
Feux, le nouvel album de Theorem of Joy !
Par François Laroulandie
Après leur envoûtante prestation sur la scène du Théâtre des Quatre Saisons de Gradignan le 6 mai dernier, nous attendions avec impatience la sortie de lalbum de Theorem of Joy, le groupe emmené par le contrebassiste Thomas Julienne. Feux, produit par le collectif Déluge, disponible le 19 septembre 2025 !
Thomas Julienne, contrebasse, compositions / Raphaëlle Brochet, chant / Robin Antunes, violon / Anthony Winzenrith, guitare /Tom Peyron, batterie / Sary Khalife, violoncelle / Robinson Khoury, trombone
Feux nous parle du monde ; neuf compositions originales de Thomas Julienne explorant les questions du vivre ensemble, entre mythes anciens, défis contemporains et visions futuristes. Cest aussi un voyage onirique teinté de sonorités orientales porté par la voix envoûtante de Raphaëlle Brochet aux couleurs chatoyantes de lInde, un jazz créatif qui a su intégrer les influences de ses instrumentistes. Un album riche de sonorités, délicatement soutenu par le jeu sensible et ferme de Thomas Julienne à la contrebasse, aux accents à l’occasion post-rock dans le jeu de guitare de Antony Winzenrith dans ‟Behind the skyˮ ou carrément électro sur ‟El Haïk dance floorˮ avec Tom Peyron à la rythmique implacable et les envolées lyriques du violon de Robin Antunes en riffs hypnotiques approchant l’état de transe. A remarquer également la belle présence du trombone de Robinson Khoury sur ‟Au mondeˮ ainsi que l’ampleur du violoncelle de Sary Khalife sur ‟Behind the skyˮ.
Un album total qui invite à lintrospection : « A ceux qui questionnent ce qui les entoure et ce de quoi ils sont faits. A ceux qui voient un peu de lumière au milieu de ce chaos ». Certes, mais pas seulement. A savourer, pour la voix de Rapahëlle Brochet en légèreté de papillon qui éclot soudain en aigus envoûtants, fil narratif dun album conceptuel et accessible, pour la richesse des émotions ressenties. A noter la grande qualité de la prise de son et du mixage qui participent pleinement au plaisir découte, une richesse sonore qui offre des surprises à chaque nouvelle écoute. "New Spring" sinspire dun conte chinois relatant lacquisition du feu, élément symbolique de destruction mais aussi de vie. Le voyage peut commencer. Violon, contrebasse et guitare électroacoustique délicatement portés par la batterie de Tom Peyron dessinent une aérienne ligne mélodique, lécrin doù senvole le chant de Raphaëlle Brochet aux accents délicieusement orientalisants. Ruptures de rythmes qui aiguisent lécoute, un solo de guitare jazz-rock, lenvolée lyrique du chant sur fond de cordes basses ; nous sommes au cur dun jazz métissé qui a su intégrer ses influences.
« Au Monde ». La ligne mélodique esquissée par la guitare de Anthony Winzenrith accompagne le chant subtilement modulé de Raphaëlle. Une séquence toute empreinte de douceur voyageuse.
“Heart Wide Open” : une intro rythmée entre contrebasse, batterie et pizzicati du violon de Robin Antunes, chant qui nous emmène du côté de lInde, le violon jouant entre subtiles dissonances et jeu festif. Moment de respiration en douceur vers un beau solo de batterie ponctué par les accords de guitare et un final en reprise du thème.
‟Echoˮ, moment de sérénité aux harmoniques de la contrebasse de Thomas Julienne.
“Behind the Sky”; des cordes basses, toile de fond dune ambiance délicieusement inquiétante esquissée entre violon plaintif et voix. Anthony Winzenrith emmène tout le monde avec un solo qui vire en accents post rock de guitare saturée, suivi par le chant en fulgurances qui nous emporte loin et haut. La tragédie va crescendo jusquà la chute, chaos ou calme retrouvé dans un chuchotement.
“Little Raymonde”, cest lhistoire dune enfant cachée dans un champ en Normandie pour éviter les bombes. Cétait en 1944. Une composition très personnelle de Thomas Julienne abordant le thème de la résilience. Le chant est en français cette fois ; « le ciel tombe sur les hommes, je ne suis quune enfant ». Le jeu sensible de la contrebasse en mode mineur accompagnée par Tom Peyron aux balais feutrés crée un climat émouvant.
Avec “In the Way” le chant de Raphaëlle Brochet tutoie les sommets entre une fabuleuse séquence scat et un moment de grâce a cappella, rejoint par le tempo de caisse claire au toucher soyeux ; aérien !
“El Haik Dance Floor” : célébration de la liberté féminine dans la danse. Sur une rythmique binaire aux intonations furieusement électro contrastent les accents plaintifs des cordes à lunisson, un riff hypnotique approchant létat de transe.
“Upside Down Candle” ; un dialogue enchanteur voix et violon en légèreté, avec la palette exubérante du chant céleste de Raphaëlle Brochet.
“Ideal Robots” annonce le retour à la vie. Tempo apaisé, chant en apesanteur, un final tout en délicatesse.