Par François Laroulandie, photos Christine Sardaine et FL

Action Jazz était présent à Mios les 22 et 23 août 2025 pour la quatrième édition du Festival Be(e) Holiday, organisé par la Ville de Mios en collaboration avec l’école de musique locale Music en l’Eyre, sous la direction artistique de Valentin Foulon-Balsamo et Sébastien Barthélémy. Labellisé Scènes d’été en Gironde, le festival se propose de rendre accessible à tous la culture jazz en offrant une palette riche d’évènements festifs et de qualité.

Moment symbolique incontournable, l’inauguration officielle a lieu sous la Halle François Cazis ce vendredi à 19h15 par Cédric Pain, Maire de Mios. Les remerciements sont l’occasion de nommer les institutions, partenaires publics et privés, sans lesquels un festival entièrement offert au public ne pourrait exister. C’est aussi l’occasion de citer toutes les « petites mains » qui contribuent à faire vivre l’évènement ; les élus, les agents de la Commission Culture, tous les bénévoles, qui sont applaudis, bénévoles mis à nouveau à l’honneur par Sophie Juanico, Présidente de Music en l’Eyre.
Présentation du programme de ces deux journées par Sébastien Barthélémy et Valentin Foulon-Balsamo qui remercient Eric Coignat, Directeur du Festival d’Andernos, venu en voisin et ami.
Serge Balsamo, parrain du Festival, lui souhaite longue vie, sous le signe de la liberté ; ce que nous partageons volontiers.
Enfin M. le Maire, sans oublier de citer tous les soutiens déclare ouvert le Festival ; le symbolique ruban coupé par quelque main (innocente, tout un symbole là encore), et invite au pot de l’amitié. 

Oysters Dissident Brass Band

C’est devenu un rituel désormais d’ouvrir les festivités aux accords entraînants de brass-bands qui savent mettre l’ambiance, et c’est le cas du Oysters Dissident Band au répertoire typique des marching bands de New Orleans, composé de six musiciens issus du Conservatoire de Bordeaux :
Maxime Pache, trombone et chant ; Jacob Chaygneaud Dupuis, saxophone ténor et à l’occasion tambourin ; Dimitri Suso, trompette ; Sylvain Caussé, soubassophone, Morgan Marseille, snare ; Florian Lévy, grosse caisse. 

La grosse caisse marque le rythme syncopé de la marche, la caisse claire improvise à loisir, le soubassophone entraîne le public _ou plutôt les participants_ à donner des pieds et des mains, tant cette musique vivante et festive a le pouvoir de communiquer la joie de vivre, ici et maintenant. Les cuivres et le sax rivalisent de solos, les improvisations collectives et la voix de Maxime Pache lorsqu’il lâche son trombone nous envoient direct dans le bayou.  Il faut dire que ce dernier revient tout droit dun séjour à Nola où il s’est colleté avec les musiciens locaux à l’école de la rue. L’ensemble produit un joyeux capharnaüm qui nous emporte déjà du côté de la fête qui s’annonce.

Les titres du répertoire New Orleans s’enchaînent avec un brio réjouissant, entre des ‟Whoopin’ Bluesˮ, ‟Meet me on Frenchmen Streetˮ, ‟Exactly like youˮ (un morceau de 1930) et autres standards. Trois sets sans relâche, une heure et demie de musique non stop qui a mis l’ambiance au pot de l’amitié offert par la Ville de Mios et aux tablées de restauration (une bonne sélection des incontournables food-trucks a fait le déplacement). Nous retiendrons cette fabuleuse séquence de titres emblématiques de musique de second line comme ce ‟We got that fireˮ enfiévré en version longue introduite par des incantations de Black Indians, et un final sur ‟When the Saints go marching inˮ, marche funéraire qui se métamorphose en joyeux dixieland. Pari réussi pour ce Oyster’s Dissident Band et sa musique généreuse 

Serge Balsamo trio

 
 
Sans transition, la scène accueille des musiciens locaux réunis au sein du Serge Balsamo Trio : Serge Balsamo, guitare ; Jonathan Hédeline, guitare basse ; Eric Pérez, batterie.

