Andernos Jazz festival 2025 – Jour 2
Par Philippe Desmond, photos Géraldine Gilleron, Philippe Marzat et PhD
Samedi 26 juillet
Après une première soirée éclatante et avant d’aller faire un tour près du marché, on se retrouve à la maison Louis-David où exposent Tristan Gassiole et Philippe Marzat. le premier crée des œuvres au chalumeau sur des plaques en acier avec ici pour thème le jazz bien sûr. Le second, vous voyez régulièrement ses photos sur nos réseaux ; il est un des photographes d’art d’Action Jazz et officie dans de nombreux concerts et festivals.
Après quelques foulées nous voilà place du 14 juillet – même si on est déjà le 26 – où se produit l’orchestre de jazz de l’Ecole municipale de musique d’Andernos sous la direction de Thibault Perlade. Quelle chance pour ces amateurs éclairés de se produire ainsi en public.
Le Brass
Mais au loin on entend les échos enflammés de Le Brass. Le groupe déambule dans la rue piétonne dans une liesse qu’il crée avec sa musique. Charlie Dalès en tête, de sa voix puissante et avec son énergie habituelle, la fanfare embarque familles, touristes dans un tourbillon coloré de notes et de joie. Standards de blues, de soul, l’ambiance est là et ça secoue. Ils finiront leur déambulation sur la scène de la jetée devant une assistance de plus en plus nombreuse. Encore une réussite pour un groupe de la région
Charlie Dalès : chant / Stephan « Fingers » Barincourt : guitare / Jeremy McCrae : basse / William Robin : accordéon / Pierrot Gosselin : sax ténor / Géza Molnar : trombone / Louis Gachet : trompette / Manu Milhou : percussion / Sébastien Vallier : brassmobile.
Léo Labarrière trio
Chaque année le festival est aussi l’occasion de découvrir de jeunes musiciens. Ici le trio de Léo Labarrière. La famille de ce pianiste qui étudie encore à Paris vit à Andernos, l’occasion était trop belle. Pianiste virtuose il anime ce trio à la section rythmique excellente pour des créations musicales très riches, aux ostinatos bien sentis, aux mélodies intéressantes. Un jazz aérien où la musique classique n’est jamais loin mais dynamisée par un réel sens rythmique. Un aspect cinématographique est aussi présent dans les mélodies et harmonies. Un avenir qui s’annonce prometteur pour ce trio au vu du succès obtenu.
Léopold Labarrière : piano, compositions / Jules Billé : contrebasse / Joseph Roth : batterie.
Jérôme Gatius Big Five
Eric Coignat connaît bien son affaire et il sait qu’à l’heure de l’apéro ou de la promenade sur l’Esplanade de la Jetée où promeneurs et touristes affluent, il faut proposer des valeurs sûres. C’est Jérôme Gatius Big Five qui est chargé de faire swinguer la foule et ça ils savent le faire les lascars. Et ils vont nous prouver que le jazz dit classique celui de Fats Waller, Sydney Bechet et bien d’autres a toujours sa place n’en déplaise aux tenants de musiques plus complexes ou cérébrales. Finesse, swing, groove, le tout avec naturel, gentillesse et surtout talent, voilà les ingrédients pour un concert grand public réussi. Le genre de concert qu’on quitte à regret mais avec le sourire. Et encore une équipe locale composée de girondins – dont deux du Bassin, Jérôme et Pascal – et d’un bayonnais, Arnaud.
Jérôme Gatius : clarinette, sax alto et soprano / Pascal Drapeau : trompette, cornet / Arnaud Labastie : piano / Benoît Auprêtre : batterie / Laurent Vanhée : contrebasse.
