Alain Milien

« Connivence »

par Philippe Desmond.

https://www.alainmilien.com/

Alain Milien : chant, textes et compositions / Lionel Dandine : piano, arrangements / Pierre Fénichel : contrebasse / Cédrick Bec : batterie.

Alain Milien est auteur-compositeur, chanteur et écrivain, déjà deux romans à son actif. Il nous propose ici un album de chansons jazz originales en français, chose assez rare de nos jours. Peu se sont lancés en effet dans cet exercice préférant ou ne pas chanter ou le faire en anglais, notre belle langue n’étant pas pour beaucoup, compatible avec le jazz. Il s’est ainsi adjoint un trio de musiciens aux CV étoffés . Pierre Fénichel le contrebassiste a ainsi collaboré avec pas mal de chanteuse, Cecil McLorin Salvant, Leyla McCalla, Marion Rampal, Célia Kameni mais aussi Raphaël Imbert, Anne Paceo… Le pianiste marseillais Lionel Dandine a déjà trois albums à son actif dont un consacré à la musique de Count Basie. Le batteur Cédric Bec a lui joué avec Ambrose Akinmusire, Michel Portal, Wynton Marsalis, Archie Shepp… Autant dire que ce trio transpire le jazz et procure une sacrée assise au chanteur.

Comment ne pas penser à Boris Vian en entendant le timbre de voix assez haut d’Alain Milien ? Et la langue française il la fait swinguer comme dans l’épatant « Narcivenale » et sa débauche volontaire de rimes en « ant » tirant vers le scat. On est ici loin des crooners sirupeux, plus proche des chanteurs réalistes aux textes travaillés et avec du sens. Il n’est pas un chanteur à voix mais un chanteur à textes. Il chante l’amour bien sûr, la vie, les arbres… On trouve une légèreté poétique et fantaisiste dans ses chansons, on pourrait penser à Trenet parfois mais le trio nous rappelle souvent que c’est bien du jazz qui se joue ici. Des chorus sont bien là, le chanteur ne prend pas toute la place et ça swingue souvent. Alain Milien chante beaucoup pour les enfants, il l’évoque dans une chanson pleine d’auto dérision « Le chanteur et la grenouille » ; mais il y a du Brassens aussi là-dedans, les culs-bénis en prennent pour leur grade…

Voilà des rythmes brésiliens avec « La dame qui courait tout le temps » à la mélodie accrocheuse, une chanson suggestive mais d’amour déçu avec « Faim de communication » où le trio nous montre une autre fois ce dont il est capable. « Tu m’énerves » nous ramène encore au Brésil le rythme de samba adoucissant le propos aigre-doux du chanteur avant de basculer dans du vrai be-bop.

Un album plein de charme.