Serge Balsamo aime débuter un concert avec ce titre de Horace Silver en forme de message : ‟Peaceˮ. Un blues lent mené aux balais de Eric Pérez qui nous offre à connaître le toucher onctueux de la basse de Jonathan Hédeline. Suit ‟Demi teinteˮ, une composition de Serge au tempo enlevé et contrastes, calmes et accélérations, basse profonde et notes véloces de sa Gibson. Mais ça décolle véritablement avec un standard revisité, ‟Indifférenceˮ, une valse arrangée sur un rythme créolisant ¾ sur proposition de Eric Pérez. Ce dernier ne se prive d’ailleurs pas, ça claque, c’est précis et puissant, ça pulse et fait trembler la Halle. Serge se joue des staccato et legato avec en fond la respiration de la basse. Un blues bien épais ensuite, composition déjà présente en 1992 dans l’album Poésie avec Erik Baron et Jean-Marie Nadaud, ‟Bidouille Bluesˮ. Un morceau qui s’envole vers les cimes et démontre que la basse, entre les doigts de Jonathan, n’est pas qu’un instrument de soutien rythmique, mais une guitare capable de chorus élaborés. Autre compo, voyage en Orient sur un ostinato de basse et une batterie déchaînée, ‟Marché orientalˮ. La guitare de Serge court et s’amuse, virevolte du côté d’un rock fusion qui n’est pas sans rappeler certain groupe mythique de la décade soixante-dix. En suivant, un titre de 1942, ‟There will never be another youˮ, ou comment se faire plaisir avec un standard en y apportant sa touche personnelle. Ces trois-là s’amusent vraiment à se passer la parole en complicité, évidente sur ‟Vignolaˮ, une jolie composition enlevée du nom d’une plage de Corse. En rappel, un titre qu’affectionne particulièrement Serge, et sur lequel il se fait plaisir en cavalier seul entraînant ses complices ; tout le monde aura reconnu bien sûr ‟La Javanaiseˮ en hommage à Sylvain Luc qui clôt en douceur un concert initié sous le signe de la paix. 

Big Band de Music en l’Eyre

Changement de plateau pour accueillir maintenant plus de vingt instrumentistes sur scène, pour la plupart amateurs, le Big Band de Music en l’Eyre, dirigé par Valentin Foulon-Balsamo.

Chants : David Juanico, Stéphanie Duvigneau, Martine Godineau. Invité : Serge Balsamo ; piano : Florent Vasière ; batterie : Emmanuel Mellet ; basse : Eric Chauffeton ; guitare : Eleonore Balsamo ; trompettes : Marie Barthélémy, Sébastien Barthélémy, Sandra Gomez-Vasière, Sarah Degrave, Antoine Valat, Martine Godineau ; trombones : Thierry Leguia, Maxime Costet ; tuba : Stéphanie Marquez ; sax baryton : Hervé Lemaître ; sax basse : Cédric Sourdouyre ; sax alto : Emmanuel Lagarde, Catherine Rollin, Mathilde Bouisson ; sax tenor : Denis Godineau, Christophe Prévaud, Pascal Durrens.

Jolie prouesse déjà que d’installer tout ce monde-là sur scène en vingt minutes ! Et ça démarre fort avec un ‟Mambo Suiteˮ dynamique ; le ton est donné, cet ensemble sonne, avec une belle section de cuivres (six trompettes, deux trombones, un tuba) et huit saxophones du baryton à l’alto. L’ensemble est dirigé avec doigté par le Chef Valentin.
Une belle initiative de ce festival qui intègre l’école de musique locale, offrant à des amateurs l’occasion de se produire sur scène, l’aboutissement de pratiques tout au long de l’année. Chaque titre offre l’occasion de mettre en avant solistes ou voix, tous se donnent avec générosité et le public venu en nombre soutenir leurs favoris ne s’y méprend pas.

Au programme ce soir un répertoire de standards ; ‟All of meˮ chanté par Denis Godineau, puis Serge Balsamo remonte sur scène pour un ‟Stolen Momentsˮ de Oliver Nelson, et surtout un ‟Giorgia on my mindˮ chanté par Stéphanie Duvigneau qui emporte l’adhésion du public. Ambiance cubaine ensuite avec un titre de Arturo Sandoval, ‟Funky Cha Cha Chaˮ avec un joli solo de Sandra Gomez à la trompette, suivi d’un ‟Swingˮ entraînant chanté en duo.
‟Western Storyˮ nous offre le plaisir de revoir et entendre Eleonore Balsamo qui nous avait récemment impressionné à Andernos par son jeu de guitare flamenca et sa technique de golpes, sur une nouvelle composition personnelle.
Ambiance brésilienne ensuite avec un titre de Antonio Carlos Jobim  ‟Chega de Saudadeˮ bien enlevé. Un répertoire ambitieux pour ce big band très en forme ouvrant à coups de guitare basse un ‟Birdlandˮ, titre reconnaissable de Joe Zawinul figurant sur l’album de Weather Report Heavy Weather sorti en 77, ici fort bien interprété. Ça danse dans les travées. 
La fin du concert approche ; un dernier titre, chanté par Marie Barthélémy qui joue d’alternances susurrées et d’envolées swing : ‟It’s ho so quietˮ de Björk remporte une ovation bien méritée.

Séquence remerciements avec un Valentin Foulon-Balsamo qui dirigeait là sa dernière représentation après six années passées à la tête de cette formation, descendant de scène pour les acclamer ; « …c’est grâce à vous que j’en suis là aujourd’hui, vous m’avez apporté beaucoup ».

Reprise pour diriger un ‟Cold Duck Timeˮ tout en émotions avec Serge Balsamo en invité. Tonnerre d’applaudissements d’une salle debout pour un rappel : ce sera ‟Come by meˮ de Harry Connick Jr, titre qui emballe les auditeurs au point de remettre ça pour un deuxième rappel. Belle performance ce soir pour ce big band que nous avions entendu en ouverture du Festival d’Andernos en 2023 ; ce soir en clôture d’une belle première journée avec en prime l’émotion.