Marie Carrié Quintet
De la jetée on glisse vers le Jardin Louis-David. Pas d’inquiétude le concert n’y aura pas commencé car le contrebassiste est le même ! Juste un quart d’heure de battement pour Laurent Vanhée pour passer d’un groupe à l’autre ! Il aura donc joué trois heures ce soir. Ces musiciens m’épateront toujours et dire que certains se demandent si c’est un métier ! Encore une fois Eric Coignat n’est pas allé les chercher bien loin et il va nous prouver qu’il a eu raison. Évidemment certains regrettent le temps où les grandes stars américaines venaient ici mais Andernos a voulu revenir à des choses plus simples sans pour autant négliger la qualité. Rappelons-le, ici tout est offert – pas gratuit, nuance – et on se refuse à être une grosse machine obligée d’introduire des artistes de variété ou de pop pour assurer la billetterie ; jetez un oeil aux programmations de festivals estivaux renommés…
Les places sont chères pour s’asseoir, pourtant il y a plus de mille chaises. dans le cadre de verdure du parc. Les organisateurs évalueront l’assistance à 1700 personnes ! Belle audience pour Marie Carrié et son groupe. Elle évoluait la veille en trio aux soirées Truck & Jazz des Cordeliers à Saint Emilion devant beaucoup moins de gens dont beaucoup venus pour les burgers et les boissons à consommer avec modération… Elle va nous démontrer, s’il en était encore besoin, qu’elle a la classe et le coffre pour, avec ses musiciens, proposer un set magnifique. Yann Pénichou lui a arrangé sur mesure quelques standards qui font l’objet d’un album sorti il y a quelque temps « The Nearness of You » et que Marie va nous chanter avec élégance, naturel, sans esbroufe. « Misty », « Joy Spring » « Just in Time »… et surprise une version fidèle et pleine d’émotion de « Cécile » de Claude Nougaro. Marie scatte aussi quand il le faut, tellement bien soutenue par son orchestre, Alex Golino et Yann Pénichou en solistes inspirés et Laurent Vanhée avec Didier Ottaviani en efficacité rythmique. Un beau succès mérité et un concert digne de ce grand festival.
Marie Carrié : chant / Yann Pénichou : guitare, arrangements / Alex Golino : sax ténor / Didier Ottaviani : batterie / Laurent Vanhée : contrebasse
Jacky Terrasson trio
Scène régionale on l’a vu mais aussi scène internationale avec Jacky Terrasson, le grand pianiste franco-américain qui habite devinez où ? A Bordeaux ! Action jazz l’avait interviewé chez lui : Interview Jacky Terrasson novembre 2023.
Avec son trio habituel et les excellents Sylvain Romano et Lukmil Pérez il est l’attraction de ce festival. Dans l’écrin de verdure au pied de l’immense chêne avec lequel jouent les lumières, il va tout simplement nous offrir un concert extraordinaire. Il a visiblement envie de nous régaler et par la même occasion de se régaler lui-même. Démarrage romantique pour vite accélérer la cadence avec « AF 006 » de son dernier album « Moving On » ; c’est parti pour un concert sans set list au gré de son envie, de son inspiration. « Misty » et des grognements dignes d’Erroll Garner , « Moving On » , « I will wait for you » et des parapluies de Cherbourg retournés par la tempête de notes surgissant du clavier. Les thèmes sont là bien sûr mais Jacky les entraîne hors limites. Ses deux compères ne le quittent pas des yeux, ils sont du voyage mais n’en connaissent pas l’itinéraire, ils sont à l’affût, Sylvain arc-bouté sur sa contrebasse, Lukmil aux aguets rebondissant sur les fulgurances parfois extravagantes du pianiste. Tous edux extraordinaires de réactivité, visiblement heureux des bons tours que leur joue Jacky. Du jazz éblouissant, de l’art pur. La « Caravan » de Duke sera jouée en version cubiste, on en voit – entend – toutes les faces à la fois, on s’y perd, on s’y retrouve, elle nous entraîne dans les étoiles qui elles aussi sont venues voir le concert. Auparavant on aura entendu sur la musique de « La Part des Anges » le poème de Baudelaire « Enivrez-vous » déclamé par Stéphane Menu. Et en rappel – on en aurait voulu toute la nuit – une jeune chanteuse viendra interpréter avec le trio un arrangement ou dérangement de « Summertime », une certaine Margaux Terrasson, la propre fille du Maître. Joli moment. Un concert exceptionnel dont on se souviendra longtemps, toujours.
Jacky Terrasson : piano / Sylvain Romano : contrebasse / Lukmil Pérez : batterie. Invités : Stéphane Menu et Margaux Terrasson.
Et alors que le jardin Louis-David était pris d’assaut pour ces deux concerts, l’Esplanade le la Jetée affichait aussi complet pour la deuxième prestation de la journee de Le Brass. Rarement eu autant de monde pour le festival !
A suivre…