Terell Stafford avec Jazz For Ever
par Philippe Desmond
Hôtel Mercure-Mérignac, vendredi 13 juin 2025.
Terell Stafford : trompette / Arnaud Labastie : piano / Laurent Aslanian : contrebasse / Antoine Gastinel : batterie.
J’avais découvert le trompettiste Terell Stafford au festival Jazz en Mars de Tarnos 2023. Programmé pour un concert le samedi, il avait rejoint sur scène le duo de Rhoda Scott la veille et avait proposé de rajouter un concert le dimanche après-midi avec justement les mêmes musiciens que ce soir. Un artiste généreux humainement donc et musicalement aussi ! Une précision et un son exceptionnels. Il a ainsi joué auprès de Benny Golson, McCoy Tyner, Kenny Barron, Frank Wess, Ravi Coltrane, le Jimmy Heath Big Band… Onze albums en tant que leader et une multitude de collaborations composent la discographie de ce musicien encore cinquantenaire.
Il est revenu dans notre région qu’il apprécie et où il a créé des liens avec des amis musiciens. Il ne fallait donc pas rater ça. Le voilà donc annoncé en quartet avec le pianiste basco-landais Arnaud Labastie – directeur musical du festival Jazz en Mars à Tarnos et membre du trio Swingin’ Bayonne – et ses deux compères Laurent Aslanian à la contrebasse et Antoine Gastinel à la batterie, respectivement professeur et ancien professeur aux conservatoires de Tarnos et Bayonne. On doit ce concert – et celui du lendemain à Biarritz – à Jean-Marc Tailleur et son association Jazz South West (Jazz For Ever à Bordeaux, Jazz & Swing à Biarritz)
Bonne surprise ce soir avec un quartet qui se transforme en quintet, le saxophoniste ténor Alex Golino, une des figures du jazz de la région, venant le compléter.
Pas de round d’observation, voilà une interprétation de « It could happen to me » qui s’enflamme très vite grâce au lyrisme de Terell Stafford. Nous avons devant nous un des plus grands trompettistes de bop actuels. L’énergie qu’il met dans son jeu n’efface en rien sa musicalité. Il est en pleine confiance, sa trompette propulse les notes sans retenue. Pas d’effet, même pas de sourdine de tout le concert, un son naturel d’une pureté absolue qui va chercher des aigus que peu de ses collègues peuvent atteindre. Le tendre velouté du ténor d’Alex nous ramène sur terre de temps en temps, le contraste de tessiture étant un plus dans cette formation. Et notre trio rythmique se retrouve ainsi aspiré littéralement par le souffle de Terell. J’ai rarement vu Arnaud Labastie aussi survolté, inspiré lui aussi. Un de ses élèves de piano assis à côté de moi est époustouflé d’entendre ainsi le vrai niveau de son professeur. Laurent Aslanian est lui aussi en feu et vite en nage (magnifique son solo frotté à l’archet et fredonné), quant à Antoine Gastinel, avec sa placidité habituelle, il régale avec un drumming bourré de fantaisie, de breaks…
Mais revenons à Terell, à son aisance, à son apparente décontraction et à sa bienveillance avec ses compères de circonstances. Il est venu seul des USA et visiblement satisfait de ses sidemen. Il a de quoi. Ses fins de morceaux sont infinies, bourrées d’arabesques, de fioritures, du travail soigné !
Un concert de bop, de swing, de blues (« Sandu ») de JAZZ en résumé comme nous les aimons ! Le public bordelais devrait être plus nombreux à venir assister à des prestations de cette qualité avec en plus une agréable proximité des artistes. Sont déjà venus, Emmet Cohen, Nicolas Gardel, Nicki Parrott, Megaswing, Bacos, Viper Club, Jérôme Gatius… Il en va de la survie de telles organisations tenues par des bénévoles passionnés. Allez visiter leur site Jazz South West
- It could happen to me (Jimmy Van Heusen)
- Unit Seven (Sam Jones)
- Joy Spring (Clifford Brown)
- Old Folks ( Willard Robison)
- It’s you to no one (Sammy Cahn)
- Sandu (Clifford Brown)
- Cotton tail (Duke Ellington)
- But not for me (George Gershwin)