par NN et Vince, photos Philippe Marzat

Festival Jazz et Garonne – Marmande – Samedi 9 octobre 2021

Depuis déjà 10 ans, Eric Séva, saxophoniste et altruiste (un autre instrument qui demande du souffle…) mijote un festival dont l’éclectisme et l’excellence sont les dénominateurs communs. Réussir ce pari n’est jamais chose évidente, même dans l’univers peu conventionnel du jazz. Année après année, soirée après soirée, il réussit à faire découvrir des talents en pleine croissance et les nouveaux projets d’artistes déjà reconnus, dans un même esprit, exigeant pour les puristes mais accessible au grand public.

Alfio Origlio & Celia Kameni – Secret places

Cette soirée du samedi est le parfait exemple de ce parti pris. Le premier set (il serait péjoratif de dire « première partie ») nous propose de faire connaissance avec Celia Kameni, une artiste repérée par un pianiste de jazz expérimenté, Alfio Origlio. Pianiste et arrangeur talentueux aux projets divers, Alfio collabore avec les plus grands artistes et musiciens de la scène française et internationale : Salif Keïta, Manu Katché, André Ceccarelli, Stacey Kent, Michel Jonasz, Gregory Porter, Didier Lockwood, Bobby McFerrin, Michel Legrand, Natalie Dessay, Keziah Jones, Me’shell Ndegeocello, Chris Potter, Erik Truffaz, Daniel Humair…

La jeune artiste Celia Kameni, voix captivante de la nouvelle scène jazz française, intègre le conservatoire de Lyon en 2010 tout en s’investissant dans plusieurs projets musicaux : en 2010, elle participe au projet Motown Revival, puis elle intègre en 2011 le collectif The Amazing Keystone big band qui enregistre en 2018 l’album « We Love Ella », un projet qui leur vaudra les Victoires du Jazz 2018 dans la catégorie « Groupe de l’année ». 

Invités au Festival jazz à Vienne aux côtés de Manu Katché en juin dernier, Alfio Origlio & Celia Kameni ont eu le privilège de partager la scène avec Raoul Midon, Sophie Hunger, Michel Jonasz et Sting… y’a pire non ?

Ce soir, le quartet propose de revisiter des chansons jazz, pop et soul puisées dans le répertoire de Gregory Porter, de Stevie Wonder, des Beatles ou encore de Jeanne Moreau. La chanteuse Célia Kameni nous attire de sa voix captivante dans son univers. Tantôt douceur, tantôt puissance, le registre vocal de Célia s’exprime aussi bien sur un blues qu’une mélodie jazzy, sur laquelle son scat rappelle la grande Diane Reeves.

Alfio donne toute la palette de son talent d’arrangeur en triturant de ses doigts la palette harmonique des standards, dans un phrasé limpide et musical, véloce mais bien dosé.

Michel Molines  (contrebasse) et Zaza Desiderio (batterie) se mettent au service de leurs interprétations d’une musicalité́ exceptionnelle ! Eric Séva est invité à poser son saxophone sur deux titres de Nina Simone et Stevie Wonder qu’il éclaire de ses solos inspirés.

 

Juan Carmona quintet ; quand jazz et le flamenco…sont là !

En seconde partie, le concert de Juan Carmona quintet est surprenant de créativité ! Juan Carmona est un guitariste et compositeur exceptionnel qui revisite le flamenco, mêlant tradition flamenca et jazz. Il nous délivre des mélodies de toute beauté, d’une rare inventivité et d’une absolue modernité qui nous enchantent et nous amènent en Andalousie aux racines de cette musique si puissante et si envoutante…

Plutôt rare sur la scène française, Juan Carmona a joué aux côtés de Larry Coryell, Sylvain Luc, André Manoukian, Thibault Cauvin, Louis Winsberg, Marcus Miller…

Ses albums ont reçu les plus grandes distinctions internationales, notamment plusieurs nominations aux Latin Grammy Awards catégorie « Meilleur Album Flamenco de l’année » et en France grand prix Charles Cros pour son album « Alchemya ». Son oeuvre innovante « Sinfonia Flamenca » (2006) est joué en France comme à l’étranger par les plus grands orchestres.

Depuis 2007 il est également directeur artistique du festival international Les Nuits Flamencas (Châteauvallon, Aubagne, Cannes).

Tout d’abord Juan Carmona entre seul en scène et fait vivre sa guitare sèche ; on se rend bien compte-là du phénomène ! Puis, un à un, ses musiciens entrent sur scène pour accompagner « El Maestro », permettant d’apprécier ainsi la qualité de jeu de chacun : tout est en place et la précision extrême !

Un danseur viendra évoluer au centre du groupe sur quelques morceaux, ajoutant un supplément rythmique d’une intensité remarquable ; une force sans pareille se dégage de cette gestuelle très codifiée, impressionnante, vibrante. La salle retient son souffle !

El Bachi (basse), Isidro Suarez (percussions) et Domingo Patricio (clavier et flûte) font preuve d’une grande complicité autour de Juan Carmona, laissant chacun prendre le chorus au bon moment dans un format à la fois précis et improvisé. L’énergie, la puissance et la vélocité que dégage le groupe impressionnent. Certains morceaux évoquent les projets d’Al Di Meola des années 90. Les nappes de synthés et la douceur de la flûte donnent à cette fusion flamenca un caractère irrésistible ; le public cède littéralement sous le charme.

Un grand bravo et un merci chaleureux à Eric Séva, qui pour cette 11° édition du Festival Jazz & Garonne, réussit encore à réunir un plateau artistique de haut vol. Le travail de production de l’association « les Z’Arts de Garonne » parvient à maintenir la présence du spectacle vivant et on ne peut que la féliciter.

Et au nom de tous les spectateurs, merci votre gentillesse et votre accueil !

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