Butcher Brown et Sroka au Rocher de Palmer
Par François Laroulandie, photos David Bert
BUTCHER BROWN, quintet virginien en concert au Rocher de Palmer ce mardi 14 octobre 2025 avec en première partie, le « bassiste calédonien de Bordeaux » Martin Sroczynski leader du groupe SROKA venu présenter sa nouvelle formule en duo avec le batteur Emile Guillaume.
Sroka

Nous avions découvert Sroka avec leur album Rivages en 2024, un quartet avec Martin Sroczynski à la basse, Emile Guillaume à la batterie, Christophe Bazin aux claviers et Paolo Chatet à la trompette avait conquis le public avec cet assemblage original mêlant jazz, sonorités électroniques et le timbre aérien de la trompette dans une ambiance envoûtante et évocatrice. La formule duo que nous découvrons ce soir signe une forme de recentrement sur les fondations de cette musique, à savoir la puissance de la batterie de Emile et la basse à cinq cordes de Martin, auxquels l’électronique apporte une palette de sonorités inattendues, et cette pulsation hypnotique propre à l’electro. C’est une tendance que l’on constate aujourd’hui, l’arrivée de formations à géométrie variable, à effectifs réduits, où l’électronique occupe une place importante voire prépondérante. La question de savoir si l’on est encore dans le jazz peut susciter bien des débats…
Trente minutes pour un set ouvrant sur des chœurs grandioses en introduction d’une rythmique ultra puissante. La basse joue un riff entêtant tandis que la batterie est déjà sur une autre planète, ça pulse fort, une lame de fond qui emporte tout sur son passage. Sous les sonorités electro l’on pourra percevoir de lointains accents de rock progressif, une belle dynamique et les reliefs colorés de sonorités aériennes qui apportent une rafraîchissante légèreté aux basses surdimensionnées. Six morceaux réarrangés pour cette formation, enchaînés à rythme d’enfer avec un joli travail des éclairages. On retiendra cet inédit ‟Foudre 147ˮ à l’ambiance bleu électrique, intro d’une belle ligne mélodique à la basse dans une ambiance sereine, des échos percussifs, une trompette plus que vraie, un voyage interstellaire dont le départ fait trembler les murs. Une formation à suivre…ils seront prochainement à Paris le 24 octobre Péniche Marcounet et le 30 à Juan les Pins.
Butcher Brown

En deuxième partie, Butcher Brown, formation de cinq instrumentistes venus tout droit de Richmond en Virginie, Etats-Unis :
Corey Fonville, batterie / Andrew Randazzo, guitare basse et électronique / Morgan Burrs, guitare / Marcus « Tennishu » Tenney, saxophone, trompette, chant / Sam Fribush (qui remplace « DJ Harrison » Harris), claviers
On nous avait promis une fête éblouissante, et nous n’avons pas été déçus. Butcher Brown revendique une ouverture musicale sans limite de genre ou de temps et s’autorise l’appropriation d’influences multiples dont il fait son propre mix, un jazz funk dans la lignée d’un Weather Report mâtiné de hip hop à l’occasion, d’un soupçon de R&B, soul et pourquoi pas bossa nova, cela donne un concentré de groove imparable qui incite à ne pas rester statique longtemps. Pas le temps de blabla entre les morceaux, ces cinq là très en forme ont enchaîné à un rythme soutenu les titres issus de leur dernier album Letters from the Atlantic paru cette année 2025 chez Concord Jazz. Des compositions originales interprétées avec brio et assurance parmi lesquelles on aura reconnu un clin d’œil avec ce ‟Dinorah Dinorahˮ de George Benson, l’une de leurs références dans sa période jazz funk, une respiration où se côtoient avec bonheur sax tenor et guitare électrique. Il y a des ambiances festives et décontractées comme dans ‟Montrose forestˮ, Marcus « Tennishu » ayant troqué le saxophone tenor pour la trompette dont il joue avec le même doigté. Celui-ci est aussi au chant, à l’occasion côtoyant les syncopes hip hop. Le guitariste Morgan Burrs joue autant des arpèges en douceur acoustique que des envolées très rock, le batteur Corey Fonville derrière ses fûts assure terriblement, et nous a gratifié d’une séquence solo fort appréciée du public présent. Sans oublier « DJ Harrison » et ce groove magistral à l’orgue. De l’électronique il y en a aussi, et c’est le bassiste Andrew Randazzo qui s’y colle, et ça assure du côté rythmique. Bref on ne s’ennuie pas avec eux, l’ambiance était ce soir comme on dit cool, le genre de prestation fort appréciée en live.
Set list : Seagulls ; Unwind ; Backline ; Right here ; Change in weather; Dinorah Dinorah; I remember; Ibia; Hold You; Montrose forest; Something new about you; Infant eyes.
Leur passage au Rocher était une étape dans leur tournée européenne qui doit les mener à Londres, Bruxelles, Istambul et l’Allemagne tout ça dans ce mois d’octobre 2025, longue route à eux…



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