
Chronique de Martine Omiécinski
Chez Jazz Family
Shems Bendali Quintet – Casbah Qassioun
Ovni 5 étoiles
Quintet :
Shems Bendali : Trompette, compositions
Arthur Donnot : Saxophone ténor, composition (6)
Andrew Audiger : Piano, claviers, composition (7)
Yves Marcotte : Contrebasse
Marton Kiss : Batterie
Invités :
Climène Zarkan : Vocals et paroles (3)
Amine Mraihi : Oud (3,8)
Shems Bendali est un trompettiste franco-algérien qui vit en Suisse. Il a construit à partir de ses racines musicales algériennes, de ses influences du Moyen-Orient et de l’histoire du jazz un univers bien à lui auquel il rajoute des sonorités « spaciales » liées à des influences BD et film de science-fiction (peut-être Moebius dont il me semble que le style de dessin de la pochette est inspiré ?).
Le titre de l’album « Casbah Qassioun » contient 2 références : la belle et vibrante casbah d’Alger et le Mont Qassioun surplombant Damas en Syrie (un lieu mystique dans l’histoire des religions notamment pour les Soufis). Elles se reflètent dans les compositions de Shems.
Le quintet réunit 5 brillants élèves de l’HEMU, la Haute Ecole de Musique de Fribourg en Suisse dont Shems est diplômé. Il a été très remarqué au Montreux Jazz Festival et s’est produit sur plusieurs scènes en France et Allemagne.
« Casbah Qassioun » est son troisième album affirmant ses choix musicaux singuliers et emballants, un album dont on devient vite accro rendant mes choix de morceaux préférés bien difficiles car j’aime tout ! Malgré tout :
Mes morceaux préférés :
« Bled Runner » : pour le clin d’œil humoristique au film « Blade Runner » pour la vivacité d’Andrew Audiger au piano, le lyrisme de la trompette bouchée de Shems Bendali et du saxophone de Arthur Donnot.
« Echos de la Casbah » : Mélodie itérative comme une musique de transe (inspiration Soufi ou Gnaoua ? sur laquelle Shems joue aussi des percussions, trompette et saxo se répondent sur ces sonorités d’Afrique du Nord, des effets envoûtants aux claviers viennent parfaire l’ambiance de ces échos de la casbah.
« Al-Alam Binihar » : Chimène Zarkan, la chanteuse franco-syrienne illumine le morceau de sa belle voix, avec ses propres paroles et quelques effets. La complainte est soutenue par les soufflants avec harmonie, enlacement et virtuosité. Puis le joueur de oud Amine Mraihi, dans la tradition arabo-andalouse, enrichit encore le thème. C’est céleste et millénaire à la fois !
« Ashes » : Andrew au piano entame en lenteur et silences entre les notes ce morceau en apesanteur, contemplatif. La contrebasse suave et limpide d’Yves Marcotte raconte l’histoire avec la batterie toute en retenue, piano et soufflants libèrent leur chorus lyriques, sons étirés, puis une énergie finale avec une performance de Marton Kiss le batteur amène davantage de vibrations : Super !
« Magenta noir » d’Arthur Donnot : Shems à la trompette brode des arabesques savantes en boucle puis Arthur au saxo le rejoint à l’unisson, la contrebasse toute en sensibilité évolue vers un beau duo avec la trompette bouchée, le saxo devient plus expressif que jamais et Andrew fait magnifiquement chanter son piano.
« Nebula Heights » d’Andrew Audiger : la contrebasse toute en rondeur entame ce morceau plus ancré dans la tradition du jazz, avec un trio de base magistral. Les 2 soufflants entortillent à l’unisson leurs volutes audacieuses, Andrew au piano faisant briller sa composition. Chacun impulse un élan vivifiant et singulier, le jeu collectif y répond illico pour notre plus grand plaisir.
Bref, c’est habité, original, et remarquablement joué ! Shems est un véritable Soleil (traduction de son prénom bien mérité) que l’on espère voir et écouter en Live !
https://shemsbendali.bandcamp.com/album/casbah-qassioun

