointillé ouateuse, un piano déjà baladeur et la batterie attentive, mi baguettes mi percussions du maître de l’aurore. Après cette envolée passionnée, voici déjà un chorus de basse, d’abord percussif, puis plus dense, le son est pur, pas de rack d’effet ce soir ! Nous sommes captivés par cette histoire, mais cela ne s’arrêtera pas là !

Dans la même lignée, voici que « Chemin de Ronde » se profile, l’une des premières compositions de Nicolas Girardi, qui nous raconte l’histoire de cette rue où il a grandi. Toujours la voix vive et engagée de notre vocaliste, qui apporte au son du groupe sa singulière texture. Elle scande son verbe à la manière d’une Tania Maria, et parvient à suggérer des envies d’un voyage rêvé, quelque part entre Rio et la Havane, le rythme coloré en donne envie ! Notons aussi un chorus bien enlevé de Margherita Gruden, assez lyrique, manière de joliment étoffer la fête des sons, que viendra épicer un très beau  solo de batterie.

« Quand on est un peu down, on en ressort toujours un peu grandi », c’est par ces mots que Nicolas Girardi nous présentera « Under the rain », morceau poignant par des climats changeants, dont le souffle enfiévré d’Émeline Marcon inspire un mood arabisant, voire celte, avant de chanter avec une belle éloquence en anglais sur ses propres paroles. On aime ! Après un passage tout en légèreté,  reprise en rythme plus appuyé par le groupe, décidemment d’une remarquable cohésion, il s’agit probablement de « Tic-Tac », et un séduisant piano plutôt syncopé genre Chick Corea.

Nous nous sommes ensuite régalés du touchant « Louélé »,  que notre batteur a dédié à ses sœurs, et qu’Émeline a chanté en italien sur ses propres paroles, espace de douceur et de tumulte, ainsi que de « Primavera », morceau dont le lyrisme nous a émus. Comme souvent chez Aurora, c’est assez soft au départ, puis ça démarre en trombe, quelle vivifiante impression, avec cette touche ménestrel troubadour par endroit.  Encore une fois, on sent du celte là-dedans. Puis voici venir un break saccadé par une polyrythmie genre « Fool in the Rain » de Led Zeppelin, en un solo magistral de batterie ! Impossible d’en dire moins sur ces morceaux, inspirés et vraiment passionnants !

Vous pensiez que c’était fini, et bien non ! Notez que lors de leurs concerts futurs, bien mieux qu’un ascenseur, il vous faudra prendre « L’escalier de Penrose »,  qui monte et descend  à  l’infini.  Assez complexe et tournoyant, toujours sur un rythme  soutenu,  mais là,  plutôt hispanique, d’ailleurs, ne serait-ce pas « Sketches  of Penrose » ? Envolées vocales envoûtantes,  puis on redescend. Break de batterie, et ça  repart limite calypso. Ce groupe est incroyable, il se passe vraiment  quelque chose grâce à ces changements ! Ne serait-ce pas cela sa force ?

Enfin, dernier instant émotion avec « PHLAN », les initiales de la famille de Nicolas Girardi.
Eclairé par un piano  enjoué, et porté par un groupe d’épatants musiciens, dont la complicité chaloupée est de tous instants,  et toujours cette petite  pointe de mélancolie que l’on a ressentie, lors de ce set. Quitte à me répéter, sachez que oui, nous étions vraiment bien à L’Entrepôt du Haillan, car même de nuit, il y faisait grand jour grâce aux lumières de l’aurore sonore offerte par l’Aurora 4tet, un groupe qu’il nous tardait vraiment de réécouter ! Enfin, si vous les avez loupés, ou souhaiteriez les revoir, ils seront en concert pour les Diluviennes le vendredi 11 février à 20h au Théâtre de L’Inox 11-13 rue Fernand Philippart à  Bordeaux, le 12 février à DBO Douchapt, et le samedi 19 mars à 19h30 pour la soirée Jazz Club 360 à la Salle Culturelle de Cénac.

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Galerie photos :

Aurora 4tet

Flavien You et Émeline Marcon

Margherita Gruden

Émeline Marcon

Flavien You

Nico Girardi